Les moulinages Emile Rey





Les moulinages Emile Rey
 





Cette histoire est étroitement liée à la fois à celles de la famille Rey et de l’évolution des procédés techniques de moulinage.


Le moulinage est à l’origine une opération qui consiste à donner au fil de soie grège, produit par les magnaneries ou les filatures de soie, la torsion nécessaire à son utilisation par les fabricants d’articles textiles. Cette torsion se donne sur un moulin, d’où le nom de cette opération et de l’établissement industriel où elle s’effectue. La disparition de la soie naturelle n’a pas entraîné celle de cette industrie qui s’est avérée nécessaire au traitement de textiles artificiels puis synthétiques (rayonne, rilsan, …).


L’origine des Moulinages Rey se situe à Beaufort-sur-Gervanne où, en 1852, Simon Rey, propriétaire de l’usine du Moulin-du-Roi, fonde la Maison Rey. Sous sa direction puis celle de son fils Emile, l’entreprise se développe, notamment par l’acquisition ou la location de nouvelles usines : le Dérot à Montclar-sur-Gervanne, les Berthalais à Mirabel-et-Blacons, la Sye à Aouste, etc..


Au décès d’Emile Rey, en 1909, les établissements Rey possèdent de nombreuses usines jusqu’à Clérieux et Pont-en-Royans. Lorsque Joseph Emile Rey succède à son père, ces usines sont équipées pour produire des fils traditionnels dont la demande commence à s’essouffler. Sous son impulsion, elles sont modernisées pour répondre à une nouvelle demande, celle de crêpe de Chine, qui apparaît alors sur le marché de l’industrie textile. Cette activité, plus rémunératrice, accroît encore l’importance des établissements Rey. M. Emile Rey fait débuter à cette époque  »l’âge d’or du moulinage » ( »Rey, une dynastie de mouliniers crestois », in De la soie à l’atome ou 100 ans d’économie drômoise, Chambre de commerce et d’industrie de Valence et de la Drôme, Valence, [1979].) qui dura jusqu’à la crise de 1929.


Si la guerre de 1914-1918 n’a pas, semble-t-il, ralenti de façon sensible l’activité des Moulinages Rey, l’entretien et la modernisation des usines s’arrêtent avec le début des hostilités. Après l’armistice, M. Joseph Emile Rey, malade, ne reprend pas cette politique de modernisation, et à sa mort, en 1922, les usines n’ont bénéficié d’aucune réparation ou amélioration depuis 1914.


Joseph Emile Rey laisse pour seuls héritiers ses six enfants, tous mineurs. Ils ont alors pour tuteur leur oncle, M. Léon Henri Terrail, propriétaire à Aouste. La direction de l’affaire est confiée à un directeur, M. Isidore Cheval. Celui-ci donne un nouvel élan à l’entreprise en réorientant la production des usines vers le moulinage de la rayonne, qui commence à être filée industriellement en France. Cette période de grande prospérité prend fin brusquement avec les répercussions de la crise de 1929 qui frappe de plein fouet l’industrie textile. Les années 1931-1932 sont les pires pour les établissements Rey qui voient leurs usines fermer. M. Cheval démissionne en 1932.


Formé à l’école de tissage de Lyon, M. Emile Rey assure alors la direction de l’entreprise. Une reprise des activités de moulinage s’amorce qui bénéficie aux établissements Rey. Ceux-ci, bien placés pour travailler la rayonne, trouvent notamment un marché important avec l’Allemagne qui en est un gros producteur. La déclaration de guerre de 1939 ferme ce marché à l’exportation. M. Emile Rey est mobilisé et est fait prisonnier en 1940. Pendant l’occupation, les moulinages Rey survivent en travaillant pour les autorités allemandes, sous réserve de ne produire que des fils destinés à une utilisation civile.


Après la Libération, les affaires reprennent. En 1947, les établissements Rey entrent massivement dans le capital de la société anonyme des  »Moulinages de Soubeyran » et en prennent le contrôle. Dès lors l’usine de Soubeyran devient l’unité de production la plus importante du groupe. Le 15 décembre 1955, les  »Moulinages de Soubeyran » sont absorbés par les  »Moulinages Rey ».


En 1952-1953, la demande de fils plats, qui ne nécessitent pas d’opération de moulinage, l’emporte sur les fils textures, d’où une baisse d’activité. L’exportation des crêpes rayonne vers l’Allemagne, qui se poursuit, permet aux établissements Rey de résister à cette détérioration du marché.


L’apparition vers les années 1956-1957 du fil mousse Nylon puis du Rilsan, qu’il est nécessaire de mouliner, redonne un second souffle à une profession en difficulté. Les Moulinages Rey se spécialisent dans la texturation du Rilsan et modernisent leurs installations, notamment en s’équipant de métiers permettant d’utiliser la technique de la  »fausse torsion », qui permet de fabriquer des fils mousse dans de meilleures conditions de rentabilité. Cette production s’accompagne d’un essor des exportations qui ouvrent une nouvelle période d’expansion de la société. En 1975, les  »Moulinages de la Gervanne » sont absorbés à leur tour par les  »Moulinages Emile Rey ». Vers cette époque, ceux-ci  »constituent en France le quatrième groupe pour le moulinage et la texturation des fils artificiels et synthétiques » (Michèle Roussin,  »Crest : quelques aspects actuels d’une petite cité aux vieilles traditions marchandes et industrielles », in Revue de géographie alpine, tome LXVII, 1978, pp. 421-435).

 



Cependant, les graves difficultés que connaît l’industrie textile en France à la fin des années 70 et au début des années 80 ne sont pas sans effets sur ce secteur. La concurrence des pays sous-développés rétrécit inexorablement la part de marché des établissements Rey, qui sont amenés à fermer définitivement en 1985.


A la suite du règlement judiciaire prononcé par le tribunal de commerce de Die, le 7 février 1985, la société anonyme  »Moulinages Emile Rey », domiciliée quartier Soubeyran à Crest, est amenée à cesser ses activités. Au printemps 1986, Me Granjean, syndic chargé de la liquidation des biens, propose aux Archives départementales le dépôt des archives de cette entreprise. Le volume qu’elles occupaient ne permettait pas aux Archives de les accueillir intégralement, aussi un tri sur place des documents à déposer a été entrepris par le personnel des services d’archives, avec l’aimable collaboration de Monsieur Bruno Rey qui n’a ménagé ni ses explications ni ses conseils.


A son apogée les Moulinages Emile Rey comprendront 13 usines  à savoir :

– le Moulin-du-Roi
– le Dérot
– les Berthalais
– la Sye
– Saoû
– Pont-en-Royans
– Soubeyran
– les Porterons
– le Joubernon
– la Gervanne
– Clérieux
– Mazorel
– Rochette
 


Extrait du « Fonds des Moulinages Emile Rey à Crest » ADD 1991  Généalogie simplifiée de la famille REY


Etienne Simon REY né le 15/07/1809, marié à Marie SERVE, née le 8/02/1818, décédée le 2/03/1866

Auguste Emile REY né le 15/05/1842 décédé en 1910, marié à Marie Célina TERRAIL née le 12/02/1841


Joseph Emile REY né le 8/03/1871, décédé le 23/1/1922, marié à Rose MADIER CHAMPVERMEIL, décédée le 8/02/1921

Emile REY né le 22/10/1910


Quelques usines E. Rey


Clérieux en 1905
Clérieux en 1900
Clérieux en 1900 – Autre vue

Le Moulin du Roi 1910
Les Berthalais 1910


 

Le Dérot 1911
Intérieur du moulinage de la Sye en 1930 situé à Aouste