Voyage par le chemin de fer dans sa traversée de la Drôme en 1854

 

  • Le tronçon d’Avignon à Marseille par Tarascon et Arles est mis en service le 05/03/1849

  • Le tronçon d’Avignon à Orange sera mis en service le 29 juin 1854

  • Le tronçon d’Orange à Valence (La section Valence – Montélimar a été livrée à l’exploitation le 01/05/1854 ; celle de Montélimar – Avignon, le 15/4/1854)

  • Le tronçon de Valence à Lyon-Guillotière le 16/04/1855


Un tronçon complémentaire de Lyon-Guillotière à Lyon-Perrache sera mis en service le 10 octobre 1856

 


Le touriste-voyageur empruntant la ligne de Lyon jusqu’à Avignon avait le temps de découvrir la région traversée.

Les locomotives des années 1860 ne dépassaient guère la vitesse moyenne de 60 à 80 km/h. Toutefois, l’empereur Napoléon III aurait fait, en 1855, le voyage Paris à Marseille une moyenne de 100 km/h. L’exploit était certes techniquement réalisable à condition de tenir dans toutes les gares dotées d’un dépôt des machines prêtes, sous pression,qui se seraient relayées entre elles. Mais en 1855, la ligne Paris-Marseille n’était tout simplement pas terminée. Si cet exploit a réellement existé, il n’a pu se faire que beaucoup plus tard vers 1863-1864. De toute façon aucune trace n’est restée. Alors légende ?






Voici comment le voyageur percevait sa traversée de la Drôme le long du Rhône, entre Saint Rambert d’Albon et Pierrelatte, comment il découvrait ces contrées qui se déroulaient sous ses yeux.

 

Saint Rambert d’Albon (ou de la Drôme)

Arrondissement de Valence et canton de St Vallier

Neuvième station. A 42 km. de Valence. 2470 habitants.

Ce village est assis près de la rive gauche du Rhône. De belles et majestueuses ruines, auxquelles se joint une vieille tour, dominent les habitations du bourg. Cette tour et ces ruines sont les débris de l’ancien château-fort des seigneurs d’Albon, lequel servit de refuge aux comtes de Grésivaudan, lors de l’invasion des Sarrasins,et lorsque ceux-ci s’emparèrent de Grenoble en 730.

La généalogie des d’Albon touche aux premiers siècles de l’ère chrétienne; la souche même de cette famille est perdue dans la nuit des temps. Le premier qui soit connu comme ayant eu des biens dans le Dauphiné, est Guigues Ier, dit le Viel, comte d’Albon, qui, vers l’an 1040, possédait des terres aux environs de Grenoble. Ce Guigues 1er donna le patrimoine qu’il avait dans la vallée de Cezanne, aux chanoines d’Oulx en Dauphiné, en l’année 1053. Il embrassa la vie religieuse à Cluny, en 1075; ce fut saint Hugues qui reçut ses vœux, et qui lui donna Il avait épousé Gothelène, de laquelle il avait eu quatre fils. Son aîné lui succéda sous le nom de Guigues Il, dit le Gros, comte d’Albon et de Grenoble. Ce Guigues Il donna, en 1075, à l’abbé Hugues de Cluny, l’église de Saint Priest en Vallée, et la chapelle de la Mure ; il mourut en 1080. Guigues III, son fils, lui succéda avec les mêmes titres; celui-ci eut des différents avec saint Hugues; cependant ils finirent par s’accorder, et il céda à l’abbé, en 1098, les églises et les dîmes qu’il possédait dans le Grésivaudan. Il eut de Mathilde, que quelques auteurs qualifient de reine, Guigues IV; ce fut lui qui, le premier, prit le nom de dauphin; ce surnom lui est reconnu dans un acte passé entre lui et Hugues, deuxième évêque de Grenoble, en 1140. Deux ans après, il mourait, à Grenoble, des suites de blessures reçues dans un combat livré devant le château de Montmeillan contre Aimé III, comte de Savoie. Ce surnom de Dauphin ne lui avait été donné que pour désigner les différences de son casque, de son écu, de sa cotte d’armes et de la housse de son cheval, qui portaient la figure d’un dauphin. L’histoire qualifie Guigues IV de vaillant guerrier, il avait épousé Marguerite de Bourgogne, nièce du pape Calixte II cette princesse mourut le 8 février 1165. Ils curent deux enfants, Guigues V et Béatrix de Viennois; celle-ci devint la femme de Guillaume de Poitiers, premier de ce nom.

Guigues V, surnommé le dauphin, est le premier qui ait ajouté aux-noms et titres de son père celui de comte de Viennois, parce que ce comté lui avait été cédé par Berthold IV, duc de Zaringhen, qui était gouverneur de la Bourgogne en 1155. Guigues V avait épousé Béatrix de Montferrat, fille de Guillaume II, marquis de Montferrat, et de Judith d’Autriche Ils n’eurent qu’une qu’une fille qui fut dauphine de Viennois, comtesse d’Albon ; elle mourut le 15 décembre 1228. Avec elle finit la première race des dauphins.

Saint-Rambert n’a pas une grande importance au point de vue industriel.

 

Andancette

Dixième station.

Andancette n’est pas une commune, mais seulement une dépendance de la commune de Saint-Rambert. Nous n’aurions rien dit de cette petite localité, si elle ne se trouvait pas être une station du chemin de fer.


Saint-Vallier

Arrondissement de Valence et chef-lieu de canton

Huitième ponton et onzième station.- 2696 habitants.

Le bourg de Saint- Vallier(Sancti-Valerii), paraît être de fondation romaine; il est probable que primitivement ce n’était qu’un fort dont on aperçoit encore les ruines et quelques débris de remparts. Sur les hauteurs, du côté nord, existent deux cassines environnées de retranchements formés de pierres sèches. De cet endroit, la vue plane sur une immense étendue de pays, et l’on découvre une grande partie du littoral, depuis Toulon jusqu’au Var.

Quelques historiens affirment que Saint-Vallier occupe l’emplacement désigné sous le nom (Usoli) dans les cartes de Peