AOUSTE SUR SYE … l’eau dans tous ses états
Extrait du livre » AOUSTE SUR SYE … l’eau dans tous ses états » édité en 2017 par Histoire et Patrimoine Aoustois
Aouste sur Sye et l’eau est une longue histoire. L’eau, force motrice, a été un véritable atout d’une prospérité industrielle florissante mais encore bien présente aujourd’hui pour son agriculture. L’eau coule dans nos rivières, canaux et béalières, comme le sang dans nos veines. Source de vie fondamentale, bien patrimonial commun, nous nous devons de la préserver et la sauvegarder.
SOMMAIRE
- Origines
- Sources de l’Echelette et de Font Chatté
- La Pialle
- Source du pont
A – FONTAINES D’AOUSTE AUX 17e ET 18e siècles
- En 1629
- Fontaine en 1641
- En 1660
- Fontaine de la place en 1730
- Reconstruction de la fontaine en 1757
- Devis des experts
- Modifications du devis initial
B – XIXe et XXe siècles – de 1875 à 1960 –
Les sources de Puy Saint Pierre
C – Des photos
D – Le réseau d’eau potable actuel
- a – Origines du réseau
- b – Situation difficile pour plusieurs communes
- c – Des solutions sont recherchées
- d – Des Fontaigneux à Bourne
- e – Nouvelles études
- f – Le réseau et ses ouvrages
- g – Le Syndicat Drôme-Gervanne en 1990
- h – De l’eau pour tous et de qualité
E – Du Syndicat Intercommunal de l’Eau au SMPAS
I – Les WC publics
CHAPITRE 3 – RIVIÈRES ET RUISSEAUX
A – La Drôme
- Introduction
- 1 – Usages passés
- 2 – Des années 1960 à aujourd’hui
- Conclusion
B – La rivière Sye
C – Le Lauzens
D – La Lauzière et la Gervanne
A – Généralités
B – Droit d’usage des riverains
J – Le canal des Usines de Crest
K – Pétition de la Dame Gresse
L – Le canal de Sye
- 1 – Historique
- 2 – Tracé – Prise
- 3 – Propriété du canal
- 4 – Droits d’arrosage
- La grande lessive ou » buée «
- Le lavoir
- Le lavoir Filliat
- Le lavoir de Bellevue
- Le Petit Bassin
- Le lavoir de Chalancon
- La route de l’étain
- Le pont Saint Vincent
- Le Pont de Drôme
- Les passerelles
- Les ponts de Sye
- Les ponts du Lauzens
- Le pont de Gervanne
GENERALITES
L’eau travaille pour nous de maintes façons, nous rendant la vie plus facile et plus agréable. C’est un élément essentiel de la vie, elle est en effet nécessaire à toutes les activités humaines, ou presque. Elle est également une ressource essentielle au développement des sociétés humaines. Celles-ci se sont d’ailleurs fixées de tout temps au bord des cours d’eau, comme l’atteste l’implantation de la très grande majorité des centres urbains.
Depuis la nuit des temps, les êtres humains ont cherché à mettre l’eau en valeur pour améliorer leur existence. L’histoire de la civilisation est celle des moyens de plus en plus ingénieux que l’ être humain a mis au point pour mettre l’eau à son service. Prés de 5000 ans av. J.-C., nos ancêtres utilisaient déjà l’irrigation pour augmenter la production des récoltes. Des archéologues ont découvert des égouts en maçonnerie remontant à 2750 ans av. J.-C. et des toilettes à chasse d’eau datant d’une époque presque aussi reculée.
L’eau n’est pas seulement utilisée à des fins domestiques, elle est prévue également pour la production d’énergie: foulons à drap, moulins, papeteries, ateliers de fabrication de bourneaux, qui nous intéresserons plus particulièrement. Dans l’ agriculture, elle sert à l’ irrigation des cultures.
Toutefois de «bonne fée», elle se transforme en furie et rien ne l’ arrête. Les conséquences sont les pertes en vie humaine, destruction des habitats et des granges, sans parler de l’envahissement des terres cultivées.
Nous aurons l’occasion d’évoquer ces catastrophes, crues et inondations.
CHAPITRE I
LES SOURCES
Une source est une eau qui sort naturellement de terre ou, l’endroit d’où elle jaillit. Elle peut être à l’origine d’un cours d’eau, mais alimenter aussi des mares, des lacs ou s’ écouler en mer. Une source naît de la conjonction de facteurs topographiques ou hydrogéologiques, comme la perméabilité locale. Si elle coule en permanence, elle est dite «pérenne». Mais elle ne peut se mettre à couler qu’en fonction d’un élément pluvieux (par exemple dans les aquifères karstiques). La source est un élément de l’hydrosphère et de cycle de l’eau.
ORIGINES DES SOURCES D’AOUSTE SUR SYE
Dans la commune existent les sources et réservoirs suivants:
Partie Sud
– Source Lauzens dite aussi source Burrus
– Source Echelette et Source Font Chatté
– Réservoir de Combeplane
Partie Nord
– Pompage de la Pialle
– Réservoir Corneret
– Réservoir Arras
Les sources d’origine
Sources de l’Echelette et de Font Chatté
Les sources de l’Echelette et de Font Chatté prennent naissance dans la montagne qui domine le Pas de Lauzens, et alimentaient au départ, la ferme Vincent.
La source du Pas de Lauzens, dite aussi Source Burrus du nom du propriétaire de la forêt de Saou ( de 1924 à 1959) est désormais propriété de la commune depuis 2003.
Par courrier du 2/11/1954 de Monsieur le Préfet de la Drôme pour la cession de cette source à la commune d’Aouste sur Sye arrête : » J’ai l’honneur de vous adresser, soue ce pli, une ampliation de mon arrêtéen date de ce jour déclarant cessible immédiatement la source et la parcelle de terrain sis sur le territoire de la commune de Saou nécessaire à la réalisation du projet d’adduction d’Aouste sur Sye. Par courrier de ce jour une ampliation est adressée directement à Mr Burrus, propriétaire. »
Selon un rapport de EDACERE effectué en 2012 pour le Syndicat des Eaux de Mirabel-Piégros-Aouste, la source de Font Chatté a un débit de 4 litres/minute et celle de l’ Echelette, un débit de 1,96 litre/seconde avec un débit d’étiage de < 40m3/jour.
La Pialle
Par arrêté n° 1575, du 16/04/1996, le captage de la Pialle a été abandonné et ce, pour les raisons suivantes :
– débit exploitable 30 m³/h, donc faible
– captage réduit en période d’étiage
– installation vétuste
– situation sanitaire médiocre
La source du Pont
Par délibération en date du 27/07/1828, le conseil municipal, a voté sur le budget 1829, une somme de 349,24 frs de l’époque, pour les fouilles et la mise en service d’une source découverte à l’occasion des travaux du mur de soutènement, à l’angle du Pont de la Drôme et à proximité du lavoir. Cette source n’a jamais fait partie du réseau d’eau potable.
Cette délibération précise également, que la commune aura » plus de moyens de porter secours de façon plus efficace, s’il survenait des incendies « , ce qui fut le cas, en 1829 pour la maison Richard.
Les besoins grandissant, d’autres ressources en eau ont dû être envisagées et après plusieurs recherches infructueuses la résurgence de Bourne (l’une des sorties d’un réseau souterrain karstique qui alimente la Gervanne) sous le village de Beaufort, a pu être captée en 1992; mettant à l’abri de la pénurie les deux communes mais également celles de Montclar, Suze et Crest.
CHAPITRE II
LES FONTAINES
A – FONTAINES D’AOUSTE AU XVII e et XVIII e SIECLES
Une fontaine est d’abord le lieu d’une source, » d’une eau vive qui sort de terre « .
L’eau n’est pas seulement utilisée à des fins domestiques, on l’utilise dans l’industrie pour la production d’énergie. Aouste possédait des foulons à drap, un moulin, une papeterie et même un atelier de fabrication de «bourneaux». Dans l’agriculture, l’eau est principalement utilisée pour l’irrigation des cultures.
Où la population se servait-elle pour leurs besoins domestiques? Existait-il des puits ou des citernes dans le bourg? Puisait-elle l’eau dans ses rivières de Drôme, Sye ou Lauzens?
Si les habitants et fermes environnantes possédaient des puits ou des citernes pour s’approvisionner, il n’en était pas de même pour les habitants intra-muros. Ceux-ci durent acheminer l’eau des sources jusqu’au centre du bourg. Déjà les Romains avaient construit un canal au départ de la Sye pour alimenter une villa aux Arras. ( Voir plan ci-dessous).
Nous retrouvons mentions de ces fontaines à partir du début du XVIIe siècle dans les archives municipales.
En 1629
La première mention de l’alimentation en eau à Aouste se trouve dans une délibération du 2 janvier 1629 ( AM BB 2) qui précise » la recherche d’une source d’eau au-dessous du pré de M de Vercors, pour la conduire à la porte de Sie… ». Ce qui permet de penser que la première alimentation en eau du village se trouvait à la Porte de Sye.
Fontaine en 1641
La première mention des fontaines d’Aouste dans le village concerne la construction de la fontaine publique commencée en 1641 et un état de frais s’élevant à 301 livres plus 26 livres en 1643 pour réparations*. Suivant les conclusions prises les 11 août et 23 septembre 1641 ( AM BB 3), sous le consulat de Jean Pourtier qui fit venir le 31 août le fontainier de » Chasteauneuf de Mazenc « , Claude Ollivier la construction des fontaines débuta et se termina le 16 avril 1642. Les sources alimentant cette fontaine étaient proches du ruisseau de Sye. L’une se trouvait dans le fonds de Pierre Bonnardel et l’autre dans celui de Jean Monestier. Leur piètre qualité (eau jaunâtre lors de grosses pluies), leur débit aléatoire (grosseur d’un pouce) et leur situation (conduites traversant le ruisseau sujettes aux crues fréquentes de la Sye) nécessitaient un entretien et des réparations permanentes.
* Il est difficile de donner une valeur actuelle à une monnaie de cette époque. A titre d’équivalence, toute proportion gardée, au XVIIe siècle, un journalier recevait en salaire 10 à 12 sols par jour; un bœuf coûtait 45 livres, un cochon 24 livres et un mouton 3 à 4 livres. Le coût d’un pain de 6 kilos est de 50 sols et une miche peut coûter jusqu’à 17 jours de travail.
Suite à une crue de la Sye, le 25 août 1642, la conduite (bourneaux) fut emportée et il fallut » arrouter » (dévier) une partie du ruisseau dans » le canal des prés » afin de remettre des bourneaux. Antoine Raillon, Jean Dufeux et Pierre Theudier perçurent 1 livre 6 sols pour effectuer cette vacation. Le montant des réparations s’élève à 361 livres 12 sols 3 deniers au 27 novembre 1642.
Une autre réparation fut effectuée en 1643 suite à une rupture de la conduite dans la rue de Surville au droit de la maison de Nicolas Grangier. Les réparations revinrent à 26 livres 1 sol le 16 mai 1643. Il est à noter que dans le relevé de ces travaux, il est fait mention par deux fois d’un » bachat » (une auge) au lieu de Saint Christophe». (AM DD 3 état de fournitures et construction de fontaine 1641)
Où était donc cette fontaine ? Plusieurs fois il est fait mention de Surville et de Saint Christophe.
Rien ne permet de l’affirmer avant 1729, car c’est seulement à partir du 4 janvier 1730 qu’un acte du notaire Reatier de Crest signale la fontaine sur la Place de l’église paroissiale par un extrait du rapport de livraison de la fontaine en 1730 (AM DD 3-15)
Il existait deux fontaines: une sur la place publique et l’autre au pont de Sye ( citerne avec porte et fontaine). Le châtelain Sibeud délivre un ordre de paiement en 1722 pour gages à Etienne Moulin, maçon et charpentier, pour l’entretien de la citerne et de la fontaine suite à délibération du 25 juillet 1722 » … qui lui ont été promises par délibération de la dite communauté du 25 juillet de l’année 1722 du consulat d’André Arnoux et ce pour entretien de la citerne et fontaine de la porte de Sye annuellement … »( AM DD 3-33)
Les consuls de l’époque soucieux de ces situations n’auront de cesse de faire rétablir les fontaines et ce, en 70 ans, de 1687 à 1757, ils ont été confrontés à plusieurs reprises à la destruction des fontaines par les inondations de la Sye. En effet, l’implantation des sources alimentant le village se trouvait au nord-est, au quartier du Pontel. L’alimentation par conduites devait traverser la Sye, les exposant aux crues du ruisseau.
Les consuls Henry Vandelin et Louis Guérimant, avec l’autorisation du vi-châtelain d’Aouste Jean Faure convoquent tous les habitants à une assemblée générale le 2 novembre 1687 devant le château de Monseigneur l’Evêque de Die, avec proposition » que pour l’utilité du public de ce lieu et mesme pour empecher le désordre qui pouroit arriver a cause du feu il seroit necessaire de rétablir les fontenes qui estoient autre fois, dans les mesmes canaux... » (AM DD 3-32)
En 1660
Il existait aussi des sources environnantes dans le terroir depuis tous temps. Il est mentionné sur le parcellaire du XVIIe siècle de la commune que ces sources existent dans diverses parcelles: aux quartiers de Font Chatet, dans les fonds de la communauté; à Peymée, dans les fonds de Marguerite de Servignard veuve David et d’Antoine Bayle, à Combeplane, dans les fonds de Honoré André. Mais ces sources trop éloignées du bourg, à une lieue et demi (environ 5 km) ou de faible débit n’étaient pas exploitables.
Il existait bien deux petites sources dans la Sye, parfois appelées fontaines, que les habitants utilisaient. La mention en est portée dans une déclaration de 1660, adressée à la Chambre Souveraine du Dauphiné, établie par Honoré Jussy, vi-châtelain d’Aouste pour la liquidation des droits de francs fiefs : » … «Elle a droit de faire conduire dans le dit lieu, pour l’usage du public, deux petites sources qui naissant proche de la rivière de scie, l’une dans le fonds de Pierre Bonnardel et l’autre dans celui de Jean Monnestier, les deux coulant de la grosseur du pouce lorsqu’elles sont jointes, auquel état il n’est pas possible de les maintenir pourvu qu’il faut que les canaux des dites sources traversent celui du dit ruisseau de scie, dont la rapidité est si extraordinaire qu’elle anporte continuellement tout ce quoi y faut pour les conserver libres… ».. .(AM CC 53-108) et confirmée par une requête du consul Vandelin en 1687 » … Représentent à votre Grandeur que dans le dit lieu d’Aouste il y avait une fontaine pour le service du public, laquelle ne coule plus à cause de l’inondation des eaux qui ont rompu les canaux et conduits de celle-ci … » ( AM DD 3-54)
Fontaine de la Place en 1730
La première mention de la fontaine construite sur la place semble être de novembre 1729. Elle se trouvait bien devant l’église paroissiale Notre Dame, vers la Place de la Poste, face au café actuel.
En effet, le 4 janvier 1730, devant Reatier, notaire royal de Crest, en présence de François Achard, Louis Odon, Jean Bovet, Louis Achard, Archinard et le commis Cholet, François Achard, marchand d’Aouste, a réglé de ses propres deniers pour la communauté d’ Aouste à Etienne Moulin, maître-maçon d’Aouste, la somme de 420 livres et 17 sols pour la construction de la fontaine de la place. Suivant « le prix fait « , cette somme correspond aux travaux effectués, à couvrir et faire le canal de la fontaine, l’établissement, la conduite et la construction de la fontaine, la fourniture des bourneaux. L’eau de cette fontaine était amenée depuis » le creux du Pontel « , dans le fonds appartenant à Raymond Bertrand (changement de propriétaire depuis 1660) et jusqu’à la place publique par des bourneaux sur une distance de 150 canes environ 300 m). Un bassin en bois était construit place du Pont pour recevoir l’écoulement de la fontaine publique.
Dans cette somme sont inclus 130 journées d’homme à raison de 14 sols par jour, 14 sols pour chaque bourneau pour 150 toises, 125 livres de ciment à 9 sols la livre, 8 muids de chaux pour la bâtisse des bourneaux à raison de 2 livres 5 sols le muid, 5 livres pour le charroi du sable nécessaire, 11 livres 12 sols pour les pierres plates, 10 livres pour le bois nécessaire au bassin fait à la place du Pont, et, 89 journées à 25 sols chacune pour avoir fait lui-même les travaux de » perfection » de l’ouvrage.
Nous en avons la confirmation par une facture du maître-maçon Louis Granjon d’une somme de 66 livres 7 sols, en date du 14 mai 1787, il a fait «un conduit d’égout de la fontaine de la Place à celle du Pont et ce à raison de 3 livres 5 sols la toise….portant à vingt toises deux pieds et demi… » ce qui correspond à environ 40 mètres. (AM DD 3-54). Ainsi que plusieurs autres factures pour travaux des maçons Moulin, Granjon, Lanthelme…
La conduite de cette fontaine a été détruite par une crue de la Sye en 1744, et de plus, deux petites fontaines ou sources qui servaient aux habitants ont été ravagées, les privant d’eau.
Reconstruction de la fontaine en 1757
Les consuls d’Aouste n’ont eu de cesse de s’occuper du problème récurrent de l’eau. Outre les besoins domestiques d’une population conséquente du village, (1200 hab. en 1789), l’utilité publique, la lutte contre les incendies, l’établissement de trois foires par an à partir de 1755, en augmente les besoins. Ils sollicitent, suite à délibérations du 6 mars 1757, l’autorisation de l’Intendant du Dauphiné pour le rétablissement des anciennes fontaines : « …les anciennes conduites de la fontaine de ce lieu sont rompues, qu’il serait fort à propos de les rétablir, soit pour l’utilité publique, soit par rapport aux foires que la communauté a depuis peu établi et requiert qui y soit délibéré … Conclut unanimement, attendu la nécessité pressante d’avoir des fontaines et les moyens qu’a la communauté de pouvoir faire rétablir les fontaines qu’il est donné pouvoir au sieur consul de présenter requête à Monseigneur l’Intendant pour qu’il plaise à sa Grandeur d’homologuer la conclusion prise sur les offres du sieur Rapine, et se de permettre de dresser un devis estimatif pour le rétablissement et conduite des anciennes fontaines et passer le bail à prix fait pour la construction des nouveaux ouvrages à faire et y employer ensuite la somme affectée par les sieurs Rapine ou partie de celle-ci… » ( AM DD 3-34).
Suite à la délibération de l’assemblée générale du 6 mars 1757, assemblée autorisée par Jean Guirement, conseiller du Roi et maire perpétuel d’Aouste, le consul Antoine Forget en présence du secrétaire Jean Louis Attenor, propose de présenter une requête à Monseigneur l’Intendant du Dauphiné afin d’obtenir la permission de dresser un devis estimatif pour le rétablissement des anciennes fontaines, de la fontaine sur la place publique devant l’église paroissiale et de passer adjudication au rabais des ouvrages à faire. (AM DD 3-40)
Suivant l’article 10 du devis du 1er juin 1757, cette fontaine devait être adossée au mur de la maison de Vincent Lantheaume, mais par les modifications du devis en date du 11 juillet 1757, elle fut construite « …sur la place du lieu d’Aouste dans l’endroit le plus convenable un bassin de forme ovale bâti en pierre de molasse dure… ».
Le 13 mars 1751, une adjudication avait été passée avec David Rapine entrepreneur, pour la réfection du pont de Drôme détruit par une crue le 23 juin 1747. Il avait été reconnu que les deux culées initialement prévues dans le devis s’avéraient inutiles; les piles existantes étant reconnues assez solides. La somme de 1500 livres reprises, avec l’accord de l’entrepreneur, après décharge, seront employées pour le rétablissement des fontaines : » … Supplie humblement sieur Antoine Forget consul et député de la communauté d’Aouste. Les habitants de la communauté d’Aouste désiraient depuis longtemps d’avoir une fontaine sur la place de ce lieu comme il en avait eu autrefois. Quelques uns d’eux ayant observé que l’adjudicataire des …. « (AM DD 3-35)
Le 23 mars 1757, l’Intendant du Dauphiné De La Porte, homologue la délibération du 6 mars 1757 et autorise la communauté à faire dresser un devis estimatif. Le 9 avril 1757 le subdélégué de l’Intendant à Crest, Paul François René Lucrecius Sibeud, commet d’office deux experts de Crest – Louis Vaussenas, marchand et François Chapaix, bourgeois- avec possibilité de se faire assister par » quelqu’un au fait de la recherche des eaux » . En l’ occurrence, c’est Antoine Fournier d’ Aouste qui sera désigné. (AM DD 3-39)
Le devis estimatif (AM DD 3-44) comportant douze articles est établi par les deux experts et présenté le 1er juin 1757 au subdélégué de l’ Intendant à Crest, Paul François René Lucrecius Sibeud en présence du consul Antoine Forget. Il a été fait ensuite trois affiches certifiées par Jean Louis Attenor secrétaire de la communauté et publiées. Sur ces affiches étaient portées les indications: lieu et heure de l’adjudication, les jours du 26 juin, 3 juillet et 10 juillet et les clauses et conditions suivantes:
Devis dressé par Louis Vaussenas et François Chapaix experts désignés (AM DD 3-44)
1° – » Nous sommes sortis par la porte du lieu appelé Surville et pris le chemin du quartier au mas des champs où étant dans un certain endroit, nous sommes entrés dans un fond de terre appartenant à la cure du dit Aouste situé dans le coteau, nous sommes montés à travers le dit coteau jusqu’au fond de terre labourée qui appartenant à sieur Sibeud dans lequel coteau l’on nous a assuré qu’il y a plusieurs sources ce que le dit Fournier nous a confirmé, là ayant nous même vu couler une sur la face qui est assez abondante, nous estimons donc que pour pouvoir conduire cette source et toutes celles qui peuvent se rencontrer dans le dit coteau qui se trouve considérablement élevé au dessus du dit lieu d’Aouste ainsi que nous l’avons trouvé par la dévaluation du niveau, il faut faire une tranchée à travers les possessions ci-après détaillées, à commencer auprès du chemin des champs dans le fonds de la cure, de jean Claude Audra, de Mr Sibeud, de Mr Athenor, d’Antoine Bertrand, de sieur Jean Louis Achard du fils de Pierre, jusqu’à une autre terre appartenant au dit sieur Sibeud
2° – Il faut que cette tranchée soit à une profondeur considérable pour recueillir toutes les eaux qui transpireront dans le coteau en obtenant de donner à plein. Les talus nécessaires et proportionnés à leurs qualités, et de ne pas percer les bancs de glaise et de tuf qui doivent se trouver au fonds de la tranchée parce que l’eau se perdrait incontinent.
3° – A mesure que l’on trouvera des sources en faisant des tranchées pour faire perdre l’eau afin qu’elle incommode pas les travailleurs, cette opération étant faite, et toutes les sources trouvées on réglera la pente du fonds de la tranchée dans le milieu de laquelle on creusera dans la glaise ou dans le tuf une rigole de huit à neuf pouces (environ de 22 à 24 cm) de largeur pour cueillir toutes les eaux et dans le cas que la glaise ou le tuf manquassent on formera cette rigole avec de la terre glaise que l’on y transportera et que l’on aura attention de bien battre
4° – Des deux cotés de cette rigole on y construira un petit mur de pierres posées à sec d’un pied (32,5 cm) d’épaisseur sur dix huit pouces ( environ 49 cm) de hauteur(…) le long des berges, sur lesquels murs on posera des dalles ou pierres plates qui porteront au moins trois pouces (env 8 cm) sur les murs de chaque coté et c’est à travers les murs de pierres sèches que passeront les eaux pour s’introduire dans la conduite on posera ensuite sur les dalles des (gas…?) rainurés pour empêcher qu’en recomblant la fouille il ne tombe rien dans le fond.
5° – Lorsque cette conduite aura été faite dans tout le terrain où il transpirera de l’eau et que l’on aura suivi les alignements prescrits à l’entrepreneur, on continuera la conduite dans son aqueduc. La maçonnerie faite avec un mandrin de la même largeur que ci-dessus et seulement de six pouces (env 16 cm) de hauteur, bien couvert avec des dalles bouchées avec du bon mortier, cette conduite viendra aboutir dans le chemin des champs et l’ayant trouvé jusque près de l’oratoire qui est appuyé au fonds de sieur Chevalier de Riquemond, on y construira un puisard de trois pieds ( env 1 m) en carré qui appuyé à la souche du dit oratoire du coté du nord pour recevoir l’eau et les terres qu’elle pourra la drainer, on fera une décharge à ce puisard qui s’écoulera dans un aqueduc du coté de la rivière de Sye, pour le nettoyer au besoin, vers ce puisard on élèvera une bâtisse sur laquelle on fera une voûte, couverte de dalles et une petite porte bien plus courte pour le visiter à volonté.
6° – Nous bâtirons chaque toise de la dite conduite, y compris la fouille pourvu qu’elle ne soit qu’à la profondeur de quatre pieds (1,30 m), cinq livres, ce qui fait pour cent quatre vingt dix huit toises (env 386 m) que nous y avons trouvé 990 livres. Le puisard parfait avec son «regardoir» de décharge la somme de cent livres ici 100 livres.
7° – Depuis le dit puisard ou repos jusque sur la place du dit lieu d’Aouste la conduite sera faite en tuyaux de grès de deux pouces (env 5,4 cm) d’où certains au petit bout bien cuits et bien souvent de six à sept lignes (env 1,5 cm) d’épaisseur, lesquels on assemblera avec du bon ciment et on les posera en bonne maçonnerie obtenant de lisser les dits petits murs que l’on fera de coté de trois pouces au dessus de lui où vers lesquels nous mettrons des bonnes dalles pour garantir la conduite de l’effort des voitures, et on l’enterrera à une profondeur nécessaire pour la prévenir de la gelée.
8° – Cette conduite sera placée dans le chemin des champs tout le long des murs de clôture des possessions de Mrs Atenor, de Jean Pierre Achard, de Jean Pierre Atenor, d’Antoine Forget, du jardin de madame de La Motte, et là dans le milieu des rues du dit lieu jusqu’à la dite place. Cette conduite qui aura cent vingt toises (env 234 m) coûtera à raison de six livres la toise compris la fouille la somme de 720 livres.
9° – Dans l’intervalle des dites cent vingt toises de conduite en tuyaux de grès on y posera quatre regards en pierre de taille, l’un desquels sera au coin de la terrasse de la maison de madame de La Motte sur lequel on établira une ventouse ou soupirail pour donner du jeu aux vents qui peuvent s’introduire dans la conduite et qui la ferait infailliblement crever sans cette précaution. Cette partie estimée à vingt livres ici 20 livres
10° – Lorsqu’on sera parvenu sur la place du dit lieu au coin de la maison de Vincent Lantheaume on creusera dans le mur de la dite maison pour y poser un quartier de pierre de taille qui portera la tige de la fontaine laquelle tige sera aussi percé dans l’épaisseur du mur pour une plus grande solidité et toujours dans le même mur on posera encore à la hauteur convenable une pierre de taille carrelée qui recevra l’eau produite par la dite tige et la distribuer dans les tuyaux que l’on pourra donner à la dite fontaine, on fera sur cette pierre carrelée une petite voûte en décharge pour pouvoir y placer au dessous des tables pour couvrir la conduite de l’eau. Cette partie coûtera 30 livres.
11° – Au dessous des tuyaux de la dite fontaine on y posera un bassin carré fait avec des tables de pierre douce des carrières de Lambres ou d’ Autichamp. Le fond du dit bassin de même pierre, le tout bien assemblé avec des crampons de fer et bien cimenté en dedans et en dehors. Le bassin aura cinq pieds (env 1,63 m) de longueur et deux et demi (env 0,81 m) de hauteur sur lequel on posera deux barres de fer vis à vis de chaque tuyau pour supporter les baquets, et en dessous du dit bassin toujours le long du mur en tirant au midi on en construirait un second pour servir à laver les herbages et autres choses, fait avec des semblables pierres et avec les mêmes précautions qui aura trois pieds de longueur (env 0,97 m) sur autant de large. Cet article coûtera cent livres ici 100 livres.
12° – L’égout de la dite fontaine après que la dite communauté en aura fait l’usage qu’elle se propose sera conduit «souterrainement» sous le «chazal» (petite maison) qui est au levant de la maison de M Sibeud par une conduite ou «tournière» (fossé environnant) en maçonnerie dans un bassin aussi de maçonnerie pour la commodité des habitants du quartier du pont et du dit bassin à la rivière de Drôme. La dite conduite ou le dit bassin coûtera cinquante livres ici 50 livres.
Comme il peut se rencontrer par l’exécution du présent devis des choses qu’il faudra changer, augmenter ou diminuer, l’entrepreneur sera bien de les proposer aux officiers de la communauté pour y être avisé « ….
Le 11 juillet 1757, après quelques modifications intervenues dans le devis initial après accords des parties, le devis est accepté:
Modifications du devis initial (AM DD 3-43)
» Primo les entrepreneurs quels qu’ils soient seront tenus de payer les vacations des experts qui ont dressés le devis suivant la taxe qui en sera par nous faite, de même que tous les frais du présent bail.
2° – Au lieu de faire les murs indiqués en l’article 4 du dit devis entièrement en pierre sèche, ils construiront en maçonnerie tout ce qui sera en aval de la conduite du coté du levant dans toute l’étendue indiquée par le dit article dont au surplus ils exécuteront toutes les dispositions.
3° – En place du mandrinage indiqué en l’article 5 du même devis, ils emploieront des bourneaux dans la forme désignée en l’article 7 qu’ils placeront à la profondeur convenable dans toute l’étendue indiquée au dit article 5 et quand à la décharge du puisard, elle sera seulement faite dans la béalière servant à l’arrosage dans le quartier de Surville.
4° – Au lieu d’exécuter les dispositions de l’article 9 qui ne sont pas jugées nécessaires, on fera une décharge par une conduite en pierre sèche dans la rue de Mouiran (Moirans) pour l’écoulement de l’eau dans le canal du moulin.
5° – On n’exécutera point ce qui est porté par les articles 10 et 11 du dit devis et pour suppléer, on construira sur la place du lieu d’Aouste dans l’endroit le plus convenable un bassin de forme ovale bâti en pierre de molasse dure bien assemblée, et cimentée en dehors et en dedans avec crampons de fer, le dit bassin haut de deux pieds et demi (0,71 m) large de quatre (1,3 m) et long de six (1,95 m) accompagné des tuyaux et barres nécessaires au milieu duquel bassin il sera élevé un triomphe de pierre de taille de la hauteur et grosseur convenable pour une fontaine.
6° – Les entrepreneurs se chargeront généralement de toutes les fournitures en chaux, sable, pierre et journées d’ouvriers et autres matériaux quelconques et se soumettront à entretenir leurs ouvrages pendant six ans à compter du jour de réception pendant lequel temps ils seront tenus de réparer à leurs frais et dépens les accidents qui pourraient arriver à la fontaine, autres néanmoins que ceux qui proviendraient d’un dommage causé par quelque particulier.
7° – Si dans le courant des ouvrages à faire il arrive qu’il faille creuser à une profondeur plus grande que celle assignée par le devis, ou s’il survient quelques inconvénients extraordinaires ou imprévus, la communauté en tiendra compte aux dits entrepreneurs, à dire d’experts qui seront convenus, ou à ce défaut par nous commis d’office.
8° – Les entrepreneurs s’obligeront de rendre leurs ouvrages parfaits entre ici et la Toussaint prochaine à la charge qui leur sera payée, un tiers du prix de leur bail, d’avance, le second tiers à moitié d’ oeuvre, et le restant lorsque les ouvrages seront finis et par nous reçus, et au reste ils exécuteront tout ce qui est porté par le dit devis. «
Après lecture du devis et des conditions aux personnes présentes, il fut procédé aux » enchères à la chandelle » .Après plusieurs propositions, l’offre la plus avantageuse étant celle de Simon Lombard négociant de Vercheny qui a offert d’effectuer les travaux pour la somme de 2100 livres, le bail d’adjudication lui fut attribué et sera signé le 11 juillet 1757. Simon Lombard a présenté pour caution Paul Charles Gros de Saillans. (AM DD 3-43)
Le 13 juin 1757, une assemblée générale fut convoquée à laquelle les propriétaires des fonds traversés par la conduite d’eau assistèrent. Il s’agit de sept propriétaires: Jean André Brun, Jean Pierre Achard fils de Salomon, Venance Attenor, La cure, Jean Claude Audrat, Sibeud subdélégué de Monseigneur l’Intendant au département de Crest et Die et Antoine Bertrand. A savoir que certains de ces fonds supportent «un droit de conduite des eaux» dans les fonds d’ Attenor, André Bertrand, la cure et Sibeud pour le premier fonds. Les fonds de Achard et le deuxième fonds de Sibeud (près d’un colombier) ne supportent aucun droit de passage. Tous les propriétaires concernés nomment pour expert Jacques Vincent Bilhard à effet d’estimer les dommages qui seront faits; la communauté nommera pour sa part, Jean Pierre Barbeyer. Les passages seront balisés par Lapest. ( AM DD 3-38)
Les travaux commencèrent mi-juillet
Le 9 décembre 1757, le subdélégué fit procéder au rapport estimatif des dommages causés par la fontaine et ses travaux accessoires. De même, il requiert la prestation de serment de Barbeyer et Bilhard.
Le 15 décembre, Bilhard et Barbeyer, accompagnés de Jean Guiremand (Guirement) maire, Antoine Forget consul, Louis Granjon entrepreneur et de plusieurs propriétaires concernés, procèdent à l’estimation. Celle-ci se termine le 21 décembre.
L’estimation s’établit pour les mûriers suivant la quantité de feuilles produites à l’année, leur taille, âge et le capital représenté; pour la vigne, suivant la production annuelle de vin. Le montant de l’estimation des dommages s’élève à 237 livres 3 sols 10 deniers auxquels il faut rajouter 36 livres pour les vacations des experts, 4 livres pour les prestations de serment et 7 livres deux sols pour le papier et expédition, soit un total de 283 livres 5 sols 10 deniers. (AM DD 3-37)
Le 23 décembre 1757, le rapport d’estimation des dommages est présenté par les experts Bilhard et Barbeyer, au subdélégué de l’Intendant à Crest, Paul François René Lucrecius Sibeud en présence d’Antoine Forget, consul et Gailhardon, greffier.
Le 26 décembre 1757 dans la maison consulaire d’Aouste, Antoine Forget consul, présente une requête à l’Intendant du Dauphiné, De La porte afin qu’il homologue les délibérations du 6 mars 1757, permette l’emploi des 1500 livres au rétablissement des fontaines et ordonne de dresser un devis estimatif ainsi que l’imposition sur les trois ordres d’une somme de 1223 livres 5 sols 10 deniers. Cette dernière somme résulte du rapport des dommages estimés ( AM DD 3-36)
Le 2 décembre 1757 l’adjudicataire Simon Lombard avise le subdélégué Sibeud devant son «hôtel» à Aouste, que tous les ouvrages sont parfaits et achevés et que l’eau coule actuellement sur la place publique. Tout est construit conformément au bail. De plus, à la réquisition des officiers de la communauté et avec leur consentement, il a fait un pavage autour du bassin de la fontaine, a construit le bassin de l’égout de la fontaine en pierres de taille à la place de maçonnerie et a construit au dessus du bassin plusieurs toises de maçonnerie » pour empêcher que l’on ne tomba dans le chenal où ce bassin est situé « , aussi il a placé 4 pierres de » gritte » » (peut-être de grès?) de distance en distance le long de la conduite indiquant les reposoirs. Ce «supplément» revient à 70 livres: pavé (6 livres), 4 pierres (6 livres), bassin de l’égout prés du pont (40 livres), 2 toises -soit 4 m de murailles (18 livres).
Simon Lombard demande à faire procéder à la vérification des travaux par les experts François Dorille et Jacques Gailhard nommés par le subdélégué.
Les travaux étaient » bien et dûment faits et construits « , le subdélégué décharge Simon Lombard de toutes les obligations et ordonne de pourvoir au payement de ce qui est dû, tout en précisant qu’il est tenu par le bail: » Au moyen de qui nous dit le subdélégué donnons acte du dit rapport, déclarons les ouvrages auxquels le dit adjudicataire était tenu, bien et dûment faits et construits, comme tels les recevons et déchargeons le dit adjudicataire de toutes les obligations par lui contractées à raison de ceux-ci, et ordonnons qu’il sera incessamment pourvu au payement de ce qui lui reste dû à la forme de son bail et avant que de signer le dit adjudicataire nous a observé qu’il est tenu par son bail de maintenir la conduite et ouvrage des dites fontaines pendant six ans mais qu’il ne saurait remplir cette partie des conditions du dit bail si la communauté ne s’engage de faire arracher tous les arbres qui seront par lui indiqués le long de la conduite des dites fontaines étant indispensables que les canaux de briques servant à la conduite de l’eau n’éprouvent quelque dérangement par l’action et le progrès des racines desdits arbres, ce que les officiers de la dite communauté ayant entendu, ils ont promis au nom de cela de faire arracher tous les arbres indiqués par l’adjudicataire qui pourraient nuire à la conduite des dites fontaines sauf les dommages et intérêts des particuliers intéressés qui seront estimés conformément à la délibération tenue à cet égard, dont et de quoi nous avons encore donné acte pour servir et valoir ce que de raison… » (AM DD 3-42)
Afin d’augmenter le débit de la source découverte dans le fonds de Bertrand, Louis Granjon maître-maçon, à la demande des officiers de la communauté, fit creuser des sondages jusqu’à 4 pieds (1,30 m) sans succès, dans les fonds de Sibeud, Athenor, Achard et Bertrand aux endroits indiqués par Fournier. Il fut décidé d’abandonner les recherches après les sondages dans le fonds de Sibeud (prés de son colombier). Même si l’eau était présente, le dénivelé devenant trop important n’aurait pas permis de joindre la source initiale du fonds Bertrand. Ces travaux supplémentaires y compris le comblement des fossés entraînèrent une dépense de 343 livres. (AM DD 3-42)
L’intendant Pierre Jean François de La Porte ordonne le 24 avril 1759, l’exécution de l’arrêt du Conseil en date du 20 mars 1759: que les officiers de la communauté d’Aouste seront tenus d’imposer par un rôle particulier sur les fonds des trois ordres de la communauté un montant de 1223 livres 5 sols 6 deniers pour être payés dans l’année par les cotisés afin de régler le prix de l’adjudication pour le rétablissement des fontaines, à savoir 600 livres du reste de l’adjudication, 343 livres pour les fouilles supplémentaires effectuées par Simon Lombard, 237 livres 5 sols 6 deniers pour les indemnités et 43 livres 2 sols pour les vacations des experts et frais de prestations de serments. (AM DD 3-46)
En définitive le rétablissement des fontaines reviendra à la communauté 2723 livres 5 sols 6 deniers. Les 1500 livres reprises sur l’adjudication du pont et 1223 livres 5 sols 6 deniers de frais additionnels, au lieu de 2100 livres prévues initialement.
La conduite mesurera au final environ 610 mètres ( 318 toises).
La fontaine fut livrée le 2 décembre 1757 à la satisfaction des habitants.
Le 26 décembre 1757 à midi, dans la maison consulaire d’Aouste, le maire Jean Guiremend remercie le consul Antoine Forget pour » les soins et peines qu’il a pris jusqu’à présent pour la conduite des dites fontaines, que sa gestion est approuvée et qu’il est prié de se pourvoir au nom de la communauté par devant qui de droit pour obtenir la permission d’imposer sur les trois ordres….. ». ( AM DD 3-36).
Cette fontaine sera détruite, en 1862 lors de l’alignement du pont et de la rue de la gare avec la démolition de l’ancienne église.
Le 26 mai 1872, par délibération du conseil municipal, il est décidé l’établissement de fontaines publiques afin de distribuer l’eau dans les divers quartiers d’Aouste.
Cette recherche d’eau a toujours été un problème récurrent. En septembre 1793, la Société Populaire d’Aouste somme la municipalité de » se procurer un de ces hommes experts dans l’art de découvrir la source des fontaines » .
B – XIXe ET XXe SIÈCLES – DE 1875 à 1960
Par délibération du 26 mai 1872 le conseil municipal » … considérant que le village d’Aouste est alimenté par une seule fontaine dont le volume d’eau est tout à fait insuffisant pour les besoins de sa nombreuse population et que d’ailleurs cette eau ne conserve pas sa limpidité en temps de pluie… « , il est décidé que le montant du remboursement sera affecté à l’établissement de fontaines publiques dans le village et dans un premier temps aux fouilles nécessaires à la recherche des sources.
Le 16 août 1874, par acte de concession, une convention, autorisant les fouilles et travaux nécessaires, est signée avec les propriétaires messieurs Portier, Aguitton et Gresse. Ce dernier demande une indemnité de six cents francs.
Le traité de gré à gré est signé entre Sieur Thomas entrepreneur de maçonnerie et Edouard Athénor maire de la commune le 5 novembre 1874 pour un montant de huit mille cinquante six francs quarante quatre centimes. Il sera approuvé par le préfet le 14 avril 1875. Les fouilles se dérouleront sur les propriétés Gresse Pierre, Portier Ferdinand et Aguiton Jean Louis à 700 mètres au Nord-Est du village, quartier des Gauchoirs
En 1875, Mr Fraud, surveillant des travaux de fouilles, établit un rapport de » situation » pour la commune.
Plan de situation des conduites de fontaines en 1875 – coté nord.
La conduite des fontaines traversait la RD 93 au croisement avec la rue de la Croisière ( point K203) et franchissait la Drôme sous le tablier du pont, côté gauche, en amont, 200 mètres environ à partir de la RD 93 jusqu’à la maison de la Vve Blayn.
Plan de situation des conduites de fontaines en 1875 – village et coté sud.
Les sources de Puy Saint Pierre
Le captage se faisait vers Chabanas. De là partait une conduite jusqu’au réservoir du quartier Saint François avec de nombreux regards dont il reste quelques vestiges.
C – Des photos
D’après une note du 25/4/1921, dans AM MN7, on dénombrait sept bornes-fontaines dans le bourg.
Le regard à l’angle de la maison Lambert Gabriel fermait les bornes :
- 1 – Dorille Jules
- 2 – Place de la Cour
- 3 – Rue de l’ancien hôpital
- 4 – Rue des Boulards (partie ouest)
- 5 – Rue des Moirans anciennement Freychet
- 6 – Pont de Sye
- 7 – Maison Lambert bourrelier
Lors d’une séance du Conseil Municipal du 21 juillet 1943, une demande de subvention de 10 000 frs est sollicitée pour deux fontaines supplémentaires aux sorties est et ouest du village. Le 25 août 1943 , l’ingénieur des TPE adresse un rapport à la municipalité sur le refus de subvention de 10 000 francs pour la construction des deux bornes-fontaines supplémentaires faute de crédits et d’acier suite à la guerre.
A la vue du schéma ci-dessous il existait 14 bornes-fontaines en 1943, situées:
1 – Au Pont de Sye
2 – Rue du matelassier
3 – Rue des Droits de l’homme (supprimée)
4 – Angle des rues de Surville et du Facteur
5 – Place Charmoy
6 – Rue de l’hôpital
7 – Rue Tavan
8 – Rue de la Croix
9 – Rue Charles Chapoutat (supprimée)
10 – Place Gabriel Bonnard (supprimée)
11 – Place de la Synagogue (supprimée)
12 – Place de la Poste
13 – Avenue de la gare (supprimée)
14 –Avenue de la gare, face rue A. Chenu (borne d’incendie)
En raison du mauvais état du réseau et des travaux coûteux liés à un entretien indispensable, en 1946 , dans une lettre du 06 août, le maire attire l’attention du préfet : « l’alimentation actuelle de notre commune devient de plus en plus précaire: vétusté de l’installation, réparations importantes sur la conduite principale liée au trafic des convois américains lors de la libération, coupure d’eau la nuit en été par manque de débit détérioration des bornes fontaine l’hiver car non munies de dispositifs incongelables, … »
Le 6 septembre 1947, le maire adresse au préfet un courrier de relance expliquant la situation déplorable de l’eau potable dans la commune d’Aouste, s’étonnant que les projets des communes de Crest et Saillans soient satisfaits et non celui d’Aouste. Le dit projet ayant été élaboré en 1938-1939 par les Ponts et Chaussées et approuvé par le ministre le 23 juin 1941.
Dans la séance du Conseil Municipal du 15 juillet 1951, le projet d’adduction d’eau potable de 1938, arrêté à cause de la Seconde Guerre Mondiale, est approuvé et relancé.
Par délibération N°432 du 3 novembre 1951, le conseil municipal approuve le devis estimatif de l’Ingénieur en chef du Génie Rural pour les travaux d’adduction d’eau potable, d’un montant de 24 millions de francs.
Le 13 novembre 1951, le maire donne connaissance au Conseil municipal d’une lettre de Mr l’Ingénieur en chef du Génie Rural datée du 9 novembre 1951 dans laquelle il informe de l’attribution d’une subvention à hauteur de 48% , le reste restant à la charge de la commune. Les services de la préfecture approuvent le 30 avril 1952. Le financement est couvert par un prêt auprès de la banque du Crédit Agricole.
Le 15 décembre 1952, l’ingénieur en chef du Génie Rural (devenu entre-temps, les TPE ) établit un rapport reconnaissant la situation critique du réseau des fontaines.
Le 31 octobre 1953 par délibération N° 517 demande d’enquête pour le projet d’adduction d’eau potable.
Le 5 décembre 1953, le Conseil Municipal approuve la demande de financement d’un avant projet pour la première tranche d’adduction d’eau. Le montant du financement sollicité et accordé auprès du Crédit Agricole est de 8,1 millions de Francs.
Cette situation ne verra son aboutissement qu’en 1954.
Le 3 mars 1954 établissement d’un plan du tracé d’adduction d’eau (1° tranche) de la source Burrus au réservoir de Combeplane par l’ingénieur des TPE.
Suite décision ministérielle du 16 mars 1954, le préfet prend un arrêté d’ utilité publique en octobre 1954 pour la source Burrus. Suivant l’article 4 de cet arrêté, il est stipulé » le maire d’Aouste sur Sye agissant au nom de la commune à acquérir soit à l’amiable soit par voie d’expropriation … « . La » légende » veut que Mr Burrus ait réclamé en règlement » un panier de cerises « . La dépense est évaluée à 30 500 000 frs.
Le 16 mars 1955, le maire Gabriel Bonnard procède, au rabais et sur soumission cachetée, à l ‘adjudication du projet de l’adduction d’eau potable de la commune – 1ere tranche. Quatre soumissionnaires sont concernés. L’adjudication est faite au profit de la Sté Chapon de Bourg les Valence (26).
Le 10 novembre 1955, (délibération N° 611), le conseil municipal approuve le projet de la deuxième tranche d’adduction d’eau, présenté par Mr l’Ingénieur en chef des TPE. Une demande de financement est effectuée le 18 décembre 1955 pour un montant de 15 millions de francs. Ce financement aupès du Crédit Agricole est accordé.
Le 27 mai 1956, la demande d’autorisation de débuter les travaux de la deuxième tranche est approuvée (délibération N° 636).
Une demande de financement de la troisième tranche est approuvée par le conseil municipal, le 25 mai 1957, pour un montant de cinq millions.
Le 14 juillet 1957, achat de compteurs d’eau à la Société Vincent d’Hagueneau (67) pour équiper les usagers de la première tranche de travaux pour un montant de 211 414 francs.
Le 31 août 1957 approbation par le Conseil Municipal du projet de la troisième tranche d’adduction d’eau (délib. N° 663).
Le 20 juin 1959, un avenant au marché de gré à gré du 8 janvier 1957 avec l’entreprise Chapon est convenu, suite à un dépassement des coûts.
Un marché de gré à gré est passé le 27/2/1957 entre la commune et les Ets Chapon suite à la délibération du 5/1/1957 pour les travaux de la 2° tranche d’adduction d’eau potable, du réservoir de Combeplane au village (rues du Château, des Anges, du Moulin, de Surville, Moirans, de la Croisière, Rochefort et quartiers des Enfers et de Surville)
Travaux d’adduction d’eau potable en 1956
Ce réseau a été réaménagé en 1963 afin d’alimenter certains hauts quartiers Nord de la commune.
Le 24 juin 1966, la commune d’Aouste approuve les travaux de renforcement du réseau d’eau potable : captage de la source de l’Echelette, construction d’un nouveau réservoir, alimentation de certains écarts et des quartiers nord de la commune. Cet décision est approuvée par le sous-préfet de Die le 8 octobre 1966. L’évaluation des dépenses se monte à 1 100 000 frs ,somme couverte par une subvention du Ministère de l’Agriculture et par un emprunt. Les travaux s’effectueront en plusieurs tranches.
Le 16 juin 1967 (N°962), le conseil municipal approuve le projet d’exécution et d’extension du réseau d’eau potable. Cette décision sera approuvée par le sous-préfet de Die le 10 juillet 1967.
A la séance du 14 août 1968 le projet d’extension du réseau alimentation en eau potable pour un montant de 340 000 francs est adopté.
D – LE RÉSEAU D’EAU POTABLE ACTUEL
1 – ORIGINES DU RÉSEAU
Le 15 avril 1961, les communes de Piégros la Clastre et de Mirabel et Blacons sous la houlette de leurs maires respectifs: MM Rolland et Gourdol, décidaient d’unir leurs efforts et leurs finances pour réaliser un réseau d’adduction et de distribution d’eau potable sur les deux communes. C’était pour l’époque un projet gigantesque (mais largement subventionné) au regard de la taille de ces deux collectivités. Pour mener à bien cette réalisation, le syndicat intercommunal des eaux (SIE) Mirabel-Piégros était créé. Les principales sources alors utilisées, étaient celles des Chapeaux et de Brunel à Piégros et celle de Boudra (ancienne adduction de Crest) à Mirabel; ainsi que temporairement, le captage des fontaines de Crest sur la Gervanne au quartier du Pont de Romane à Blacons. Les années passant et les besoins grandissant, d’autres ressources en eau ont dû être envisagées et après plusieurs recherches infructueuses et un long et pénible épisode de notre histoire.
2 – Situation difficile pour plusieurs communes
Dés le début des années 80, l’alimentation en eau potable des communes de la basse vallée de la Gervanne et de la moyenne vallée de la Drôme, commence à poser de sérieux problèmes, notamment en raison de l’augmentation des besoins et des années de sécheresse précédentes. Le problème le plus aigu se situe au syndicat intercommunal des eaux (SIE) Mirabel-Piégros. La pénurie sera si sévère, qu’en novembre 1989, une autorisation de la DDASS sera donnée au prélèvement dans la nappe de la Drôme pour distribution aux usagers des deux communes, après traitement mais avec déclaration de non potabilité de l’eau. Tous les projets de nouvelles constructions seront suspendus durant trois années sur le territoire du SIE. Les autres communes ne sont pas à l’abri de la pénurie d’eau. Beaufort a déjà entrepris des recherches pour des ressources complémentaires; Montclar connaît des difficultés chaque été ; Suze s’inquiète de l’accroissement de la demande liée au développement des élevages; Aouste, dont une de ses sources, la Pialle, a dû être arrêtée pour cause de non conformité, a besoin de complément qu’elle trouve pour le moment sur Cobonne et Crest. Quant à la commune de Crest, si elle n’a pas de réel problème d’ alimentation, la dépendance d’une unique ressource qui n’est pas à l’abri d’une pollution, préoccupe le maire Max Tabardel comme elle avait préoccupé son prédécesseur, le Docteur Maurice Rozier. Le SIE lui, ne parvient pas malgré de nombreuses recherches et la ténacité des présidents successifs, à subvenir aux besoins sans cesse croissants de la population et du monde agricole; d’autant que les sources de Brunel et des Chapeaux sur Piégros sont fréquemment sujettes à pollution.
3 – Des solutions sont recherchées
Devant cette situation jugée alarmante par les élus de l’époque, ces derniers sous l’impulsion de la DDA et de son ingénieur Camille Labadens, décident de se réunir pour débattre du problème. Une première réunion a lieu à Aouste le 15 novembre 1983, sous la présidence des deux conseillers généraux, Jean Pierre Tabardel et Henri Eyraud. Tous les maires concernés assistent à cette réunion: Denis Jalat (Aouste), Max Tabardel (Crest), Jacques Ravel (Blacons), Etienne Audibert (Suze), René Granjon (Montclar), René Saussac (Beaufort), René Bergier (Piégros la Clastre) et en tant que Président du SIE.
Au cours de cette réunion est évoquée la possibilité de prélever de l’eau à la résurgence des Fontaigneux, en aval de Beaufort. Cette résurgence est étudiée depuis de nombreuses années et laisse à penser en la faisabilité d’un projet; d’autant qu’une réservation de 100 l/s avait été accordée aux communes et notamment à Crest, lors de l’installation de la pisciculture de Font Rome. Après les exposés de la DDA, il est alors unanimement décidé de créer un syndicat intercommunal qui aura pour compétence, l’étude de l’avant projet sommaire visant au renforcement durable des ressources en eau potable des communes concernées, à partir de la résurgence précitée. Les statuts du » syndicat mixte d’études des Fontaigneux» seront adoptés en 1984; Max Tabardel en assurera alors la première présidence (Jean Pierre Tabardel lui succédera en mars 1989) et le 20 mars 1985, un arrêté préfectoral officialisera pour 5 ans, son existence.
4 – Des Fontaigneux à Bourne
Par la suite, des travaux d’observations complémentaires sur les Fontaigneux démontrent que cette résurgence, bien que fiable en quantité, n’a pas toujours la qualité requise; contrairement à une autre résurgence, dite de «Bourne» située plus en amont, sous le village de Beaufort. Cette dernière qui semble provenir du même réseau karstique souterrain, obligerait cependant à compléter les connaissances existantes dudit réseau et à aplanir les difficultés liées à la proximité du village (contrainte du périmètre de protection) et notamment de sa station d’épuration. Le réseau principal serait toujours alimenté gravitairement jusqu’à Crest.
Après études, le captage aux Fontaigneux est abandonné au profit de celui de Bourne. La » guerre de l’ eau » est engagée, allant même, en novembre 1989, à une délibération du conseil municipal de Beaufort, s’opposant au captage de la Bourne.
5 – Nouvelles études, nouvelles contraintes et nouvelles décisions
La durée du syndicat d’étude des Fontaigneux étant arrivée à expiration, les élus décident alors de le transformer en syndicat de réalisation le 11 juin 1990, sous le nom qu’il porte encore aujourd’hui: » Drôme Gervanne « , dont la présidence sera confiée à Jacques Ravel. Pour chaque commune adhérente, il est prévu un débit maximum: Suze 2 l/s, Montclar 2 l/s, Aouste 7 l/s, SIE Mirabel- Piégros 9 l/s et Crest 80 l/s. La commune de Beaufort n’a pas souhaité adhérer au syndicat, mais de n’être qu’une commune associée.
Le captage direct sous Beaufort n’étant plus envisageable, une étude pour un forage en amont est lancée. Elle conduit en novembre 1990, à une intervention du plongeur Francis Le Guen (avec son équipe «Planète Bleue») dans le réseau souterrain avec tentative de repérage en surface, prés de la route de Gigors. Si côté plongeur, cela semblait sérieux, le repérage par un géophysicien allemand, avait tout du bricolage. Cette opération ratée a quand même coûté au syndicat plus de 100 000 francs de l’époque. Devant cet échec et le coût exorbitant demandé (580 000 francs) pour d’autres recherches plus «sérieuses», le président demande si le conseil municipal de Beaufort ne pourrait pas revoir sa position ; demande que le maire, René Saussac, s’engage à proposer à son assemblée la remise en état des égouts et de la station d’épuration par le syndicat. Ce dernier s’engagerait alors à dédommager la collectivité de toutes contraintes émanant du captage, notamment la prise en charge des capots sécurisés des puits situés dans le périmètre de protection; conditions dont le syndicat accepte le principe dans sa séance du 17 janvier 1991. De plus, le syndicat donne son accord financier pour la construction d’une conduite d’alimentation d’eau potable jusqu’au réservoir de Beaufort afin d’amener les 5 l/s consentis en droit à la commune (débit à prendre sur ceux des autres collectivités). Ces mesures compensatoires s’élèveront au total à 3 774 840 francs, et le syndicat en assumera financièrement la part communale (1 800 000 f).
Quant aux riverains et utilisateurs de l’eau de la Gervanne, le syndicat les rassure par un engagement à ne prélever en période d’étiage ( sauf accident sur la ressource de Crest), qu’un débit de 20 l/s maximum au lieu de 100 l/s de droit. Le conseil municipal de Beaufort, par délibération du 23 janvier 1991, lève son opposition au projet et une nouvelle enquête publique réalisée en juillet de la même année, permettra le feu vert à la réalisation du captage de Bourne. Le premier coup de pelle est donné en janvier 1992; soit plus de huit ans après la première réunion fédératrice d’ Aouste.
Les travaux sont réalisés en plusieurs tranches dont la première, jugée la plus urgente, consiste en l’alimentation du SIE; ce qui est fait en septembre 1992 et l’eau de Drôme Gervanne coulera aux robinets clastrois et blaconnais, en mars 1993. Les trois autres tranches se poursuivront l’année suivante pour se terminer fin 1993 par l’alimentation de Beaufort.
Pour mémoire, un avant-projet sommaire présenté par le syndicat Drôme Gervanne pour le renforcement du réseau Alimentation Eau Potable des communes de la moyenne vallée de la Drôme, a été établi par Monsieur L. Branchon, ingénieur expert le 15 juin 1991.
6 – Le réseau et ses ouvrages
Pour l’essentiel, le réseau actuel de Drôme Gervanne d’une longueur totale d’environ 16,750 km, se compose ainsi :
1°) une conduite de 150 m de long en diamètre 400 mm pour le captage par siphon en galerie immergée dans la résurgence de «Bourne»; conduite en fonte qui a remplacé la conduite initiale en PVC soudé, endommagée à la suite de plusieurs crues de la Bourne.
2°) un local abritant une pompe à vide destinée à l’amorçage du siphon et à son maintien en service.
3°) une conduite fonte de 2,750 km de long en diamètre 400 mm reliant la sortie du captage à la station de traitement de Chantemerle à Suze. Une autre conduite fonte en diamètre 350 mm lui succède jusqu’à Aouste, sur une longueur de 10,200 km; puis en diamètre 300 mm de 3,800 km de long, entre Aouste et Crest ( la conduite fonte de 100 mm, reliant le réservoir de Chantemerle à Beaufort a été rétrocédée à cette commune).
4°) un réservoir de 500 m³ au quartier de Chantemerle; réservoir auquel sont adjoints une station de traitement au bioxyde de chlore et un poste de relevage pour les dessertes de Beaufort, Montclar et Suze.
5°) divers ouvrages et installations (vidanges, poteaux incendie, conduites et raccordements aux différents réseaux des communes desservies, appareils de comptage, stabilisateurs de pression, etc.)
La réalisation de ce réseau d’adduction d’eau potable, dont seules les collectivités sont clientes, a pu être menée à bien grâce à une solidarité intercommunale. Sans l’apport financier indispensable de Crest, l’accord de Beaufort et la participation des «petites» communes qui ont permis que ce projet soit éligible aux subventions européennes (4,2 millions de francs) par le biais des » Programmes Intégrés Méditerranéens « , ledit projet n’aurait jamais pu voir le jour. Sans entrer dans les détails, le coût de cette réalisation a été de 24,3 millions de francs HT ( prés de 3,7 millions d’ euros d’ aujourd’hui). Le subventionnement alors obtenu (Europe, Etat, Département et Agence de Bassin) a été d’environ 60%; le reste étant couvert par différents emprunts, dont certains sont toujours en cours de remboursement.
7 – Le syndicat Drôme Gervanne – années 1990
Composé des six communes, dont trois (Mirabel, Piégros et Aouste) ont une gestion intercommunale de distribution de l’ eau au sein du SMPA ( successeur du SIE), le syndicat Drôme Gervanne est administré par une assemblée de douze membres (deux par commune comme prévu statuairement. Depuis la mise en service, la commune de Crest consomme peu d’eau du réseau syndical auquel elle a droit. La consommation crestoise ferait pourtant baisser grandement le prix du m³ d’eau vendu par Drôme Gervanne (0,240 euros en 1991) ; diminution qui aurait une incidence sensible sur la facture des abonnés et qui justifierait pleinement les investissements faits par les collectivités et notamment par la commune de Crest. Gageons que cette situation pour le moins anormale pourrait s’améliorer avec la fin prochaine du contrat d’affermage qui lie la ville de Crest à la SDEI.
L’assemblée est aujourd’hui présidée par Madame Maryline Manen ( qui a succédé à Monsieur Jacques Ravel)
1° Vice Président, Monsieur Jean Charles Roche (Crest)
2° Vice Président, Monsieur Denis Benoit ( Aouste)
3° Vice Président, Monsieur Serge Krier ( Suze)
Le budget de fonctionnement du syndicat (pour 2014) est de 211 231 €, quant à l’investissement, il varie en fonction des réalisations prévues; pour la même année, 123 898 € ont été inscrits à cette section budgétaire. Quant au volume d’eau distribuée aux collectivités (dont la vente est la principale ressource pour le fonctionnement du syndicat), il a été en 2013 de 433 116 m³, répartis comme suit (entre parenthèses, les droits en m³/an pour chaque commune): Suze 1 939 m³ (59 918); Montclar 3 287 m³ (59 918); Syndicat Mirabel-Piégros-Aouste (SMPA) 408 399 m³ (479 347); Crest 16 023 m³ (2 396 736). A ces volumes s’ajoute celui distribué à Beaufort, commune associée du syndicat : 3 468 m³ (157 680). Au regard de ces chiffres, on voit bien l’importante sous consommation des communes – exception faite de celles du SMPA – par rapport à leurs droits. A ce jour, ces prélèvements n’ont eu aucune incidence sur le réseau hydraulique de la Gervanne et ne représentent qu’environ 14% de ceux autorisés.
8 – De l’eau pour tous et de qualité
» En juillet 2004, le Département a relancé une étude laissée en sommeil depuis 1998; étude consistant à définir la capacité des réserves d’ eau hypothétiquement existantes dans le réseau karstique de Bourne, en vue d’une réalimentation… de la Drôme » (Le Crestois 16 mai 2014). Pour ce faire, des pompages continus importants ont été réalisés prés des Fontaigneux, sans résultats probants. Cette étude a soulevé de nouvelles inquiétudes dans la vallée. Pour sa part, le syndicat a alerté les instances départementales et préfectorales, sur ses craintes liées au risque de déséquilibre hydraulique du réseau souterrain et à la mise en péril de l’approvisionnement de Drôme Gervanne. Invoquant le principe de précaution, ce projet a été abandonné en juin 2006 ; mais il convient de rester vigilants afin que certains, en jouant aux apprentis so(u)rciers, ne défassent ce que d’autres ont eu tant de peine à réaliser.
E – DU SYNDICAT INTERCOMMUNAL DE L’EAU AU SMPAS
Jusqu’en juillet 1999, la commune d’Aouste sur Sye a géré elle-même son réseau d’eau potable et facturé les consommations aux abonnés. Le 15 juillet 1999, elle a demandé à adhérer au Syndicat des eaux de Mirabel-Piégros. C’est en 2001, alors qu’ Aouste a rejoint le SIE, qu’a été crée le SMPA. Bien entendu, compte tenu de l’arrivée de cette commune, les effectifs techniques et administratifs ont été revu à la hausse. La présidence est assurée par Madame Maryline Manen (maire de Mirabel et Blacons à cette époque).
Depuis le 1er janvier 2020, après accord des collectivités concernées, la commune de Saillans a rejoint le SMPA pour la gestion de ses réseaux d’eau potable et d’eaux usées; son service SPANC (assainissement autonome) restant assuré par le SIGMA (Syndicat Intercommunal pour la Gestion Mutualisée de l’Assainissement). A compter de cette date et par arrêté du Préfet de la Drôme, le SMPA est devenu le SMPAS : Syndicat Mirabel-Piégros-Aouste-Saillans.
Au 1er janvier 2023, la commune de Montclar rejoint le syndicat qui est devenu par arrêté préfectoral du 14 octobre 2022, un syndicat à la carte : le « SMPAS – Syndicat intercommunal des eaux »
Selon ses sources, pour son secteur « eau potable », le SMPAS c’est aujourd’hui 217,500 km de canalisations principales et branchements, 14 réservoirs de différentes capacités, 6 stations de pompage, 82 poteaux d’incendie (à compétence communale) et une multitude de petits ouvrages (réducteurs de pression, stabilisateurs, brise charges, ventouses, etc.). En 2022, ces installations lui ont permis de distribuer quelques 386 914 m3 d’eau potable à 3 581 abonnés (si on inclue les donnée de Montclar). Depuis 2017, d’importantes économies d’eau ont été réalisées, notamment grâce à des recherches et réparations de fuites, ainsi qu’à une sectorisation généralisée qui permet une meilleure gestion du réseau. Aujourd’hui, le rendement du réseau (qui peut varier en fonction d’éléments ponctuels) atteint les 71 %.
F – ALERTE SECHERESSE
C’est le Syndicat mixte de la Rivière Drôme qui décrypte la situation et propose des pistes d’action pour limiter les dégâts. C’est ainsi que l’alerte sécheresse a été renforcée au niveau 3 et 4, courant août et septembre en 2016. Ces alertes prévues par l’arrêté cadre de 2012, sont déclenchées par Monsieur le Préfet, en concertation avec les différents acteurs de l’eau: Météo France, le secteur agricole, le gestionnaire de l’ eau potable, les associations de protection de la nature, les services de l’état et les élus. A noter que le 16 août 2016, les débits à Crest et Saillans étaient inférieurs à 2 m³/sec et 1 m³/sec à Livron.
Alors que les épisodes de sécheresse s’intensifient, il convient de s’adapter dès aujourd’hui et changer nos habitudes pour mieux préserver cette ressource. Des mesures sont à mettre en place pour mieux gérer l’eau : organiser la sobriété de son usage pour tous les acteurs, optimiser la disponibilité de la ressource, préserver sa qualité et restaurer des écosystèmes sains et fonctionnels, mettre en place les moyens d’atteindre ces ambitions, être en capacité de mieux répondre aux crises de sécheresse et aussi tenir ses engagements tenus.
La demande d’eau sans cesse croissante est toujours d’actualité et un des casse-têtes des édiles.
G – LES EAUX MINÉRALES
Plusieurs sources d’eau minérale sourdent du sol aoustois , seulement deux sont répertoriées sur la commune d’Aouste mais quelque peu oubliées. Ces deux sources étaient déjà mentionnées en 1698 par Etienne-Jean Bouchu, intendant du Dauphiné de 1686 à 1705, dans son « Mémoire de la généralité de Dauphiné ».
La source « Faure »
En 1895, M. le Ministre de l’Intérieur transmet à Académie nationale de médecine une demande formée par M. Joubert pour obtenir l’autorisation d’exploiter la Source « Faure » (appellation commerciale); à Aouste (Drôme). Cette source surgit d’une fissure du calcaire néocomien inférieur, à 3 mètres de l’axe du ruisseau de la Sye, affluent de la Drôme. Le débit atteint 1,440 litres; la température est voisine de 13° C.
Les contrôles analytiques du Laboratoire de l’Académie laboratoire et celui de la Société des Agriculteurs de France ont montré que la composition subissait de légères variations saisonnières. Le pétitionnaire ayant pris l’engagement de ne faire subir à l’eau aucune des manipulations (décantage, gazéification, etc.) qui peuvent en altérer la composition, la Commission déclare que dans les conditions de captage telles qu’elles résultent des déclarations du service des Mines et la composition actuelle de l’eau permet d’accorder l’autorisation sollicitée.
Les conclusions du présent rapport, mises aux voix, sont adoptées lors de la séance du 30 avril 1895
La source des Pins
Une deuxième source reçoit une autorisation d’exploitation sur le territoire d’Aouste.
En 1902, M. le Président du Conseil, Ministre de l’Intérieur et des Cultes, transmet la demande en autorisation de M. Eugène Rivoire, pour la source « des Pins », à Aouste (Drôme).
La source « des Pins », a été isolée au moyen d’une tranchée creusée sur les escarpements de la rive du torrent de Millassole, au voisinage de la source Faure, autorisée en 1895. Le terrain est constitué par des assises néocomiennes formées de bancs alternés de marnes noires et de calcaires blancs.
Le débit de la source atteint 4.000 litres ; la température de l’eau est de 8°5.
Le contrôle analytique du laboratoire de l’Académie, effectué sur deux prélèvements, a donné des résultats concordants.
La Commission propose à l’Académie de déclarer que les conditions actuelles de captage et de minéralisation permettent d’accorder l’autorisation sollicitée.
Les conclusions du présent rapport, mises aux voix, sont adoptées lors de la séance du 14 octobre 1902.
Il est aussi à noter que d’autres sources et puits privés fournissent à divers endroits de la commune une eau ferrugineuse.
Certaines sources, certaines fontaines sont dites guérisseuses. L’eau qui les alimente est «réputée» miraculeuse. De mauvaises langues précisent toutefois que le café, qui n’est jamais très éloigné de la fontaine, possède aussi quelques vertus curatives!
H – LES BAINS-DOUCHES
Le centre du village était dépourvu d’installations sanitaires et les habitants n’avaient pas la commodité de placer des appareils sanitaires à domicile à cause d’une distribution d’eau limitée. Aouste était un centre industriel ( papeteries, usine à chaux, tissages, etc.) et la population laborieuse se trouvait privée d’hygiène, la commune envisagea la construction de bains-douches.
Ce projet est élaboré en 1938. La construction d’un bains-douches sera adossé au mur, à l’arrière du bâtiment de la salle municipale.
Le 15 janvier 1938 un devis estimatif est établi par Ch. Arnaud architecte à Crest pour un montant de 145 300 francs. (Archives municipales MN 10). Cet édifice comporterait cinq cabines de douches individuelles, une cabine de bains ainsi qu’un WC avec fosse septique de 250 litres aménagée en sous-sol. Un réservoir à réchauffeur de 750 litres assurera une température constante à l’eau chaude d’alimentation. La Deuxième Guerre Mondiale mettra fin à ce projet de construction.
I – LES WC PUBLICS
La promenade n’était pas encore dotée de « lieux d’aisance ». C’est sous ce lieu ombragé que se tenait la fête annuelle, le jeu de boules, la proximité du groupe scolaire et de la mairie et la future construction de la salle des fêtes nécessitaient la construction de cet édicule.
La promenade n’était pas encore dotée de « lieux d’aisance ». C’est sous ce lieu ombragé que se tenait la fête annuelle, le jeu de boules, la proximité du groupe scolaire et de la mairie et la future construction de la salle des fêtes nécessitaient la construction de cet édicule.
Ce WC, installé rive gauche de la Drôme, à côté de la salle des fêtes, comportera deux cabines avec sièges à la turque et un urinoir à quatre places ainsi qu’un réservoir de chasse automatique assurant un nettoyage permanent. Il sera pourvu d’une fosse septique de 7590 litres avec évacuation vers la Drôme ! Ce WC assurera son service bon an mal an jusque dans les années 80, années qui verront son remplacement par un édifice plus fonctionnel à une centaine de mètres en amont toujours rive gauche.
Le 5 novembre 1908 par délibération du conseil municipal est accepté la création d’un WC public sur la rive droite de la Drôme, près du pont. Après consultation des propriétaires voisins, le 12/12/1908, ceux-ci acceptent la construction. Mr Peysson architecte établit un plan et projet pour un coût de 570 frs . Le préfet donne son accord le 2/02/1909. Les travaux sont exécutés à partir du 23/01/1910 par Alexandre Sibourg entrepreneur de maçonnerie. Cet édicule sera démoli dans les années 2000.
CHAPITRE III
RIVIÈRES ET RUISSEAUX
A – LA DROME
Ausone, homme de lettres gallo-romain lui avait donné au IVe siècle le nom de Druna. Son nom évolue au fil du temps : Droma Jinmen (en 928 – Cartulaire de Cluny, 367) ; La ribeira de Droma ( au XIII° siècle – Censier de l’évêché de Die) ; Aqua Drome (en 1442 – Choix de document, 267) ; Droume (en 1575 et 1579 – Mémoires des frères Gay).
Cette section suivante sur la Drôme est reproduite avec l’aimable autorisation de Mme Anne Riviere-Honneger. De même voir aussi la page » Un torrent, la Drôme «
Quand on parle de l’eau, comment ne pas évoquer ce qui fait la fierté de notre village, la richesse de notre vallée, cette rivière qui a donné son nom à notre département: la Drôme. Elle prend sa source à la Bâtie des Fonds ( Diois) et se jette dans le Rhône sur les communes de Loriol et Livron. Et qui peut en parler le mieux? Anne Rivière-Honneger, Christine Labeur, Sabine Girard et Paul Allard, auteurs et animateurs d’ un colloque » Fleuves et Territoires » à Macon les 13 et 14 Septembre 2012. Le thème: La Drôme, un exemple de lieux multiples entre cours d’ eau et territoire et de leur évolution du début du XIXe siècle à aujourd’hui. Comme nous, ce texte aura le mérite de mieux vous faire connaître et apprécier notre environnement immédiat.
Introduction
A l’instar des fleuves, leurs affluents apparaissent comme une ressource essentielle, générant de multiples usages, métiers et techniques. Les liens entre les cours d’eaux et leur territoires sont nombreux d’hier à aujourd’hui et s’inscrivent dans des usages évolutifs et parfois concurrents ( Ardiller-Cassas, 1997, Micoud, 2000, Rossiaud, 2007, Allard et al, 2010 ). Il en est ainsi de la Vallée de la Drôme, affluent du Rhône, qui constitue une entité géographique d’environ 1 640 km² comprenant une centaine de communes ( 49 452 habitants, Recensement général de la population ( RGP 2009 ) autour de la rivière qui, s’écoulant sur 106,5 kilomètres, s’affirme comme son artère principale (fig 1). Rivière torrentielle typique des piémonts sub-méditerranéens (Landon et Piegay, 1999), la rivière Drôme possède un «régime hydrologique de type préalpin à tendance sub-méditerranéenne», caractérisé par d’importantes crues automnales et printanières et de fortes variations de débits. Son module est de 18,6m³/s, son coefficient d’écoulement de 55% et son coefficient de torrentialité de 20% ( Landon, 1999). La rivière est caractérisée par une configuration en tresses. Depuis l’antiquité, la rivière a apporté à ses riverains des possibilités économiques diverses qui ont permis le développement de petites villes et de villages. La Drôme constituait une voie de communication entre les habitants de la vallée et le couloir rhodanien, reliant l’ arrière-pays, le Vercors et le Trièves, à l’axe majeur constitué par le Rhône. Les habitants, jusqu’au XIXe siècle, avaient de multiples usages de cette ressource naturelle. La proximité de le rivière n’était pas perçue comme une source de catastrophes mais comme une richesse à exploiter. De grands aménagements permirent, à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle d’ accroître les terres cultivées. La maladie du ver à soie, suivie de la concurrence chinoise, la déforestation et un mouvement plus général d’exode rural freinèrent après 1860 le développement économique de la vallée de la Drôme. La population des villes et des villages décline ou stagne jusqu’aux années 1960. Suite à la déprise agricole et à la désertification rurale, les collectivités locales ont recherché, à partir des années 1960, un autre moteur de développement économique autour de nouveaux modèles d’agriculture et des activités récréatives et touristiques.
A partir d’une étude diachronique et multiscalaire, sont recherchés des éléments de connaissance et de compréhension sur l’ articulation des processus et des dynamiques de développement des territoires et de gestion de la vallée. La recherche s’attache à montrer les différents usages, savoirs et métiers liés à la présence de la rivière, à la dynamique naturelle du bassin, aux pratiques des riverains, aux politiques publiques du début du XIXe siècle à aujourd’hui. Les usages d’ autrefois ont modelé la vallée. On constate aujourd’hui une moindre acuité du lien organique qui liait la rivière à l’axe rhodanien. Nous nous interrogerons sur les facteurs explicatifs d’une telle évolution en faisant l’hypothèse de l’ importance de l’évolution des activités marquée par la perte de certains usages ( flottage, soierie, moulinage…) et l’ apparition d’ autres. Le glissement opéré vers une protection des milieux aquatiques consacré par l’application de la Directive Cadre Européenne sur l’eau a une incidence certaine. Ainsi, à la crise latente à caractère économique qui a duré près d’un siècle, succède une reprise depuis les années 1960 appuyée sur la législation, l’agriculture se spécialise, une économie de loisirs se met en place avec des nouveaux usages de la rivière et la mise en valeur du patrimoine.
La recherche menée par une équipe pluridisciplinaire (historien, sociologue, géographes) s’appuie sur un corpus constitué par des documents d’archives, des rapports de projets de la gestion de l’eau (contrats de rivières et schéma d’aménagement et de gestion des eaux), du dépouillement de la presse locale et de cinquante entretiens d’usagers et de gestionnaires de l’eau conduits en 2009-2010 (Girard, 2012).
Nous allons dans un premier temps nous intéresser aux usages passés de la rivière Drôme. Nous verrons ensuite les usages actuels et mesurerons ainsi les évolutions et leurs incidences dans les relations entre le développement de la vallée et la gestion de la rivière.
I. Usages passés
Les riverains tiraient un grand profit de la Drôme et de ses affluents, même si les catastrophes apportaient régulièrement leurs lots de désolation. Les habitants de la vallée dépendaient en grande partie des usages liés à la rivière, qu’ils habitent le long du cours d’eau ou qu’ils résident dans les villages et les hameaux de montagne, la Drôme constituait une interface entre ses riverains et la vallée rhodanienne.
La Drôme était flottable, depuis le Bez, un kilomètre au-dessus de Die. Elle servait au flottage des bois de sapin et de hêtre pour la charpente et le charronnage. Le bûcheronnage était intense et les exportations représentaient une richesse pour les habitants des villages perchés. Il existait une relation forte entre la forêt drômoise et la rivière. Les troncs étaient assemblés pour former des radeaux, eux-mêmes chargés de poutres ou de planches. Des «radeliers» les guidaient avec un gouvernail et de longues perches. Les lieux dits «les Plots» sont souvent d’ anciennes stations de radeaux. Les endiguements de Crest facilitaient le flottage. Les bois de construction étaient prisés à Beaucaire et à Toulon. Cette possibilité de transport du bois a d’ailleurs contribué à la surexploitation des forêts drômoises dont se plaignaient le préfet et les chroniqueurs dans la première moitié du XIXe siècle ( Delacroix, 1835). L’épuisement des ressources des forêts de l’ Etat et des forêts communales, notamment au moment de la Révolution, puis la loi sur la reforestation de 1860, ont fortement ralenti l’ exploitation des forêts.
Les autres usages importants étaient l’irrigation, le moulinage de la soie et la meunerie. La soierie a été durant une grande partie du XVIIIe et une partie du XIXe siècle une activité industrielle importante qui occupait plusieurs centaines de personnes, notamment à Saillans et à Crest. Le climat de la région est à la frontière entre celui des Alpes, humide, et celui de la Provence plus sec. Pour pallier les effets de la sécheresse estivale, l’irrigation est pratiquée depuis des siècles pour les cultures proches de la rivière et de ses affluents. En 1860, on dénombrait 98 canaux dans le département dont 39 sur la rivière Drôme. Ces canaux avaient souvent plusieurs fonctions: ils alimentaient des moulins et servaient à l’irrigation. L’existence de ces canaux est attestée dans de nombreux textes et ouvrages. A Crest, le canal du Moulin qui traverse la ville fut construit en 1392. Sur la commune de Saillans, Michel Eymieu, riche bourgeois de Saillans, fit creuser un canal pour son usine de déchets de soie sur la rive droite afin d’exploiter son brevet de peignage de la soie, déposé en 1820. Plusieurs centaines d’ouvriers et d’ ouvrières travaillaient dans ses ateliers. Le canal d’arrosage des Chapelains irriguait toute la plaine entre Saillans et Mirabel. Le canal de Souvion – La Clastre est l’un des plus connus. Il va de Saillans à Aouste sur Sye sur la rive gauche de la Drôme. Il fut l’ œuvre d’un notable local, Balthazar Souvion, qui obtint en 1815 l’autorisation de capter les eaux pour alimenter ses moulins de farine de Gourdon. La biographie de Balthazar Souvion est intéressante: c’ était un protestant aisé, physiocrate, qui voulait développer l’irrigation sur les deux rives de la Drôme et qui plantait vignes et mûriers sur ses propriétés. Généreux, Balthazar Souvion proposa aux riverains de Saillans, de Saint Sauveur, d’ Aubenasson, de la Clastre et de Piégros regroupés en association en 1820 et 1823 de profiter d’une prise d’eau qui lui appartenait sur la rive gauche de la Drôme. Il proposa également de prolonger le canal jusqu’à Aouste sur Sye et de construire un moulin à La Clastre. Le préfet entérina le projet en mars 1829. Souvion était assisté d’un négociant de Saillans et du » receveur à cheval des impôts directs « . Les syndics représentaient 137 propriétaires. Souvion devait toucher 20 000 francs du syndicat aval et 42 000 francs du syndicat de Piégros. Le canal fut creusé en 1830, il prenait sa source au quartier de la Tuilière à Saillans. Long de 12 kilomètres, il fallut réaliser de nombreux ponts et aqueducs. Souvion fit construire un moulin à farine et un autre à noix à La Clastre. La famille Rey fit construire dans les années 1880 un moulinage qui employait une vingtaine d’ouvrières. Le canal fonctionna de manière active de 1830 à 1939.
Pour Delacroix, les habitants de la Drôme ont développé une véritable culture de l’irrigation par canaux. L’usage des canaux remontait donc loin dans le temps et le XIXe siècle fut l’aboutissement de pratiques séculaires et l’apogée, en quelque sorte, de ces usages avant l’utilisation d’autres forces motrices notamment électrique. L’industrie de la soie, quant à elle, ne cessa de décliner, notamment après l’ouverture du canal de Suez en 1869 et la concurrence chinoise.(et épizooties telles que la muscardine, la pébrine, la flacherie et la grasserie.)
Pour exploiter et entretenir ces canaux, une gestion collective était nécessaire, des associations syndicales étaient présentes partout. L’eau était souvent répartie entre l’irrigation et comme force motrice des moulins. En amont des moulins, les propriétaires ne pouvaient arroser que 48 heures par semaine pour permettre leur fonctionnement régulier. Les deux activités donnaient toute leur importance aux canaux et permettaient de financer leur construction et leur entretien. Le partage des eaux était complexe entre les besoins des moulins et les demandes des riverains d’utiliser l’eau pour l’ arrosage, les arbitrages recensés dans les archives montrent que les conflits d’intérêts étaient nombreux entre les riverains, le seigneur, le meunier et parfois les autorités ecclésiastiques.
La Drôme demeurait cependant une rivière dont le régime rendait l’exploitation difficile, et souvent les eaux étaient prises sur les affluents. Ainsi à Montclar, le canal de la Gervanne fut creusé en 1340. Sur la carte de Cassini, en 1750, la Gervanne alimentait 7 moulins. A Chatillon, situé à 7 kilomètres de la Drôme ce sont les eaux du Bez qui alimentaient un canal depuis le XIV e siècle.
Paradoxalement, le Rhône, en dehors du canal de Pierrelatte, était moins utilisé pour l’ arrosage et le canal latéral, longtemps en projet et réclamé par les riverains, ne fut jamais construit.
La Drôme servait également de gravière. L’extraction des graviers est historiquement liée aux pratiques de protection des terres et des habitations contre les débordements de la rivière.
Jusqu’au XIXe siècle, l’exploitation continue des pentes du bassin versant par des sociétés de pasteurs et d’ agriculteurs éleveurs conduisait à une forte érosion des sols, et la rivière Drôme et ses affluents étaient dans une situation sédimentaire largement excédentaire.
La pêche constituait une activité complémentaire. Souvent citée, elle fut surtout importante dans le grand lac au-dessus de Luc en Diois asséché dans la première moitié du XIXe siècle. A la fin du XIXe siècle, elle fut réglementée dans la Drôme. Delacroix, dans sa statistique, indique l’existence de 12 cantonnements de pêche sur la Drôme. Un contrôle était exercé par l’administration sur le droit de pêche.
Les saules étaient une autre ressource fournie par la Drôme. Ils étaient exploités le long des rives par les paysans les plus modestes et avaient de nombreux usages, notamment dans la vannerie.
Toutes ces activités nécessitaient une adaptation au régime hydraulique de la rivière en gérant la vulnérabilité des activités économiques et de l’habitat et en endiguant la rivière. De grands travaux d’endiguement furent menés à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe, surtout dans la partie aval de la Drôme et de nouvelles terres furent conquises. Mais il n’y eut pas d’endiguement général pour la rendre navigable de Die à Crest comme le prévoyait le projet de l’ingénieur d’ Ingler (Allard, Labeur, 2012). La Drôme est restée une rivière torrentielle malgré tous ses aménagements.
Ainsi, la rivière et ses affluents remplissaient de nombreuses fonctions: transport, irrigation, force motrice, pêche, exploitation des saules. Avec des modes de gestion adaptés, les riverains en tiraient des profits supérieurs aux pertes provoquées par les inondations fréquentes et souvent violentes, cette gestion de la vulnérabilité entraînait une résilience forte. Les transformations économiques de la fin du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle ont sapé les bases d’une adaptation séculaire des usages développés par les riverains autour de la Drôme et de ses affluents. L’exode rural lié à la crise agricole et au reboisement, ainsi que la diminution de l’industrie textile ont entraîné une phase de repli démographique et économique jusqu’à la fin des années 1950 et une césure entre la haute et la basse vallée.
II. Des années 1960 à aujourd’hui: des usages en évolution, des pressions sur la ressource
De l’abandon de certains usages à l’avènement d’autres
A partir des années 1960, suite à la déprise agricole et à la désertification rurale, les collectivités locales ont recherché un nouveau moteur de développement économique. Elles ont d’ abord misé sur l’augmentation de la rentabilité agricole par le développement de l’irrigation ( grands périmètres irrigués) puis, à partir des années 1980, sur des productions agricoles de niches ( maïs, semences, ail, plantes aromatiques, vignes et productions biologiques).
Au début des années 1970, deux usages des cours d’eau dominent: les prélèvements en eau en vue de l’irrigation agricole et l’extraction de granulats commencée de manière industrielle depuis les années 1950. Ces deux usages productifs de la rivière, pratiqués dans sa partie domaniale, sont régulés par les services déconcentrés de l’ Etat. L’administration, par le système d’autorisations en place, permet ainsi une exploitation quasi illimitée des ressources de la rivière par les opérateurs privés. Au-delà, elle participe à leur développement en assurant la maîtrise d’ouvrage des travaux permettant ces usages. D’où une appropriation quasi exclusive de la rivière par ces deux usages. De par l’ampleur de leurs impacts économiques mais aussi de l’appui qu’ils reçoivent de l’ Etat, ces deux systèmes d’action tendent à occulter l’existence d’autres usages et d’autres usagers de la rivière. L’extraction de graviers est restée un usage très actif jusque dans les années 1990, notamment pour les aménagements de la vallée du Rhône: centrale nucléaire, autoroute, industrie, urbanisation. Au plus fort de la production, les volumes extraits atteignent 250 000 m³ soit » cinq à six fois le débit moyen annuel » ( Limandat 1980). En quarante ans, 7,5 millions de m³ ont été extraits de la rivière à l’aval de Pontaix, la capacité de recharge étant évaluée à seulement 0,04 million de m³ par an ( Landon, Piégay, Bravard, 1995). La forte incision de la rivière constatée, provoquant entre autres la fragilisation des digues et des ponts et l’abaissement de la nappe fluviale, a été l’un des éléments déclencheurs de nouveaux rapports à la rivière et de la volonté d’une évolution de sa gestion.
De nouvelles activités se sont alors développées en appui à la croissance économique et démographique de la vallée. Elles sont liées aux loisirs, au tourisme et à l’ économie résidentielle. Le secteur tertiaire à l’échelle de la vallée occupe ainsi 1,8 fois plus d’actifs en 1990 qu’en 1968 (INSEE, 1990). Les activités touristiques connaissent un essor par la valorisation des aménités environnementales et, en particulier, par le fait que la rivière a retrouvé une qualité propre à la baignade grâce aux contrats de rivière successifs (1990 et 1999) puis au Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (1997) conduits à l’initiative des communautés locales (fig 2). Elles viennent modifier les représentations, les usages et les modalités de gestion des ressources naturelles.
L’industrie peu développée se concentre de façon constante sur l’extrême aval de la vallée autour de Loriol. On recense quelques activités consommatrices d’eau: les abattoirs de Grâne ( aval de Crest) et de Die, les caves de la région de Die dédiées à la production de la fameuse Clairette, les piscicultures sur la Gervanne et l’ Archiane, les fromageries à Aouste et Crest. Enfin, les dérivations de la Drôme et de la Gervanne alimentent une dizaine de micro-centrales électriques.
Aujourd’hui, la ressource en eau de la Drôme se partage entre différents usages. Les pressions sur la ressource sont au cœur des préoccupations des gestionnaires, des élus et des usagers, comme en témoigne régulièrement la presse locale au travers de titres percutants. C’est un thème le plus fréquemment traité lors des réunions de la Commission locale de l’ eau plénière et de son bureau entre 2007 et 2011 dans le cadre de la révision du SAGE, soit dans 65% des réunions ( Girard, 2012).
La question de la gestion des basses eaux apparaît comme cruciale pour les habitants, c’est une réalité perçue. Ainsi l’enquête, menée dans le cadre du projet » Créateurs de Drôme » auprès de 400 habitants des communes riveraines du cours d’ eau, montre que 87% des personnes interrogées pensent que le manque d’eau est problématique ( Bartélemy et al, 2010). Ces pressions sont aussi mesurées. Les premiers résultats établis à partir d’une étude de modélisation sur les » volumes prélevables » (Sogreah in Sauquet 2010, p 107) soulignent » une pression forte sur la ressource en eau en aval de Crest qui se traduit par certains débits d’étiage actuels diminués de plus de 20% par rapport au même débit en situation naturelle: des prélèvements majoritairement agricoles à l’échelle du bassin versant, des contrastes géographiques sur les sources de prélèvement (l’ alimentation en eau potable est l’usage dominant en amont de Saillans et l’ irrigation en aval de Saillans) « . L’alimentation en eau potable provient entièrement des eaux souterraines. Les captages sont dispersés et leurs débits soumis à de fortes variations saisonnières. La concurrence est latente avec l’irrigation.
L’ agriculture, activité motrice sur le territoire, occupant un tiers des entreprises de la vallée et un quart des surfaces, est l’autre grande consommatrice d’eau. Les surfaces irriguées sont de 4 800 hectares (Direction départementale de l’ agriculture et de la forêt (DDAF), 2007 in syndicat mixte de la rivière Drôme (SMRD), 2009). L’essor de l’irrigation constaté entre 1970 et 1988 (Recensement général de l’agriculture (RGA), 1988), qui s’est concrétisé par le doublement des surfaces équipées, est officiellement stoppé depuis 1995, par le gel en irrigation collective des superficies irriguées en période estivale en réponse à la multiplication des «assecs», dans le cadre du SAGE après une longue négociation entre la profession agricole et les collectivités territoriales. Malgré les évolutions notables, le bilan du SAGE (2011) conclut néanmoins à une hausse des superficies irriguées. » L’augmentation du déficit en eau est due principalement à la variabilité du climat, aux assolements qui privilégient le maïs et à l’augmentation des cultures irriguées » est-il ainsi diagnostiqué dans le document de révision du SAGE ( SMRD, 2011). Le maïs, principale culture irriguée, est associé au développement de la filière avicole, la production de céréales de la zone couvrant 60% des besoins pour les productions animales (Ruelle et al, 2010).
Dans ce contexte, la profession agricole propose de pallier le déséquilibre saisonnier de la ressource en mettant en place des réserves de substitution et en limitant ainsi les prélèvements dans la rivière en été. Une première réserve, la réserve des Juanons d’un million de mètres cube, est en service depuis 2006.
Un autre type d’utilisateur est l’ activité touristique et de loisirs, composante économique du bassin de la Drôme aujourd’hui. Au total, le nombre de nuitées marchandes est estimé à 784 267 sur le bassin ( Loubier et al 2011). L’ enquête réalisée par Barthélemy et al (2010) est riche d’informations pour estimer également la valeur d’usage récréatif des riverains de la rivière: 75% des habitants ont une activité autour de la rivière. Parmi les principales activités pratiquées sur ou le long de la rivière sont évoquées la promenade (40%) et la baignade (27%). La baignade se pratique de juin à septembre. Cette activité a pu se développer grâce aux efforts faits par les municipalités du bassin de la Drôme pour améliorer la qualité des cours d’eau, dans le cadre notamment des deux Contrats de Rivière. Au cours des vingt dernières années, le parc des stations d’épuration a ainsi été fortement complété. La pratique des sports d’eau, d’avril à octobre, est en plein essor. On est notamment passé de 3 000 journées par an en 1990 à 30 000 journées par an en 2008 pour le canoë-kayak (SMRD, 2011). Un débit minimum de 1,5m³/s à Saillans est nécessaire pour cette pratique, ce qui n’est pas sans entraîner des conflits récurrents avec les autres usagers. A côté des activités de pêche et de chasse traditionnelle se développe le tourisme vert basé sur la valorisation du patrimoine naturel. Ce patrimoine faunistique et floristique qui contribue à la biodiversité a été identifié puis protégé à travers différents outils d’action publique (arrêtés de biotope, zones Natura 2000 ou des Espaces sensibles naturels). Le plus emblématique est la Réserve naturelle des Ramières (Allex) assure l’accueil du public et constitue un lieu de recherches scientifique et un pôle d’ éducation à l’environnement. La communauté de communes du Val de Drôme en assure la gestion.
La gestion de l’eau est largement réalisée par les regroupements de collectivités locales (communautés de communes et Conseil départemental). La spécificité de ces structures tient à la fois à leur positionnement, à l’interface entre les usagers de l’eau et l’administration, et à leur aptitude à traiter simultanément les questions de développement territorial et de préservation de la ressource et de l’environnement (Girard, 2012). Les outils mis en place en matière de gestion concourent à une gestion intégrée de l’ eau. Plus de vingt ans de gestion de l’ eau autour de la rivière Drôme ont permis le renforcement d’une nouvelle territorialité: la Vallée de la Drôme. L’enjeu est aujourd’hui de continuer, comme lors des deux précédents Contrats de Rivière, à » faire du SAGE un élément structurant et porteur du projet de territoire renforçant la prise en compte de son identité et construisant une image commune autour de la rivière qui le traverse (…) « (SMRD, 2011). Il devra composer avec un Grand Projet Rhône-Alpes, Biovallée, qui porte sur les problématiques d’ éco-territoire et de «développement humain durable».
Conclusion
L’analyse diachronique des usages et des dispositifs de gestion des eaux (du XIXe siècle jusqu’en 2010) a permis d’établir les principaux jalons de l’évolution des usages de l’eau et de leurs liens avec les territoires environnants. Cette démarche, complétée par d’autres travaux (Bouleau, Honegger, 2011) et l’établissement de trames rétrospectives et prospectives élaborées par une équipe pluridisciplinaire, a permis de relever les discontinuités, les régularités, les héritages matériels, tels les aménagements, ou immatériels comme les savoir-faire, les pratiques, les modes de gestion, puis les transformations dans les usages et les pratiques sur l’eau et les territoires qui s’inscrivent comme un dépassement des contraintes et, in fine, de proposer des scénarios d’évolution possibles intégrant la pluralité des histoires et les choix des pouvoirs publics. Cette approche de la connaissance favorise l’intégration de trois dimensions importantes dans les découpages scientifiques: le temps, l’espace et les différents objets. Le découpage espace-temps-objet est la condition de l’appréhension de l’environnement de manière continue. Le plus souvent, les découpages sont à la fois hérités et adaptés. Dans cette approche, nous avons considéré que les évolutions du milieu, des pratiques et des discours s’influencent mutuellement et que l’on peut parler de co-évolutions socio- environnementales. Pour autant, les usages passés de la rivière ont laissé des héritages qui se retrouvent dans les aménagements de la rivière et de ses affluents, les digues qui protègent villes et villages, les canaux, les anciens moulins et une histoire du territoire qui contribue à l’identité de la vallée, à l’intégration des nouveaux arrivants et à la mise en valeur du patrimoine architectural et industriel. L’ensemble de ces héritages et la volonté de préserver des milieux naturels restaurés constituent une des richesses de la vallée. La Drôme recrée du lien territorial et retrouve une de ses fonctions d’autrefois au travers de sa gestion patrimoniale. La basse vallée bénéficie certes de la proximité de l’axe rhodanien, mais la rivière sert à nouveau de lien entre haute et basse vallée.
Auteur : Anne Rivière-Honegger
UMR 5600 EVS – CNRS, Université de Lyon, 18 rue Chevreuil, 69362 Lyon Cedex 07, anne.honegger@ens-lyon.fr
B – LA RIVIÈRE SYE
La Sye prend sa source au plateau de Savel, sur la commune de Giigors et Lozeron à une altitude de 706 m. Elle est un affluent de la Drôme qu’elle rejoint à Aouste sur Sye en amont du pont du 8 mai 1945. L’altitude de confluence est de 185 m. Elle reçoit de nombreux petits ruisseaux, souvent à sec en été, dont le plus important est le ruisseau de Corneret. D’une longueur de 12,5 km, elle longe la D 731 par le hameau de la Rivière (sur la commune de Gigors et Lozeron ), Cobonne et Aouste sur Sye. Le dénivelé est de 0,004 m tous les kilomètres, soit un pourcentage moyen de 4,17%. La Sye est aussi prisée des pêcheurs pour ses truites. Enfin le captage conséquent, au dessus du hameau de la Charousse, permet d’alimenter en eau potable les trois hameaux de la commune de Gigors et Lozeron : La Rivière, Gigors et Lozeron.
Comme variantes orthographiques de son nom, les documents du Moyen Age nous fournissent seulement : Sia (1240), Sya (1383), Sirs alis Sio (1508), Scie (1594 et 1757)
Suivant un devis établi en 1689 par Pierre Moulin, maître-maçon, pour réparation des murailles (AM-DD3/84) , on peut constater les dégâts que les crues torrentielles de la Sye occasionnaient aux murs de la ville. (Cette description correspond au côté droit de la photo de 1913 côté amont ci-dessus)
» …Depuis cette tour ronde jusqu’au pont de Sye il y serait démoli une partie des murs par la grande continuation des eaux et la force de la rivière où pour avoir été bâtie sur un rocher mort lequel faut « escarper » (tailler) pour pouvoir prendre à la fondation de la muraille qui doit être faite laquelle sera fondée sur bon et solide fonds foulant dans le gravier de la dite rivière de Sye, son épaisseur sera de trois pieds en fondation laquelle sera bâtie avec des gros quartiers de pierre bien distants dans le bon mortier à chaux chaude, laquelle muraille sera élevée de quatre toises de hauteur dessus le gravier, elle sera élevée avec fruit ou talus par le dehors de sorte qu’elle sera réduite à deux pieds trois pouces d’épaisseur à sa hauteur. Depuis le pont de la dite rivière de Sye jusqu’à la rivière de Drome il s’y trouve des brèches lesquelles faut fermer et reprendre principalement une qui s’y trouve entre le dit pont et le moulin à huile … »
C – LE LAUZENS
De nombreux torrents drainent les pentes internes de la partie de la forêt de Saou la plus à l’ouest et forment le ruisseau « Lauzens » qui s’écoule hors du synclinal perché au lieu dit « Le Pas de Lauzens ».
A cet endroit précis, le tumultueux ruisseau doit effectuer une chute de 7 ou 8 mètres et poursuivre son cours pour rejoindre la rivière Drôme en aval du village d’Aouste sur Sye
Au niveau du Pas de Lauzens (416 mètres) , on observe de part et autre de la route que les falaises de calcaire à la suite d’une puissante érosion se sont profondément échancrées créant côté nord une forme d’entonnoir où s’engouffre le Mistral.=
En hiver, lorsque le ruisseau débite suffisamment et lors d’une froide nuit venteuse du nord, il n’est pas rare que l’eau du torrent dégringolant de la chute remonte, soulevée par le puissant courant d’air et forme d’étonnantes stalactites de glace remontantes, des draperies froissées puis retombe en amont de la cascade.
Rapidement refroidie par la vitesse du vent, l’eau gèle sur la végétation et recouvre la route d’une dizaine de centimètres de glace. La configuration particulière des lieux combinée aux conditions météorologiques hivernales (vent et froid) est à l’origine d’un phénomène de givrage assez surprenant. Ce moment particulier est assez féerique, le givrage des buis, arbres et buissons est très localisé sur une trentaine de mètres en amont de la chute alors qu’ailleurs, tout est parfaitement … au sec !!!
D – LA LAUZIERE ET LA GERVANNE
A l’ouest de la commune d’ Aouste, le ruisseau de la Lauzière (ou Lozière) sert de limite avec la commune de Crest. Le ruisseau de la Lauzière, formé de la réunion du Chanterenard et du Craisseron, se jette dans la Drôme. On lui donnait autrefois le nom de Creyssello (en 1383 – archives de la Drôme, E 509) ; le ruisseau de Cressel, (en 1521 – Inventaire de la chambre des comptes); el riou de Creyssalo joxta lo cementieri de Creyssalo (au XIIIe siècle – Le lieus de levesque) ; le rif de Cressalon sive de Saint-Vincent ( en 1641 – parcellaire de Crest) ; le rif de Cressaron ( au XVIIesiècle (archives de la Drôme, E 509) mais aussi le rif de la Leauziére ou Saint-Vincent (en 1651 – parcellaire de Crest) et Cresseron (sur le plan. cadastral). Pour son affluent ,le Chanterenard, nous avons au XIIIe siècle, El riou de Rissigaut (Le lieus de levesque) ; Rossigaud, (en 1523 – Inventaire de la chambre des comptes). Et le rif de Rossingaud sive Chante Reynard, (1641 parcellaire).
Le ruisseau de Gervanne sépare, à l’est, les communes d’Aouste sur Sye et de Mirabel et Blacons.
LES CANAUX
A – GENERALITES
Un canal est une voie d’eau artificielle, publique ou privée de section ouverte ; parfois en tranchée ou constitué de véritables ouvrages aménagés.
Un canal d’irrigation peut être assimilé à une rivière canalisée par voie artificielle. Il a pour but de détourner une partie de l’ eau d’une rivière de son cours normal pour des besoins humains ou multiples: d’irrigation bien sûr, mais aussi d’eau potable, sanitaires, de production d’électricité, d’alimentation de moulins etc.
On peut imaginer que les premiers canaux sont apparus avec les débuts de l’ agriculture, il y a 10 000 ans environ. Dés l’Antiquité, puis au Moyen Age, des berges et des fonds de cours d’ eau ont été rectifiés, stabilisés et aménagés pour empêcher les inondations en cas de crue et pour faciliter la traction ( halage ) et l’ accostage. Des gués étant aménagés pour permettre aux hommes, au bétail et parfois à des charrois de traverser les cours d’ eau. En France, au haut Moyen Age, il y avait encore très peu de ponts. Des barrages munis de pertuis (toujours ouverts ou bien fermés par des portes ou des «aiguilles» mobiles) permettaient de réguler les crues et de conserver de l’ eau en période d’ étiage.
B – DROIT D’USAGE DES RIVERAINS
Il nous paraît utile, voire indispensable, de rappeler ici les règles générales du droit d’usage des riverains des cours d’eau non domaniaux. Les articles 644 du code civil et 97 du code rural en fixent les limites
– Art 644:
Celui dont la propriété borde une eau courante, autre que celle qui est déclarée dépendante du domaine public par l’article 538 » De la distinction des biens» peut s’en servir à son passage pour l’irrigation de ses propriétés.
Celui dont cette eau traverse l’héritage peut même en user dans l’intervalle qu’elle y parcourt, mais à la charge de la rendre, à la sortie de ses fonds, à son cours ordinaire.
Le riverain est celui dont la propriété borde l’eau. Ne peut être considéré comme riverain, celui qui est séparé du cours d’eau par une digue, un chemin public ou un autre héritage.
– Art 97:
Les riverains n’ont le droit d’user de l’eau courante qui borde ou traverse leurs héritages que dans les limites déterminées par la loi. Ils sont tenus de se conformer dans l’ exercice de ce droit, aux dispositions des règlements et des autorisations émanées de l’ Administration
Enfin les canaux ont pris un nouvel essor avec l’utilisation de la force motrice pour faire tourner les roues des moulins à partir du XIIIe siècle. Les riverains avaient un droit d’arrosage, sous réserve d’avoir donné du terrain pour le passage de ces canaux. Inutile de préciser que cette procédure fut l’objet de nombreuses querelles et procès entre utilisateurs, comme nous le verrons plus loin.
Pour notre village, nous avons établi un plan sommaire.
.
Dans la partie nord de la commune :
- – ce qui existait à l’origine
- – et ce qui reste aujourd’hui
Cela permet de constater que dès l’époque gallo-romaine, et, ensuite au Moyen Age, il y avait un maillage de drains et canaux.
Plan sommaire – Légende
__ Ce qui existe actuellement, c’est à dire le canal de la Sye
__ Ce qui existait jusque dans les années 1960
Ce qui existait au début du XXe siècle
Bassin de décantation. Roue à aubes à l’entrée de l’Allée de la papeterie.Il y avait une source au mur d’escalade.
__ Drains (gallo-romains et Moyen Age) qui viennent du quartier Saint François
__ Canal du début du XIXe siècle qui servait à l’arrosage
Nous avons successivement:
Pour la rivière de SYE
- – Le canal romain des Arras
- Le canal de la Pialle- Le canal Thomé ( aux limites des communes Aouste-Cobonne)
- Le canal de la SACNA (le Sac National) situé rive gauche
- Le canal du Moulin Appaix (Apaix) alimenté par le canal de La Pialle
Sur la rive gauche de la Drôme
- Le canal de l’usine Tavan (Flachard)
- Le canal de Soubeyran
Sur la rive droite de la Drôme
- Le canal des usines de Crest
- Le canal de Sye
- Le canal de Gervanne
C – LE CANAL ROMAIN DES ARRAS
Le plus ancien est celui qui alimentait les villas romaines au quartier des Arras, indiqué sur un plan de 1750. Il prenait l’eau de la Sye à Cobonne, au niveau de la ferme Paturel et suivait la vallée à flanc de coteau. On peut encore en suivre le tracé franchissant le ravin sous la ferme Boulard. (Voir plan ci-dessus)
D – LE CANAL DE LA PIALLE
Ce canal servait à l’usine de la Pialle (ex usine Charnier ; Papeterie Fox, fabrication de papier hygiénique), puis d’arrosage au village et au quartier de Mivoie, n’est plus en service depuis 1996 . Une dérivation servait également pour l’industrie (moulins), artisanat.…
La plus ancienne mention de l’usine est citée dans un texte » – eut utile comunitati quia per medium illius poterunt textores venire in dicto loco ad ipsum augmentandum – » (AD Drôme, fonds d’Aouste GG 352,27/7/1486) » nous apprend : » … Ainsi à Aouste où en 1486, la communauté souhaite aider le nommé Pierre de Plano à rétablir les gauchoirs établis sur la Sye, afin d’attirer des tisserands et repeupler le village. … » . Les foulons existaient bien avant 1486 sur la Sye.
De même, nous savons qu’un droit d’arrosage sur les canaux de la Pialhe (Pialle) est institué par une vente par la Communauté d’Aouste avec réserve de droits d’eau en 1582. Ce droit est confirmé par les actes de l’Évêché de Die les 3 avril 1659 et 5 mai 1663 ; par l’Assemblée générale des propriétaires à Aouste le 7 juin 1729 ; par les arrêts du Parlement de Grenoble des 13 octobre 1744 et 7 août 1772 ; par la Justice de Paix du 9 fructidor An X (27 août 1802) ; par les actes du 19 frimaire An VIII (10 décembre 1799) de Me Guerimand notaire à Aouste et de Me Gresse du 14 décembre 1873 ; par le procès verbal de visite des lieux par le Juge de Paix de Crest le 13 décembre 1930 et enfin par le jugement du Tribunal de Crest du 7 février 1931.
E – LE CANAL DE JACQUES THOME
En 1757, ce canal alimente un foulon à la ferme Blanc, quartier La Gaye, il est prolongé en 1800 jusqu’au moulinage. En 1847, il devient la propriété de monsieur Chaix. En 1925, monsieur Corréard installe une turbine Bonki des Ets Dumont de Saint Uze et monte une fabrique de glace à rafraîchir. En 1901, la famille Thomé réinstalle un moulinage avec une turbine Francis, avec une chute de 19 m. Arrêt en 1908. Actuellement, ce canal est toujours en service et Monsieur Jacques THOME produit de l’électricité pour EDF.
A noter que certains de ces canaux sont signalés sur la carte de Cassini de 1750.
6 – LE CANAL DE LA SACNA (le SAc NAtional)
Le débit du canal de Gervanne s’avérant insuffisant, le 2 février 1852, Joseph Filliat, fabricant de papier est autorisé à construire un barrage mobile sur la rive gauche de la Sye pour alimenter soit les arrosages, soit pour le jeu ou l’usage des usines.
Le barrage serait construit environ 350 m en aval de l’usine de Mr Charnier. Le 4/10/1854, une demande de Mrs Filliat-Thibert, est adressée au Préfet afin d’ obtenir l’autorisation de dériver les eaux de la Sye pour augmenter la force motrice de la fabrique de papier (future usine SACNA) .
Le 14 mai 1855 une visite est effectuée sur place en présence des intéressés (Gresse notaire, Filliat Pierre frère propriétaire du terrain, Thomé propriétaire riverain, Charnier propriétaire de l’usine supérieure (usine de la Pialle), Fillat et Thibert pétitionnaires).
L’ingénieur ordinaire de Crest, après son rapport, autorise le 24/10/1855 la construction du barrage (partie fixe et mobile) sous conditions d’une longueur de 276 m, à 56 m du canal de fuite de l’usine Charnier.
Suite à divergences une deuxième enquête est ordonnée le 28/10/1855, reconnue favorable le Sous-Préfet de Die donne son autorisation le 19/11/1855.
Sur la rive gauche de la Sye, la prise est au niveau de l’usine de la Pialle et n’est plus en service.
7 – LE CANAL DU MOULIN APAIX
Bien que ce moulin à blé et à huile alimenté par un canal, existait depuis le Moyen Age, ce n’est qu’à partir de 1592 que des traces écrites existent dans les archives municipales disponibles.
Il alimentait le moulin de Monsieur Apaix (ou Appaix) et un foulon au bout de la rue des Moitans.
Il démarrait au niveau de l’usine SACNA et suivait la rive droite de la Sye.
A noter que c’est la dynamo du moulin Apaix qui a servi pour l’éclairage public de la commune d’Aouste sur Sye, de 1894 à 1910 et ce, bien avant certaines grandes villes comme Lyon et Marseille.
8 – LE CANAL DE L’USINE TAVAN (FLACHARD)
Le 2 mars 1886, Mrs Tavan Charles et Antoine, frères, et Monestier Jules, fabricants de chaux et ciments, demandent au Préfet de la Drôme l’autorisation de pratiquer une prise d’eau sur la Drôme pour la mise en service d’une usine de tissage mécanique de soie avec force motrice hydraulique sur la commune d’Aouste. Le volume d’eau prélevé serait de 800 L par seconde.
Cette prise d’eau se situe sur le territoire de la commune de Piégros La Clastre. Il démarre dans la commune de Piégros La Clastre, au niveau de la ferme Sagnial, sur la rive gauche de la Drôme, qu’elle suit sur 1km 500.
Un cahier de consentements des 18 propriétaires riverains est établi et ne soulève aucune contestation, si ce n’est quelques réserves de Mrs Filliat frères papetiers, Mr Vertupier-Colombier président du syndicat des usines de Crest et de Mr Davin syndic du canal Souvion-La Clastre, craignant pour le débit d’eau dans leurs propres canaux.Toutefois, quelques années plus tard, Mr Garnier Alexandre, moulinier implanté sur la rive opposée, formulera une plainte contre les Srs Tavan et Monestier. En effet, l’édification du barrage apporte un amas de graviers et dévie l’eau vers la rive droite de la Drôme érodant les murs de la propriété Garnier .(AD 57 S 35 réf : 10302)
Les demandeurs s’engagent le 1er juin 1890 par ailleurs à payer une redevance de 55,90 frs.
Après consultation des différents services concernés de l’État, le Président de la République Jules Grévy, par décret N°45 du 9 février1887 autorise les fabricants à emprunter l’eau de la rivière pour « la mise en jeu » d’une usine.
L’ingénieur des Ponts et Chaussées établit le 31 décembre 1888 un procès verbal de réception.
Il a été détruit par une crue de la Drôme. En activité, il alimentait le tissage Flachard et une fabrique de chaux (Barnier).
9 – LE CANAL DE SOUBEYRAN
Comme pour le canal dénommé «canal des Moulins et du Marché», sur la rive droite de la Drôme, l’origine du canal Soubeyran est très ancienne, les historiens estiment qu’il était déjà en exploitation en 1392 à l’époque des ducs de Poitiers.
Avant 1711, la prise du canal se trouvait également sur le territoire de Crest, vers les Plantas, côté gauche de la Drôme.
Désireux d’augmenter leur chute, les propriétaires demandaient en 1711, l’autorisation d’établir leur barrage sur la commune d’Aouste-sur-Sye. Cette autorisation leur fut accordée par les autorités de l’ époque.
10 – LE CANAL DES USINES DE CREST
A l’origine canal Villette, il est encore appelé canal du Marché ou canal des Moulins de Crest. Il est situé sur la rive droite de la Drôme, la prise d’eau a été modifiée à trois reprises:
1°) Avant 1500, la prise se trouvait prés de la Lozière en territoire de Crest
2°) En 1507, les consuls de Crest, désireux de créer de nouvelles industries, source de richesses pour la ville, sollicitent les autorités aoustoises et obtinrent l’autorisation d’établir la prise d’eau en aval du pont d’Aouste, en face de l’embouchure du ruisseau du Lauzens
3°) En 1875, une crue importante de la Drôme, a emporté une partie du tunnel, au niveau de la rue des Remparts, ce qui a entraîné la construction d’une digue de protection du canal et la pose d’une nouvelle prise en amont du pont. Cette prise d’eau était encore utilisée en 1939.
Anecdote
Malgré le creusement du nouveau canal en 1520, les bas quartiers de Crest continuaient à être inondés. Par un acte en date du 9 juin 1657, la ville ferait creuser à ses frais, un nouveau canal, qui appartiendrait en toute propriété au Sieur BRET, propriétaire, après les quartiers de Crévecol et de Tattées, de prairies et d’un grand jardin. Cette transaction se ferait moyennant une indemnité de 200 livres payées par le Sieur BRET. Ce projet n’eut pas de suite.
Comme ce canal était d’accès difficile (voûtes) et mal entretenu, il s’ensuivit durant une centaine d’années, une succession de litiges et procès entre la ville et les propriétaires successifs. En 1733, ce canal provoqua même une épidémie.
Ce n’est que le 10 novembre 1753 que le propriétaire de l’époque, le sieur St MICHEL, passe un accord avec la ville : la ville construit son propre canal, en suivant la route jusqu’à VALENCE. Le baron de St MICHEL est indemnisé (350 livres), mais doit une fois par an nettoyer son propre canal.
Il est convenu en outre, que tous les procès précédents demeureraient éteints. Enfin, en cas de pluie torrentielle, la ville se réservait la possibilité de faire passer l’eau du canal du moulin du Marché par celui de Joubernon.
Lors de la reconstruction du pont d’ Aouste en 1866, les usiniers de Crest conçurent le projet d’une association syndicale. Elle s’est constituée le 20 mars 1870 en syndicat libre. Elle fut convertie par arrêté préfectoral en association syndicale autorisée, par suite de l’opposition d’un des usiniers: Mr Guilhot. Il interjeta appel, mais le Président de la République, par décret du 25 février 1873, constitua définitivement l’association syndicale autorisée et la déclara même d’utilité publique.
Il servait de force motrice à la majorité des usines et ateliers de Crest: Tanneries des Grands Moulins, tissages Flachard (usine de Crest), moulinages Thomé et Rey, fabrique de cardes Rey, atelier meubles Monry et Maison Argod, etc ….
Il a servi également de collecteur d’ égout d’une partie de la population d’Aouste et de Crest, puis des abattoirs. Enfin comme tout canal, il servait à l’arrosage au quartier Mivoie, prés de Crest, jusqu’à son terme au ruisseau Saleine. Le lit de la Drôme, à partir des années 1945, a baissé régulièrement à cause des extractions massives de graviers. Il a donc fallu établir un barrage pour obliger l’eau à pénétrer dans le canal. Celui-ci a été réalisé en pierres sèches puis en gabions et en blocs de pierres. Ce sont ces blocs que l’on peut encore voir en amont du pont.
Les usiniers ont arrêté son exploitation en 1966, et l’ont cédé à la ville de Crest pour le franc symbolique, en contrepartie, c’est Monsieur Henri Planchon rémunéré par la ville de Crest pendant 5 ans qui en a assuré la surveillance. Entretenu par la ville de Crest jusqu’en 1971, puis très sommairement par les «arrosants» avec l’aide des communes pendant encore quelques années.
Il n’est plus en service depuis 1975, faute d’entretien, c’est là aussi, l’un des paradoxes de ce canal, dont la plus grande partie est sur la commune d’Aouste, mais qui est la propriété de celle de Crest.
11 – PETITION de la DAME GRESSE
En date du 28 mars 1839, Dame Gresse, née Sayn, habitant Aouste, demande aux Ponts et Chaussées, l’autorisation de prendre l’eau de la Drôme sur la rive droite ( quartier Mivoie), pour l’alimentation d’une usine à soie.
Avis favorable de l’ingénieur en chef en date du 20 juillet 1839 et arrêté de Louis-Philippe, donnant son accord en date du 4 octobre 1840.
Vous trouverez les copies de ces documents sur le site de Histoire et Patrimoine Aoustois
12 – LE CANAL DE SYE
La Sye prend sa source au Savel, sur la commune de Gigors et Lozeron. Elle alimente en eau potable une partie de cette commune et le trop plein constitue la Sye, dont le lit longe la D 731 par la Rivière, Les Gauthiers, les Michauds (hameaux de la commune de Gigors et Lozeron), puis Cobonne et Aouste. La prise du canal se situe sur la rive droite à hauteur du bâtiment Valmasel. Plus d’une centaine de riverains l’utilise pour fournir l’ eau des piscines et l’arrosage. Il a alimenté à une certaine époque l’usine de la Pialle (papeterie).
Des documents recueillis (courrier de Maître Jacques-F. Béranger du 5 janvier 1977), il semble que le canal remonte au moins au XVIe siècle, mais tout porte à croire qu’il est antérieur à cette époque. C’est ainsi qu’en 1582 (sous le règne de Henri III), la communauté d’ Aouste se dessaisit des moulins «Carman», sous réserve que les prairies situées au-dessus et au-dessous du moulin continuent à être arrosées par les eaux des ruisseaux de la Sye et de Gervanne.
Qui est réellement propriétaire des canaux? Page 2 de la liasse intitulée » à Monsieur le Juge…. », est évoqué Monseigneur l’Évêque de Die qui percevait des lods (droits de mutation perçus par le seigneur lors de la vente ou de l’échange d’une terre roturière par un censitaire), en cas de mutation des terrains, pour obtenir le droit à l’arrosage pour le nouveau propriétaire.
Il y a des litiges plus ou moins graves entre les propriétaires fonciers qui veulent l’eau pour l’irrigation de leurs terres et les petits industriels dont l’eau est indispensable pour faire tourner leurs machines. Ces conflits se règlent devant la justice: 1729 – 1779 – an 10. Les sanctions se traduisent par des amendes pour ceux qui entravaient la répartition équitable de l’eau.
13 – LE CANAL DE GERVANNE
1) Historique
La première mention du canal de la Gervanne est constituée par une pièce conservée aux Archives de Valence, en date du 17 juillet 1486, par laquelle l’Evêque de Valence et de Die, seigneur du lieu, permettait à la communauté d’ Aouste, de construire un moulin à drap ou foulon, mis en jeu par l’eau du canal du pont de la Gervanne.
Toutefois, on peut supposer que le Seigneur d’Aouste fit établir le canal pour faire actionner le moulin banal de la commune à une époque antérieure au XVe siècle et que l’acte de 1486 constitue une autorisation pour une deuxième usine.
Le 29 juillet 1582, la communauté d’ Aouste vendit les dits moulins aux auteurs de La MOTTE avec les canaux et dépendances, sous réserve que les riverains pourront, comme par le passé, se servir du surplus des eaux pour l’arrosage de leurs prairies.
Le 10 juillet 1733, l’Évêque Gabriel de Cosnac, par acte reçu de Mme Lagier, notaire à Die, donne permission d’établir une papeterie à un sieur Achard, Madame Marguerite Henriette Buisson Dumesnil, femme de Messire Domiliers, écuyer de La Motte, après contestation, transigea avec Achard et lui accorda moyennant une rente annuelle de 60 livres et 2 rames de papier couronne, l’autorisation de se servir de l’eau du canal depuis la prise en Gervanne jusqu’à la papeterie, à faire passer le canal aux endroits les plus convenables, à faire une deuxième papeterie et des foulons à drap, à prendre l’eau au dessous et vis à vis le pont de Blacons, etc …., de se servir du droit qu’a la dite Dame de prendre des fonds voisins aux canaux et prise d’eau à estimation d’experts pour la dite prise et la conduite d’icelle.
En 1744, un arrêt du Parlement de Grenoble règle le différend intervenu, malgré la transaction prescrite en 1733 entre les mêmes usagers du canal, oblige le sieur Achard à élargir et à récurer le canal de Gervanne et Madame Dumesnil à se pourvoir ainsi et comme elle avisera contre les particuliers afin de réglementer les droits d’ arrosage.
En 1838, Mr Athenor, représentant les sieurs Achard, vendit, par acte reçu à l’étude de Me Gresse, le 14 octobre 1838 à Louis Elie Faure les terrains qu’il possédait entre la route de Blacons et le confluent de la Romane et de la Gervanne et les droits au canal passant sur ses terres.
Mr L. Elie Faure beau père de Mr Chalamet ne semble pas avoir utilisé ses droits au début de son acquisition car une expertise faite en 1857 ne mentionne aucun ouvrage établi sur la partie cédée. Les riverains du canal usant habituellement de l’eau pour leurs arrosages sans règles déterminées, apportèrent une telle gêne aux usiniers que ces derniers durent se défendre contre ces abus successifs, d’où procès; et enfin, le 12 novembre 1856, le tribunal de Die nomma des experts qui commencèrent leurs opérations le 15 avril 1857 et déposèrent leur rapport le 26 août 1858. Enfin, par audience publique du 7 juin 1859, le tribunal de 1° instance de l’arrondissement de Die a rendu un jugement motivé, qui constitue la charte du canal et qui adoptait le rapport des experts, condamnait les arrosants aux dépens, fixait les époques et durée des arrosages à 48 h par semaine du 1er mai au 30 septembre.
En suite de ce jugement, les intéressés ont signé le 23 novembre 1859, une convention déposée aux minutes de Me Gresse, portant à 60 heures par semaine la durée des arrosages et enfin en 1863, un jugement prescrit que les arrosages d’une durée de 60 heures par semaine commenceront en tête du canal et que chaque fonds sera arrosé successivement de manière toutefois que les eaux en amont de l’usine Garnier ne puissent être détournées pendant plus de 30 heures à partir du samedi à 6 heures au dimanche à midi.
Aucune des pièces prescrites ne mentionne l’usine de Romezon, cette dernière a dû être installée par Mrs Faure et Chalamet en vertu des droits acquis en 1838 et postérieurement à l’expertise de 1857 qui n’en fait pas mention. Les propriétaires ont dû profiter de la déclivité naturelle du terrain pour installer une roue, mais en présence de la faible puissance ainsi obtenue des travaux ont été entrepris par Mr Chalamet et par Mr Chorier pour accroître son importance. Ces usiniers sont parvenus à porter la chute à 3 m, en approfondissant le canal de décharge et en surélevant les berges du canal d’amenée.
En 1879 et 1880, la ville de Crest passa, avec les usiniers propriétaires du canal – Mrs Garnier, Filliat et Chorier – un traité réglant les conditions d’établissement de la nouvelle prise d’eau en Gervanne, déplacée par suite de la construction de la digue établie pour l’alimentation de la ville de Crest.
Un jugement rendu postérieurement, détermine les droits respectifs des canaux rive droite et rive gauche et les fixe pour chacun à moitié du débit de la Gervanne. Il s’ensuit que l’usine des Berthalais et le canal rive droite sont alimentés par la moitié du débit de la Gervanne supérieure et par le débit des sources dites des Fontaigneux ( prés du terrain de sport de Beaufort sur Gervanne) qui, en été, constituent l’alimentation principale. Dans un acte de vente du 26 juin 1909, par Me Gresse, notaire à Aouste, de Melle Hermance et Fauchy Chorier à Mr Joseph Maillet, ces dispositions sont confirmées.
2) Tracé -Prise
Il n’y a aucune certitude en ce qui concerne le tracé du canal primitif et sa prise en Gervanne. On ne peut en effet retenir la mention sur l’acte de 1733 » à prendre l’eau au-dessus et vis-à-vis du pont de Blacons » comme indication de l’emplacement de la prise, mais plutôt comme une autorisation de détourner, à partir de ce point, le canal primitif. Lors de l’établissement du cadastre vers 1820, le tracé du canal est conforme à ce qu’il est à ce jour et la prise est indiquée à 60 mètres en amont du confluent de la Romane à la Gervanne ; plus tard en 1837, la prise fut installée en amont à 300 m au-delà et en 1880, le barrage établi par la ville de Crest pour son adduction d’eau potable fut, en vertu d’un accord en date du 22 mai 1880, établi comme tête de prise du canal.
3) Propriété du Canal
Il est de toute évidence que l’assiette et les abords du canal appartenaient au début au seigneur du lieu et qu’il a toujours été considéré comme une dépendance des usines. Cette situation se trouve confirmée par l’accord intervenu entre Mme Buisson Dumesnil et le sieur Achard le 11 juillet 1733 où il est indiqué qu’il pourra faire passer le canal aux endroits les plus convenables….de se servir du droit qu’a la dite Dame de prendre des fonds voisins aux canaux et prise d’eau à estimation d’experts pour ladite prise et la conduite d’icelle.
D’autre part, les terrains sur lesquels passent le canal ont plusieurs fois au cours des siècles, appartenu en totalité aux usiniers qui n’ont sûrement pas aliéné le canal et ses abords en vendant les terrains voisins.
Les plans cadastraux d’ Aouste et de Blacons, sur lesquels le canal est mentionné, indiquent une séparation bien marquée entre les parcelles rive droite et rive gauche qui ne portent jamais les mêmes numéros.
Enfin, la jurisprudence actuelle, conforme à l’ancien droit consacre que le propriétaire d’un moulin ou de toute autre usine est légalement présumé propriétaire du canal qui conduit les eaux lorsque ce canal est fait de main d’homme.
On est donc en droit de s’étonner de la prétention de certains riverains qui se déclarent propriétaires du canal au droit de leur propriété et du libellé équivoque de certains actes de vente qui intègrent, paraît-il, par moitié le canal dans chacune des propriétés riveraines. Ces errements dont il sera facile à déterminer l’origine en examinant certains actes de l’étude de Me GRESSE semblent peu anciens.
Voir le document – section 2 – en ce qui concerne cette question : » Résumé des droits de la commune d’Aouste, de la commune de Crest et des riverains du canal de la Gervanne « .
Par courrier du 5 février 1985 des Moulinages Émile Rey, adressé au Syndicat d’Aménagement du Val de Drôme, il est précisé qu’ils donnent leur accord pour céder dès ce jour les droits sur les berges du canal tout en se réservant les droits d’eau. Le directeur de Lembacel y étant de même favorable. Le troisième propriétaire, acquéreur de l’usine Barral, n’a plus l’intention d’utiliser l’eau du canal.
4) Droits d’arrosage
Le droit d’arrosage très ancien est mentionné pour la première fois par l’acte de vente de 1582 où il est dit que « l’acquéreur devra continuer les arrosages des prairies comme il se pratiquait auparavant au moyen de surplus de l’eau non nécessaire au moulin et ce moyennant une redevance d’un quartaut de blé froment par sétérée ».
Tous les actes postérieurs témoignent de l’abus constant que les propriétaires ont fait de ce droit qui primitivement était une facilité donnée par le seigneur, propriétaire du canal du moulin, a ses tenanciers et que les propriétaires successifs ont revendiqué en exagérant sa portée et en se déchargeant de toutes redevances.
De nombreux jugements à ce sujet et par lesquels les arrosants ont toujours été condamnés à restreindre et à ordonner leurs arrosages, ainsi qu’à entretenir les ouvrages de prise d’eau au canal, ne semblent pas avoir donné de résultats positifs.
Pour l’étude des droits des arrosants, on peut d’ailleurs négliger cette période ancienne et s’en rapporter au jugement du 7 juin 1858 qui règle clairement la question.
Auparavant, en 1856, il avait été rendu un jugement par défaut et à la suite d’une opposition, il a été ordonné une expertise portant sur les points suivants :
- Quantité d’eau nécessaire aux usines et au canal
– Quantité d’eau passant au canalisé
- Etendue des arrosages
- Etat du canal et des ouvrages de prise d’eau des arrosants
S’appuyant sur le rapport des experts, le tribunal constate que les riverains ont fréquemment abusé du canal de Gervanne, soit en négligeant l’entretien de leurs vannes, soit en laissant perdre les eaux dans la Drôme, d’où il suit que les dommages intérêts fixés par le jugement en défaut doivent être maintenus sans garantie aux réparations qui pourraient être exigées ultérieurement afin d’éviter ces abus, et condamnent les dits Tavan et Consorts (113 arrosants) aux dépens, mandant et ordonnant à tout huissier sur ce requis de mettre le présent jugement à exécution.
Le jugement par défaut du 12 février 1856 qui se trouve ainsi confirmé, accordait aux arrosants 48 heures d’arrosage par semaine du 25 mars au 8 septembre de chaque année du samedi 6 heures du matin au lundi même heure.
Il semblait donc que ce jugement terminait le différend, mais les abus ont continué et les usiniers ne paraissent pas avoir usé des droits qui leur étaient reconnus par ce jugement; d’où l’objet d’une transaction portant à 60 heures la durée des arrosages et d’un nouveau jugement de 1863, confirmant cette durée pour les arrosants en aval de l’usine Garnier ( devenue usine Barral) et la réduisant à 30 heures pour les arrosants en amont.
Les arrosants ne semblent pas avoir tenu compte de ces jugements et les usiniers les ont laissé agir à leur guise.
– » Copie du dépôt des statuts de l’ ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE des USAGERS de la FORCE HYDRAULIQUE du CANAL de la GERVANNE à la SYE « .
CHAPITRE V
LES LAVOIRS
La lessive est de nos jours une opération banale que l’on pratique quotidiennement, sans même y réfléchir. Rien qu’en France, c’est environ 20 millions de lessives qui sont effectuées au quotidien ! Et pourtant, cette tâche simple a été longtemps le cauchemar de générations de femmes, corvée à la fois pénible, malsaine et bien plus polluante qu’elle ne l’est aujourd’hui
De tout temps la lessive fut l’apanage des femmes : laveuses, lavandières, blanchisseuses et repasseuses. Corvée autrefois longue et pénible, malsaine, le lavage du linge s’est transformé en une tâche quotidienne simple, rapide et relativement bon marché, et moins polluante qu’elle ne le fut autrefois, suite aux nombreux progrès technologiques qui se sont opérés au cours du siècle dernier. La lessive est devenue, de nos jours, une opération banale, pratiquée quotidiennement.
Le lavage du linge de corps et des vêtements de travail avait lieu toutes les deux ou trois semaines, plus souvent si on avait de jeunes enfants. Mais plus fréquemment les petites lessives avaient lieu une fois par semaine, généralement le lundi, pour de petites quantités de linge, essentiellement des vêtements. Il s’agissait bien souvent d’un simple trempage sans savonnage dans l’eau de la rivière ou de la mare, faute de ressources.
La buée, ( » buga » en occitan), » bua » (en occitan du nord), » buec » (Die) signifie la lessive. Jusqu’au début du siècle. Faire la lessive se disait » faire la buée » ou » faire la bue « , termes à l’origine de l’étymologie de buanderie.
La grande lessive ou grande buée
Il s’agissait de la grande lessive de l’année du linge de maison (rudes draps de lin) et des vêtements (chemises en chanvre, bonnets de nuit, blouses…). Cela se passait une, deux ou trois fois par an, au printemps (préparation du linge pour les fêtes de métier organisées lors de la semaine sainte), en été avant la moisson ou après la fenaison pour profiter de la belle saison, voire en automne. Selon l’aisance de la famille, il y avait soit une bonne réserve de linge, soit peu de changements. Il s’agissait d’un travail collectif assuré par les femmes car chaque famille ne possédait pas le grand chaudron de fonte (ou la chaudière) posé sur quatre pieds. Les voisines s’entraidaient à cette occasion où les familles plus aisées faisaient appel à une lavandière professionnelle.
Les premières opérations se pratiquaient dans les foyers. Le linge était trié : d’un côté le linge blanc, et de l’autre les lainages et le linge fin. Le blanc était lui même trié en fonction de son degré de saleté et de sa finesse : cela conditionnait sa place dans le cuvier.
La buée avait lieu à l’extérieur ou dans une pièce spécialement préparée (chambre à four, fournil, appentis ou coin de grange). La lessive durait trois ou quatre jours, voire une semaine suivant la quantité de linge. Une grande buée comptait en moyenne 70 draps et autant de chemises, des dizaines de torchons et de mouchoirs.
Le premier jour avait lieu le trempage : le linge était mis à macérer dans des cuviers en terre ou grands baquets de bois cerclés de fer. Les pièces de linge de la famille y étaient disposées en couche qu’on arrosait avec de l’eau froide pour éliminer les premières tâches. L’opération consistait à décrasser à l’eau, sommairement, pour en faire tomber les matières peu adhérentes et solubles (poussières, boues), le linge que l’on avait amassé. Ainsi, la crasse était-elle dissoute dans l’eau froide alors que les matières qui la constituaient auraient coagulé dans l’eau bouillante.
L’opération appelée aussi » essangeage » correspondait au prélavage. Le linge était sommairement décrassé à l’eau. Les saletés les plus tenaces étaient frottées à la brosse sur une planche à laver striée ; les pièces délicates, les cols et poignets de chemises, étaient lavées à l’eau tiède avec du savon de Marseille. Pour les taches les plus rebelles, chaque femme avait ses secrets. Il y avait toute une variété de procédés, dont certains passablement curieux, pour ôter les taches.
Le lendemain, une femme procédait au » coulage » . Une fois rempli, le cuvier était recouvert d’une grosse toile de chanvre (charrier ou cendrier) ou d’un drap appelé » cendrier » car sur ce tissu de grosse toile était répandu un lit épais de cendres de bois tendre qui faisaient office de savon grâce à leur richesse en carbonate de potassium (On y ajoutera à la fin du XIXe siècle des seaux de cristaux de soude fondus avec des copeaux de savon ). Les coins de la toile étaient ramenés sur les cendres et on versait sur le tout une soixantaine de litres d’eau bouillante parfois parfumée avec des plantes aromatiques (lavande, thym, iris, etc…). Cela durait une bonne demi-journée. Les sels de potasse contenus dans les cendres se dissolvaient et l’eau de lessive, solution alcaline, était recueillie au bout d’une heure à un trou à la base du cuvier et l’on réchauffait l’eau. On reversait la lessive sur le charrier à l’aide d’un récipient,. On recommençait l’opération pendant des heures. Des vapeurs étouffantes se dégageaient du linge bouilli et touillé de temps à autre à l’aide d’un solide bâton. On laissait macérer toute la nuit.
Le troisième jour, le linge refroidi et alourdi était chargé dans des corbeilles ou des bassines sur la brouette ou la remorque. Il était conduit au lavoir pour y être battu, rincé et essoré. Le linge retrouvait sa blancheur. Les laveuses procédaient alors au savonnage, au dégorgeage et au rinçage. Elles prenaient leur battoir (le battoir permettait d’extraire le maximum d’eau de lessive), leur pain de savon, leur brosse de chiendent. Elles tendaient le linge à bout de bras, le laissaient flotter dans l’eau froide, le frottaient et le pressaient sur la pierre avec la brosse. Elles le rinçaient en le tordant et en le frappant avec le battoir pour le débarrasser de l’eau de lessive. Parfois, elles plongeaient dans l’eau de chaque baquet de rinçage un sac de bleu contenant une poudre bleue provenant de l’indigotier ou de l’outremer, pour rendre le linge encore plus blanc.
À l’issue de ces journées, le linge subissait un séchage, selon le temps, à air chaud (devant le poêle ou la cheminée), couvert (dans un grenier) ou à l’air libre (au jardin sur un fil, sur des haies ou pour les grandes pièces de linge étendu sur l’herbe, ce qui favorisait son blanchiment) pour les grandes pièces telles que les draps. Enfin les draps étaient pliés dans les grandes armoires de ferme.
Après la Première Guerre Mondiale, le coulage fut simplifié. Les femmes utilisaient » les lessiveuses à champignon galvanisé « .
Le lavoir
Un lavoir est un bassin alimenté en eau le plus souvent naturelle, il est public, gratuit ou payant selon les communes. Il peut être privé et mis à disposition contre redevance.
Sa fonction essentielle était le rinçage du linge. En effet, le lavage ne consommait que quelques seaux d’eau, et pouvait donc se faire » à la maison», le rinçage, au contraire, nécessitait une grande quantité d’eau claire, d’où l’utilisation du lavoir.
1) Histoire
A l’origine, le lavoir est une pierre plate inclinée ou une simple planche posée au bord d’un cours d’eau, d’une mare ou d’une source, mais pas forcement sous abri. La pollution, les épidémies, les mesures d’hygiène nécessitent le développement de constructions spécifiques à la fin du XVIIIe siècle.
En France, les épidémies de choléra, de variole et de typhoïde incitent le Parlement à voter la loi du 3 février 1851, accordant un crédit spécial, pour subventionner à hauteur de 30%, la construction de lavoirs couverts. Les travaux étaient mis en adjudication » à la chandelle», ce qui implique une certaine similitude de conception, voire de matériaux. Ils perdurent jusqu’à la moitié du XXe siècle.
Il subsiste quelques témoignages de ce patrimoine dans notre cité d’ AOUSTE sur SYE, qui a abrité le travail banal, harassant, sans gloire mais indispensable des laveuses. C’ est un lieu de mémoire.
Les lavoirs avaient une importante fonction sociale, c’ est en effet l’un des rares lieux, où les femmes souvent confinées dans leur foyer ou dans la ferme, pouvaient se réunir et échanger.
Il est aussi un espace public rempli de vie, de bruits et de cancans, un lieu de vie réservé aux femmes, une sorte de » double du café du village pour les hommes».
En outre, la quantité de linge apporté au lavoir témoigne de la » prospérité de la maison, voire de son intimité» . «Au lavoir, on lave le linge, mais on salit les gens» dit-on!
Plusieurs lavoirs ont existé sur la commune d’Aouste. Au XIXe siècle, cinq lavoirs furent édifiés sur la commune (quatre municipaux : un à l’est du village, un au centre , le « Petit Bassin », un à l’ouest, celui de Chalancon aujourd’hui détruit, un au quartier Bellevue à Blacons) et un privé (lavoir Flachard-Tavan utilisé par les ouvrières de l’usine logées sur place.
Aujourd’hui, le lavoir de Chalancon n’existe plus. Son ancien emplacement est couvert de broussailles et l’on distingue encore les marches qui permettaient son accès, les barres d’appui et la margelle en pierre. Au nord de ce lavoir existait l’étendoir sur lequel est maintenant construit la Halte-Garderie.
Quant au lavoir de Bellevue, il se trouve actuellement sur la commune de Mirabel-et-Blacons du fait du rattachement en 1946 du quartier Bellevue à cette commune.
Le lavoir Filliat
Le lavoir communal, dénommé Filliat à l’origine car implanté près de la papeterie devenue Sacna-Lembacel-Mondi, se situe sur le canal de Gervanne (ou des usines). C’est l’un des quatre lavoirs communaux construits sur la commune d’Aouste au XIXe siècle.
Le 10 novembre 1889 Mr Cheynel architecte à Crest, sollicité par la commune, établit un devis détaillé estimatif de cet abri pour un montant de 800 francs, d’une longueur de 10,20 m pour 15 à 16 lavandières. Cet appentis devait couvrir le lavoir communal existant. Il serait édifié avec des potelets en briques fines arrondies, charpente en bois de Bourgogne, toiture en tuiles plates de Beaussemblant, socle en pierre du Pouzin, devait être fermé sur les cotés ouest et est par des planches de sapin peintes couleur « jaune de gare »,
Le 28 janvier 1890, le maire Gustave Gresse présente à son conseil municipal des plans et devis dressés le 10 décembre 1889 par Mr Cheynel architecte à Crest pour la construction d’un abri au lavoir communal sur le canal des usines dont la dépense est évaluée 800 francs. Le conseil municipal constatant, que le projet répond à un besoin réel si longtemps souhaité par la population et que les ressources de la commune sont suffisantes, est d’avis de mettre en adjudication la construction du lavoir. Par là même, le conseil demande au préfet d’ouvrir un crédit spécial de 800 francs applicable à cette dépense.
Le 17 avril 1890 approbation du cahier des charges et demande au préfet de ratifier le vote, ce qu’il fait.
Le 6 juillet 1890, adjudication accordée par la municipalité, avec autorisation du préfet en date du 13 août 1890, en faveur de Mr Héritier Rémy entrepreneur de maçonnerie de Crest.
Avec quelques modifications, l’architecte Mr Cheynel, établit le 1er décembre 1890 un devis pour un montant de 993,24 francs avec un rabais de 13 %.
Le 24 mai 1891, le conseil municipal vote un crédit supplémentaire de 371,20 francs pour des travaux complémentaires et indispensables à la construction de l’abri.
La construction terminée est remise aux lavandières en 1891 ; il sera utilisé jusqu’en 1995.
En septembre 2016, la toiture de cet ouvrage patrimonial sera restaurée après plus d’un siècle d’utilisation.
A noter que la présence de ce lavoir a causé quelques soucis à la papeterie Filliat. En effet, la pureté de l’eau étant altérée, la fabrication des papiers fins que produisait la papeterie s’en trouvait modifiée.
Le Lavoir de Bellevue
Ce lavoir, à l’origine sur la commune d’Aouste, se trouve depuis 1946 sur la commune de Mirabel- et-Blacons, conséquence du rattachement du quartier de Bellevue à cette dernière.
Par une pétition des habitants de Bellevue adressée au maire d’Aouste en 1923, ceux-ci demande au maire de faire établir un lavoir public couvert sur le canal de Gervanne et sur une parcelle de terre inculte d’environ 50m², cadastrée 126P section C, emplacement gracieusement offert par Mrs Léopold et Joseph Barral frères, industriels, fabricants de billes.
Le 28 août 1923, le directeur de la Papeterie d’Aouste, adresse une lettre au maire s’élevant contre l’établissement de ce lavoir. Le motif invoqué étant, l’eau du canal devenue impure serait préjudiciable à la fabrication du papier., précisant qu’il y a eu des antécédents avec le lavoir communal Filliat. Le 15 septembre, il adresse une nouvelle lettre autorisant l’exécution du projet, précisant toutefois, les conditions de débit d’eau et, dans le cas, ou l’eau serait impure pour la fabrication des papiers fins, il en demanderait la suppression du lavoir.
Par délibérations en date du 10 août 1924, le Conseil Municipal d’Aouste approuve la construction d’un lavoir à Bellevue, suivi de l’acte de cession de Messieurs Joseph et Léopold Barral à la commune en date du 27 août 1924 ( AM MN7 )
La convention entre les parties sera signée le 24 août 1924. Les frais d’enregistrement (20 francs) restent à la charge de la commune d’Aouste. Cet édicule permettrait aux personnes n’ayant pas de lavoirs privés en bordure du canal, de bénéficier de meilleures conditions d’utilisation par mauvais temps.
Par délibération du conseil municipal d’Aouste en date du 10 août 1924, le maire Pierre Cordeil et ses conseillers approuvent la construction de ce lavoir. Les plans, devis et cahier des charges sont établis par Mr Savoyat, ingénieur des Ponts et Chaussées de Crest pour un montant de 2340 francs.
Ces travaux, peu importants, seront soumis aux entrepreneurs locaux sur soumission directe. Le 10 septembre 1924, le Préfet approuve la construction du lavoir. Mr Sibourg Alexandre, entrepreneur de maçonnerie d’Aouste, en est l’adjudicataire par le procédé de marché de gré à gré, aucun soumissionnaire ne s’étant présenté, le 10 septembre 1924. Toutefois, il a accepté de faire les travaux et de les commencer immédiatement moyennant une augmentation de 12%.
Les dépenses supportées par la communauté s’élevèrent en définitive à 3658 francs pour le lavoir. Ces majorations étant dues, pour le lavoir, à des modifications du projet initial et par des dégâts exceptionnels causés par un violent orage.
Le 11 novembre 1925, Mr Savoyat déclare les travaux terminés, reconnus bons et valables.
Le » Petit Bassin «
Construit au-dessus de la galerie du canal de Crest, vers le pont. Ce lavoir semble avoir été édifié à la même époque que le lavoir Filliat et en présente les mêmes caractéristiques tant techniques que pour les matériaux.
Le Lavoir de Chalancon
Ce lavoir construit en bordure du canal de Crest, vers la rue de Charancon n’existe plus; il a été détruit en 1990, aujourd’hui envahi par les broussailles;’on distingue encore les marches qui permettaient son accès, les barres d’appui et la margelle en pierre. Au nord de ce lavoir existait l’étendoir à linge sur lequel est maintenant construit la Halte-Garderie, ancien emplacement de l’église et du cimetière Saint Christophe.
CHAPITRE VI
LES PONTS
Le village d’Aouste semble construit sur un axe est-ouest, en parallèle à la Drôme. Or, historiquement, c’est un axe nord-sud qui permit le développement de ce site, un gué sur la Drôme est à l’origine de l’expansion de celui-ci.
La Drôme, rivière de type méditerranéen, (en grec: la rivière qui court) s’est toujours écoulée au niveau du pont actuel, entre 2 barres rocheuses; en amont, l’actuel quartier saint Pierre étant parfois, dans le passé, inondé. En aval, au niveau de l’embouchure du Lauzens, se trouvait un espace plus large, avec des courants moins impétueux.
Vers 500 avant J.-C., la Route de l’Etain est créée par les Grecs pour l’acheminement de ce métal entre la région de Nantes et la Méditerranée. La carte des «Voies antiques d’ Altonum» indique que, la principale voie de l’étain passait par le Pas de Lauzens et l’emplacement d’Aouste, avant de continuer vers Pizançon par les Arras. La voie la plus proche du Rhône n’était que secondaire étant donné les colères du fleuve et ses crues destructrices….ainsi que la présence de trafiquants occupant les îles et donc difficiles à contrôler. On suppose qu’ici le franchissement de la Drôme se faisait à gué vers l’embouchure actuelle du Lauzens; à proximité de ce passage, des mérides (échoppes louées) pouvaient accueillir le voyageur.
La route de l’étain
Sur cet axe antérieur Nord-Sud, Auguste, désireux de centraliser l’empire, installe un relais de poste pour la liaison Valence – la voie Agrippa – et Montgenèvre (une des routes de la Voie des Alpes), le pont romain, construit ici en pierres, permet de renforcer les échanges économiques administratifs et militaires avec le sud. Des accords avec les chefs voconces garantissaient la sécurité des déplacements. On peut raisonnablement estimer à 800 personnes, au minimum, la population gallo-romaine à la fin du IIIe siècle (mais on ne connaît pas l’étendue d’Augusta Vocontiorum!). La cité se situerait aussi sur «l’itinéraire n° 15 ou Chemin appelé Gontardin ou Costardin dans les textes médiévaux ou modernes» reliant Montélimar – et la voie Agrippa – à la Drôme par le bassin de la Valdaine (1). Le reliquat d’assise du pont romain, en aval du pont actuel, atteste que lors de la construction, le lit de la Drôme était au même niveau qu’actuellement. Le pont reposait sur une assise d’environ 6 mètres de largeur. Avant l’an 1000, les changements climatiques et la déforestation provoqueront des apports de galets qui surélèveront considérablement le lit de la rivière. La villa romaine étant, elle, installée un peu à l’écart de la voie, comme le conseille Caton (-244, -149): «Si possible qu’elle soit au pied d’une colline, qu’elle soit exposée au midi, dans un endroit salubre. Qu’il y ait abondance de main d’œuvre et un bon abreuvoir; qu’il, y ait à proximité une ville importante ou la mer ou un cours d’eau où circulent les bateaux, ou une bonne route fréquentée ( De l’agriculture 1,3). Pendant presque 2000 ans, venant du sud, piétons, muletiers, chariots et soldats entrent dans la cité par l’actuelle rue de la Croisière.
Le pont romain, en partie détruit au Moyen Age, est remplacé par un pont roman à 4 arches, apports de graviers et affouillements se succèdent: ils provoquent de nombreux et coûteux dégâts, ainsi une inondation catastrophique se produit même fin juin 1747. Du Moyen Age à la Révolution, le péage installé au bas de l’actuelle rue de la Croisière sert, en partie, à régler les frais d’entretien du pont et des chemins d’accès.
C’est en 1862 que l’édifice est reconstruit à son emplacement actuel: un pont métallique, type Eiffel, à 2 arches. Aouste est croisement entre la nouvelle route impériale 93, qui longe les deux canaux et la route n°20 de Saint Jean en Royans à Nyons, la traversée Nord Sud d’Aouste se caractérise par les travaux d’alignement entre la gare et la nouvelle église. La construction de ce pont nécessite d’importants travaux de remblaiement et, en aval, le prolongement sous galerie, du canal «de Crest» ainsi que la création d’une nouvelle prise d’eau. Quelques années plus tard, le village s’étendra au sud avec la mairie – école et une grande esplanade, elle aussi surélevée.
En 1940, le génie militaire français fait sauter le pont afin d’arrêter la progression allemande, (ceux-ci s’arrêteront à Romans), les deux parties de la commune sont séparées, il faut traverser à Crest ou Blacons, seuls certains écoliers en sont contents! Une passerelle instable est installée…et détruite par la rivière.
Le pont actuel est construit de 1941 à 1947, l’utilisation du béton armé permet la création d’une seule arche de 65,20 mètres de portée, le profil en long est parabolique, la largeur utile est de 7,50 mètres et la largeur roulable de 5 mètres. Le trottoir en amont est de 1m30 et de 1m20 en aval. C’est l’entreprise Lajoinie qui réalisa ce grand chantier. Même si certains aménagements n’étaient pas achevés, une inauguration eut lieu en 1946, ce fut l’occasion de la dernière «cavalcade» de la commune. En 1999, d’importants travaux d’entretien furent réalisés, le pont reçut la dénomination de «pont du 8 mai 1945»
Après la seconde guerre mondiale, l’utilisation des graviers de la Drôme pour les constructions a, en partie, provoqué affouillements et abaissement du niveau du lit de la rivière ( plus de 5 mètres à Aouste). Les apports de galets en amont d’Aouste sont aussi actuellement, plus limités suite à l’extension des zones boisées dans le Diois.
Lors des crues de 2012, 2013 et 2014, la Drôme a mis à mal l’assise de la dernière pile du pont romain, des services officiels basés à Lyon se désintéressant aussi de ce reliquat de constructions antiques dans une petite commune drômoise. Deux mille années d’histoire sont emportées par les flots tumultueux. La rivière est aussi capable de venir lentement à bout des systèmes de communication édifiés par les plus grands empires.
Le pont Saint Vincent
Ce pont est situé sur le ruisseau de la Lozière qui sépare les deux communes d’Aouste sur Sye et de Crest. L’entretien de ce pont est toujours à la charge des deux communes. Ce pont est aussi appelé le « Pont Bossu »
Le pont de Drôme
Ce pont roman a remplacé le pont romain du IVe siècle jusqu’à sa démolition en 1863 pour vétusté mais aussi pour les travaux d’alignement entre la gare et la nouvelle église, avenue de la Gare (RD 20). Il sera remplacé en 1862 par un pont métallique de type Eiffel.
Le pont d’Aouste sur la Drôme était à péage avant 1790 et appartenait à l’évêque de Die ( vérifié en 1771).
Diverses archives municipales attestent de son existence mouvementée:
BB 1: 1594 : projet de faire » adouber » (accommoder) le pont, suite aux passages des
nombreuses compagnies de soldats….
Sans date: une requête est adressée aux Etats de la province pour faire réparer aux frais de la
province le pont de la Drôme, emporté par les eaux en octobre 1604.
BB 2 : 25 avril 1625 : demande au roi un droit de pontonage pour l’entretien des ponts.
Le 4 novembre 1625: le consul fait garder le pont pour empêcher le logement de 100 à 120 hommes de M de Blacons.
BB 3 : 4 octobre 1629 : réparation du pont sur la Drôme «rompu par un grand déluge d’eau»
BB 4 : 20 février 1630 : mise en place de pièces de bois sur la Drôme, après la rupture du pont
Le 10 mai 1630, réparation du pont à 28 sols la canne.
» ….. Auxquels a été proposé par le consul Achard comment le pont de Drôme étant rompu depuis le grand débordement des eaux arrivé au mois d’octobre dernier, y aurait été mis des planches et autres grandes pièces de bois lesquelles se sont ébranlées et séparées en sorte qu’il est à craindre que quelques bétail soit endommagé requérant des délibérations. Conclut que le conseil fera accommodé le dit pont et l’argent qu’il fournira pour les maçons et manouvriers qui travailleront à la construction lui alloue en ses comptes… «
BB 4 : 20 mai 1630
» …. le dit consul Achard a rapporté avoir fait plusieurs proclamations par Antoine Pollissier sergent ordinaire que qui se voudrait entendre à prendre le prix fait des réparations qu’il convient faire au pont de Drôme (..;) avec trente francs au présent jour que serait délivré au mieux disant requérant d’ordonner de quelle façon il faut faire la muraille et à quelle condition il les fera ... «
BB 6 : 6 juillet 1638 : réparation du Pont de Drôme.
» ….. a encore été proposé par le dit consul qu’il serait nécessaire de faire accommoder le pont de Drôme pour éviter qu’il ne soit ruiné plus avant et que les mulets n’y peuvent plus passer et en plusieurs endroits il y a des brèches aux parabandes du dit pont qui faut aussi accommoder et voir si l’on fera mettre des tailles pour le faire crételer tout du long et voir si l’on le baille à prix fait ou à journée requérant et conclure : Conclut que le consul prendra de chaux vers de dit Evesque et sera fait la calade qui est rompue au pont et à qui « despendra » (dépensera) les 3 livres qui sont entre les mains de Mr de Villeneuve , lui seront entrées en son compte et le fera au mieux …….. «
CC 27 : 1652 : 67 livres pour travail au pont de la Drôme.
BB 9 : 13 juillet 1653 : réparation
« Dans la maison consulaire d’Aouste se sont assemblés Hercule Eymery consul moderne , Joffre Esveque , Maîte Pierre Chabert , Louis Cuocq, Pierre Singuet, Jean Lambert Pierre Chaix, Joachim Adret,
Auxquels assemblés a été proposé par le dit consul que (con…) de la dite conclusion y devant , il a fait accomoder le pont de Drôme à Mr Simond du Puy Saint Martin et l’argent qu’il a eu (……?) le montant 36 livres si bien que seront nécessaires de faire (…..) des dites réparations au dit pont et (….) moyen d’avoir d’argent pour payer les dites maîtres et autres manoeuvres qu’il y a tant pour le charroi de la chaux, pierre et sable, requérant d’y délibérer et de commettre de ceux et céans pour recourir à qui et fait,
Surquoi a été conclut que le consul fera « acharrier les attraits » (charrier les matériaux) au dit pont aux endroits nécessaires et pour le paiement du dit prendra ce qu’on doit pour la réparation du dit pont et après poursuivra ceux qui doivent des « entrages » (droit d’entrée) et dans le cas qu’il manque sera payé par emprunt sur les habitants.... «
CC 53 : 1660 : sur une requête à l’Intendant:
» ils ont cinq ponts à entretenir... » (Drôme, Gervanne avec Mirabel, ruiné en selon BB 4, Saint-Vincent ( La Lozière ) avec Crest, Sie, Crescelon (Craisseron, affluent de la Lauzière), emportés en 1670 selon BB 16) et relance en 1670 (CC 56), sur » l’entretien du pont de la Drôme, à 4 arcades et des 4 autres ponts épuise leurs ressources « .
BB 13 : 29 octobre 1663 : id.
» ….. le dit consul propose de plus que dernièrement que Drôme vient déborder fit des grands dommage proche l’arcade du petit pont que les bêtes n’y pouvaient passer et le dit consul y fit mettre huit fagots et Jean Dufeux avec le fils du dit consul y travaillèrent la moitié d’un jour pour accommoder le dit passage et aujourd’hui y a fait mettre dix fagots et le dit consul y a travaillé avec son fils la moitié du jour pour l’avoir retour accommoder et si on ne fait en sorte de le faire accommoder en bonne forme comme avait été auparavant, il est à craindre que le dit pont ne se perde entièrement , à quoi convient de délibérer
Conclut que le consul assisté de maître Antoine Morier baillera à prix fait pour faire accommoder le dommage que Drome a fait au dit pont et pour le mettre en bon état afin d’empêcher la ruine du pont et aussi baillera à prix fait ou à journée pour (con…) les voûtes des portes du pont de Drome et Sye et les vacations qu’il a fait ou faire pour accommoder le passage du dit pont et bois fourni lui sera alloué en son compte et aussi on vérifiera ceux qui sont nommés ci-dessus si Mr Mathieu Davin a fait de besogne à proportion de l’argent u’il a reçu , et conclut aussi que le dit consul fera mettre le (poutre et pa….) que la communauté a acheté pour l’hôpital et fera raccommoder le couvert du dit hôpital ensemble, retirera des ais de ceux qui ont donné ou voudront donner au dit hôpital pour le faire accommoder et leur en donnera décharge à ceux qui le voudront , en qualité de consul en retirera aussi certificat des maîtres maçons de ce qui leur baillera et lui sera entré en son compte «
BB 16, 14 octobre 1670 : constat suite aux dégâts eaux, et demande » reconstruction au pont de la Drôme de 4 arches bien qu’une 5° soit nécessaire «
» …..propose et requiert le dit consul ….. qu’il serait nécessaire d’envoyer quelqu’un au Montélimar pour présenter requête à Mrs les Elus aux fins qu’ils leur plaise de commettre quelqu’un pour pouvoir procéder à l’estimation et vérification des fonds que les eaux pluviales et autres rivières ont gâté au terroir du dit lieu , ensemble la grande perte qui est arrivé aux vignes de Nozières et détérioration de tous les fruits à cause du mauvais temps , afin de faire décharger partie de la dite taille ….… «
DD 4 :1682 : ordre de l’Intendant de payer 494 livres à Vachon, adjudicataire des réparations du
pont.
FF 21 : 1683/1684: une procédure est engagée par le consul d’Aouste contre Vachon adjudicataire
des travaux des ponts d’Aouste pour non respect des temps et non conformité des travaux accomplis.
1683 : 100 livres versées à Bernard pour les ouvriers qui travaillent à la culée de l’arcade du pont.
BB 22 : 29 mars 1717 : réparation d’une pile du pont sur la Drôme.
1717: demande à l’ingénieur Serment d’un avis sur les réparations à la culée du pont de Drôme du côté du bourg, emportée par les eaux le 13 juillet 1717
29 octobre 1727 : 1790 livres versées à Lantheaume, ayant droit d’Arthaud, maçon et charpentier, sur le montant de la réparation du pont.
BB 25 : réparations de l’arche du pont de Drôme, rive gauche, emportée le 30 juin 1747.
Requête à l’Intendant pour adjuger les travaux du pont de la Drôme en partie détruit par l’inondation du 30 juin 1747 (DD4)
1751: 96 livres sont remises à Guerguy, pour les plan et devis du pont de la Drôme auxquelles
s’ajoutent 24 livres pour ses frais de voyage.
1752 : requête pour obtenir l’imposition sur Aouste, Piégros, Aubenasson, Saint-Sauveur, Saou,…
pour servir à rétablir le pont de la Drôme. Refusé par l’Intendant.
DD 3 : 1757: adjudication des travaux du pont.
1759: demande autorisation de supprimer deux culées au pont dont les fonds récupérés serviront au rétablissement des fontaines, (diminue l’adjudication de 1500 livres). L’autorisation de l’Intendant est accordée le 24 avril 1759.
Un rapport alarmant de l’ingénieur des Ponts et Chaussées en 1859 établit : « le pont d’Aouste sur la Drôme est ruiné, ses fondations sont affouillées, les arbres sont profondément ébauchés à leur base; il peut s’écrouler d’un instant à l’autre (…) il s’agirait de le reconstruire moyennant une subvention de la commune et une avance sans intérêts qui serait faite par les capitalistes du lieu, avance qui serait remboursée par annuités par le département… » . Le pont métallique de type Eiffel lui succède en 1862 et les vestiges du pont roman seront abattus en 1863 ; seule restera encore quelques années au milieu de la rivière, une pile témoin du passé.
Le 24 juin 1940, ce pont métallique sera détruit par le Génie militaire français pour stopper l’avancée de l’armée allemande. Ce nouveau pont, qui porte le nom de » 8 mai 1945 » a été inauguré le 3 mars 1946. Le tablier a servi de passerelle durant sa construction.
Les passerelles
Après la destruction du pont métallique, le 24 juin 1940, par le Génie militaire français pour stopper l’avancée de l’armée allemande, une passerelle provisoire est établie sur la Drôme dès juillet 1940, face à la rue des Remparts. Cette passerelle sera détruite en octobre 1940 par une crue de la rivière.
Une nouvelle passerelle est construite sur la rivière de la Drôme au débouché de la rue de Charancon; celle-ci devra être consolidée en 1941 suite à une nouvelle crue.
Les ponts de Sye
Deux ponts enjambent la rivière de Sye .
Le premier pont, le plus important, est celui qui se situe à hauteur de l’ancien moulin, sur la RD 93, à la sortie du bourg, côté Est, en direction de Die.
Le second traverse la Sye au niveau du quartier Chabanas pour desservir ce quartier et au-delà. La construction fait suite à délibérations du conseil municipal d’Aouste. Le 14 décembre 1865, le conseil municipal approuve les plans et coût de 1608 francs, pour la construction d’un pont en biais en maçonnerie établis par Mr Chabrand, pour desservir le chemin rural.
Les ponts de Lauzens
En 1849, une liste de souscription adressée à la commune est établie par 102 usagers volontaires pour poser un pont en planches en travers du ruisseau de Lauzens sur la route des PLantas. La traversée du ruisseau était devenue dangereuse, situation confirmée par une lettre de l’Agent Voyer en chef du département. (AM 101).
Le 13 octobre 1847, un acompte de 120 francs est payé à M. Thomas, entrepreneur de maçonnerie d’Aouste, pour la bâtisse pour la pose de planches sur le Lauzens ; le 26 août 1848 un paiement de 50 francs sera effectué pour la même tâche. (AM 101)
Le 12 septembre 1865, l’Agent Voyer transmet au Préfet les formalités d’enquête pour la construction du pont et les rectifications du chemin vicinal N° 3 ; Ce projet est évalué à un coût de 6000 francs. Le Préfet donne son accord pour les travaux en mai 1866. (AM 101)
Le 22 décembre 1866 un mandat-accompte de 1000 francs est remis à Thomas Antoine pour la construction du pont sur le Lauzens, sur le chemin vicinal N° 3 (Plantas). (AM 101)
Deux autres ponceaux se trouvent aussi sur le ruisseau de Lauzens, l’un sur le chemin rural N° 8 allant à la Répara et l’autre sur le chemin de Saint Alban.
Le pont de Gervanne
Ce pont est situé sur le ruisseau de Gervanne qui sépare les deux communes d’Aouste sur Sye et de Mirabel et Blacons. L’entretien de ce pont était à la charge des deux communes jusqu’en 1946; rattachement du quartier Bellevue à la commune de Mirabel et Blacons.
CHAPITRE VII
CALAMITES
Deux siècles de calamités
Il nous a paru opportun avant d’évoquer les crues, de faire un petit retour en arrière, pour constater les difficultés qu’ont pu rencontrer nos ancêtres.
Entre 1600 et 1800, les intempéries qui frappent notre région prennent des proportions dramatiques, ayant des conséquences économiques, démographiques et sociales.
Les moyens existants durant ces périodes étaient insuffisants voire inexistants, les techniques d’alors ne permettaient pas de lutter et de contenir efficacement les éléments. L’intervention humaine encore très discrète se révèle incapable de régulariser les fleuves ou de modifier la vitesse des eaux. Les terres étaient insuffisamment protégées et vulnérables aux crues. La population devait composer avec la nature. Les gens devaient endurer ces épreuves à répétition avec son cortège de malheurs; morts, ravages des cultures, réparations permanentes des routes et chemins détruits, ruine, destruction des édifices et des maisons, famine, abandon des terres devenues improductives ou emportées par les eaux, exode vers les villes avec les familles afin de trouver un emploi mais qui, souvent, se soldait par la mendicité.
Un aperçu sur deux siècles dans notre région où l’on voit que Aouste n’a pas été épargnée et a bien malgré lui payé son tribut aux intempéries:
– 1600 – débordement des rivières, froid intense qui gèle les rivières.
– 1605 – sécheresse d’avril à septembre.
– 1607/1608 – un grand hiver avec 55 jours de gel continu.
– 1615 – été excessivement chaud et hiver avec froid intense.
– 1620/1621 – hiver très long et glacial, gelées rudes de fin janvier à fin février.
– 1623 – cinq semaines de forte chaleur.
– 1632 – hiver froid et long, en juin les gens sont obligés de se couvrir comme en hiver, ensuite deux mois de sécheresse perdureront
– 1649 – le 20 juillet la grêle ravage le territoire d’ Aouste.
En 1670, les consuls de la communauté d’ Aouste sollicitent le Conseil du Parlement du Dauphiné, par un mémoire présenté devant Monsieur de Beaufort et ensuite à Monsieur de la Conche, suite aux ravinements de leur terroir par les torrents et rivières qui ont emporté plus des deux tiers de trois fonds roturiers, privant ainsi les habitants des meilleures terres labourables et précisent la situation de dénuement dans laquelle la population se trouvait.
La même année, en exécution d’une ordonnance rendue par Monseigneur André Gleyzal, conseiller du Roi au bureau de l’Élection de Montélimar, un devis de réparation des ponts est fourni par Marc Davin, maître maçon à Aouste, pour un montant de 1483 livres. La Drôme avait emporté la muraille qui soutient la dalle du pont entre la tourelle des latrines et la première arcade sur environ une vingtaine de mètres, risquant la chute de l’arcade. Il en était de même pour la Sye qui menaçait d’emporter la tour » la milanaise» et les murailles, elle avait déjà emporté les pierres de tailles des parapets du pont. Quant au pont de la Lozière, son état était peu enviable ( voir Annexes I – II- III ci-dessous – Suppliques de 1670 et 1671 adressées au bureau de l’Election de Montélimar).
Le pont de Gervanne avait été réparé en 1668 pour sa partie aoustoise.
Annexe 1 Supplique de 1670 au bureau de l’Election de Montélimar
Annexe II – AM EE43 du 21/01/1671 pages 1 et 2 et Annexe III pages 1 à 4
………
Il semblerait que des travaux importants ont été réalisés sur les infrastructures puisqu’en 1681, les devis établis par l’ingénieur Hugo, commis par l’Élection de Montélimar pour les réparations et constructions des ponts sur les rivières et torrents dans le territoire d’ Aouste, s’élèveront à 4950 livres. Un acte à prix fait a été passé le 6 novembre 1691 avec Jean Vachon, maître maçon de Montélimar. Ces travaux ne se dérouleront pas dans les meilleures conditions, car les retards, les insuffisances de travaux, le peu d’ assiduité et les cautions initiales données s’avérant non solvables, nécessitent une requête auprès de l’Intendant Lebret et au recours à Monseigneur Dieulament, ingénieur du Roi. L’affaire va durer. Le 8 février 1699, après requête de la communauté du 6 juin 1697, et après plusieurs notifications verbales, une ordonnance de l’Intendant menace Vachon et sa caution d’achever les réparations dans un délai de trois mois autrement ils y seraient contraints par corps (emprisonnement).
– 1683/1684 – froid terrible en janvier 1684 et neige abondante
– 1684 – été très chaud, inondations désastreuses les 27 et 28 juin.
– 1691 – abondantes chutes de neige.
-1694/1695 – hiver très long d’octobre à mars 1695, avec de fortes gelées et de la neige abondante.
– 1699 – été avec de fortes chaleurs
– 1701 – neige le 30 avril, suivi de fortes chaleurs
– Le 21 octobre 1702, un déluge s’abat sur Aouste et ruine la majeure partie du terroir de la communauté, renversant les arbres, les murailles et ravageant les cultures, ce qui ne contribue pas à la bonne fortune de la population déjà passablement éprouvée.
– 1705 – été si chaud que certains thermomètres (d’ époque) se brisent par dilatation, les habitants se réfugient dans les caves.
– 1709 – hiver terrible: gel des fleuves et rivières en France. A Nyons, le froid tua tous les oliviers et fit émigrer le quart de la population. Les blés gelèrent, aussi le prix du pain qui atteignit en juin 35 sous les 9 livres, au lieu de 7 sous ordinairement. En août, une forte tempête de grêle détruisit tous les arbres fruitiers qu’ils soient gros ou petits, jeunes ou vieux.
– 1715 – hiver très froid et neigeux.
– 13 juillet 1717, une importante crue de la Drôme emporte une culée du pont. Eté excessivement chaud, 6 mois sans eau.
-1719 – une des années les plus chaudes et les plus dèches suivant les délibérations consulaires du département.
– 1722 – hiver si chaud que les fleurs apparaissent en février. Le 31 août pluie, orage et frêle frappent et dévastent le territoire d’ Aouste.
– 1723 – sécheresse générale d’une durée de 3 mois, provoquant une disette de fourrage mais en contrepartie, le peu de vin récolté est d’excellente qualité.
– 1727 – chaleur considérable, 7 mois de sécheresse
– Le 21 juillet 1728, le consul de la communauté A Laget, suite à une délibération du 11 juillet, emploie la somme de 120 livres reçue de François Achard, marchand à Aouste pour faire réparer la culée et la fontaine du pont de Sye endommagées par la rivière. Toutefois cette somme venait au prorata de ce que François Achard devait à la communauté.
– 1728/1729 – hiver très rude, fortes chutes de neige en avril, perte des oliviers
-1740 – hiver très long et froid qui dure de octobre à mars 1740, et temps froid et pluvieux
en été qui compromet les récoltes, en Dauphiné et Provence, perte des oliviers.
– 1742 – une fois n’est pas coutume dans la Drôme, excellentes récoltes.
– 1744 – hiver d’une extrême rigueur, le Rhône est gelé à Valence on peut le traverser à pied.
– 1745 – grandes et multiples inondations en fin d’année: Rhône, Roubion, Ouvèze, Aygues, Lez, Drôme, etc.
– 1747 – en septembre la pluie qui dure 3 jours provoque de grandes inondations, à Aouste les ponts de Sye et de Drôme sont emportés.
– En 1752, le 7 mars, l’Intendant du Dauphiné, Pierre Jean-François de la Porte, au vu de l’arrêt exécutoire du Conseil du Parlement en date du 18 janvier, ordonne l’imposition sur une ou plusieurs années sur les fonds des Trois Ordres d’une somme de 5748 livres pour l’adjudication des réparations à faire au pont de Drôme.
Le 30 juin 1747, une importante crue de la Drôme emporte la culée du pont et une arche de la rive gauche privant la communauté d’ Aouste ainsi que les communautés environnantes » de Piégros, Aubenasson, Saint Sauveur, Saoû, Ansage, Omblèze, La Vacherie, Le Pescher (Le Pêcher), Eyglui, Col de Véraud, Le Cheylard, Baix aux montagnes (Plan de Baix), Gigors, Beaufort, Suze, Cobonne, Montclar, Mirabel, Véronne, Vachères, La Vallée de Quint, Pontaix, Sainte Croix, Saillans et plusieurs autres… », de moyens de communication entre Montélimar, les Baronnies et le Diois.
Les consuls J.P. Ponson et Eymery, devant l’incapacité financière de la communauté de supporter une telle charge, sollicitent l’Intendant suite au constat des dégâts par l’ ingénieur des Ponts et Chaussées de la province Mr Roland, un devis estimatif des réparations s’élevant finalement à 4446 livres a été établi par Jacques Guerguy, géomètre à Montélimar. Ils demandent que cette somme soit couverte par des fonds des Ponts et Chaussées ou par une imposition particulière sur la province, cette espérance de financement s’avérant aléatoire, la communauté demande la permission d’imposer sur les Trois Ordres et de percevoir un droit de pontonnage sur les «étrangers» ( c’est à dire les usagers hors communauté d’ Aouste) durant 10 ans. Cette suggestion ne sera pas suivie d’effet, l’Intendant accorde seulement un dégrèvement de 600 livres sur l’année 1748 et 700 livres sur celle de 1749. La communauté ne pouvant supporter les 2146 livres restantes sollicite à nouveau l’Intendant pour faire réparer ce pont. Quelle réponse de l’ Intendant? Mystère
Toutefois un document ( AM DD 4/60) nous dit que: » En exécution de ses ordonnances des 20 et 29 mars 1749 et en suite de la commission donnée au sieur Guergui par Mr Sibeud votre subdélégué, le dit sieur Guergui a dressé un devis estimatif des réparations à faire au pont de Aouste sur la Drôme, ce devis porte les sommes nécessaires pour les réparations à celle de 6546 livres 5 sols, il reste Monseigneur, de passer l’adjudication pour l’entreprise de cet ouvrage….. »
A relever aussi que la communauté d’Aouste avait en charge pour moitié avec Mirabel de faire réparer le pont de Gervanne à Blacons endommagé par la crue de Gervanne. De même début 1750 une autre crue de la Drôme avait entièrement emporté tout ce qui avait été refait de frais et avait rendu le pont à nouveau impraticable.
– 1752 – Suite à une nouvelle crue, à Aouste, le pont de Drôme nécessite des réparations pour un montant de 5748 livres.
– 1762 – chaleur et sécheresse, pluie à partir de l’automne et il y eut un second printemps.
– Inquiétudes des communautés riveraines de la Drôme suite au dessèchement du lac de Luc conséquent à la sécheresse successive des années 1757 à 1762 pouvant entraîner une catastrophe économique, démographique et sociale. Envoi d’un ingénieur des Ponts et Chaussées Mr Bouchet par l’intendant du Dauphiné et de députés des communautés concernés ( AM DD 3 69)7
– 1766 – hiver rude, froid intense de novembre à fin février, surtout du 13 décembre au 15 février : arbres fendus, vignes perdues d’où vin à 10 sols le pot, de nombreuses personnes sont mortes de froid et de manque de nourriture, car le travail ayant été interrompu pendant cinq mois par suite du mauvais temps, la misère fut effroyable tant dans les campagnes que dans les villes. Requête auprès de l’Intendant des consuls d’ Aouste pour la construction d’une digue au quartier du Vivier pour le protéger des crues répétées de la Drôme (AM Aouste DD 3/72, 3/72;72/1; 72/2; 72/3).
En 1766, suite aux inondations de la Drôme du quartier du Vivier, rive droite en amont de la rivière, après délibération de la communauté, en date du 1er décembre 1766, le consul Louis André sollicite l’Intendant Christophe Pajot de Maréchal pour obtenir la permission de faire dresser un devis estimatif et passer un bail au rabais pour construction d’une digue. Le 22 janvier 1767, l’Intendant ordonne au subdélégué Sibeud de nommer un expert, ce sera Mr Granjon, maçon à Aouste. Un dégrèvement de 400 livres sera accordé par l’Intendant.
– 1774 – débordement du canal des moulins de Aouste à Crest suite à une crue de la Drôme et dégradation du Grand Chemin Royal jusqu’au pont de la Lozière ( AM Aouste DD 4)
– 1775 – froid intense jusqu’à – 22, vent du nord violent et très froid, arbres et vignes perdus, à ce froid succèdent les pluies fréquentes qui occasionnèrent en février une importante fonte des neiges et il s’ensuivit que la Drôme dévasta Aouste et en amont du pont de Crest.
– Février 1776, la Drôme se manifeste à nouveau avec ses violents caprices, les pluies fréquentes font fondre les neiges de février et elle ravage le terroir d’Aouste et en amont du pont de Crest
– 1785 – une grande sécheresse occasionna une perte importante du cheptel par manque de foin.
– 1786 – une importante crue de la Drôme emporte les digues quartiers des Plantas et Soubeyran (archives privées Mr Espinas)
– Le 18 novembre 1788, Demande de délibération pour exécution d’une digue à Aouste sur la Drôme, avant ordonnance d’imposition ( AM Aouste DD 3/73)
– Le 22 juillet, une crue de la Drôme causa des dégâts aux digues en construction à Crest. En novembre, il y eut une crue exceptionnelle
– 1793 – froid durable puis chaleur excessive et sécheresse. L’ abbé Cotte dit dans sa » Météorologie » que » pendant les mois d’avril et de mai, le thermomètre descendit au dessous de zéro et qu’en juin on faisait encore du feu dans les appartements. Le 4 juillet l’air commença à s’échauffer, dés le 8 la chaleur était excessive et elle monta jusqu’à 38°4 centigrades à l’ombre et au nord, cette chaleur si forte succédant à un froid continu et à une sécheresse prolongée produisit des effets désastreux dans les jardins et dans les champs, les légumes furent grillés, les fruits séchaient sur les arbres, les meubles craquaient et les fenêtres se déjetaient ( sortir des châssis)…. A VALENCE, on eut pendant plusieurs jours 40° »
– 1794-1795 – hiver rude, pluies abondantes, deux périodes de gelées intenses, grêle.
– 1800 – violent ouragan sur la vallée du Rhône pendant deux jours (24 à 26 novembre) arbres déracinés, maisons endommagées, dégâts considérables, violent incendie occasionné par la foudre.
A toutes ces calamités, il convient de rappeler la peste de 1628, qui, elle aussi, a fait de grands ravages.
Force est de constater que nos aînés avaient de sérieux problèmes avec les crues de nos ruisseaux et rivières, qu’ils devaient appréhender chaque pluie et chaque orage. Annihiler tous leurs efforts, tous leurs biens, leurs cultures semblaient choses assez fréquentes et les indemnités de secours étaient plus rares en ces siècles.
LES CRUES
La crue est une forte augmentation du débit d’un cours d’eau. Le niveau critique est atteint quand le débordement provoque des dommages.
La crue survient:
– après de fortes pluies en amont dans le bassin versant
– plus rarement lors de la fonte des neiges
– par réamorçage d’un siphon karstique exceptionnellement quand une fracture terrestre profonde libère des nappes phréatiques
– refoulement par un fleuve en crue sur une rivière affluente la montée des eaux provient alors de l’aval.
– conjonction d’une crue sur un fleuve côtier et d’une marée de pleine mer à fort coefficient.
Certains pays organisent la prévision des crues pour alerter la protection civile et la population.
En France, c’est le Service Central d’Hydrométéorologie et d’ appui à la prévision des inondations ( SCHAPI) situé à Toulouse, ainsi que le site VIGICRUES.
Les hydrologues classent l’importance des crues, selon la «période de retour» de leurs débits. On parle alors de crue décennale ou centennale.
Déjà en date du 16 septembre 1840, le Sous-Préfet de Die, interpellait le maire de la commune d’Aouste sur Sye sur la demande d’un riverain, demandant autorisation de créer un mur pour se protéger des crues de la rivière DROME (AM 601)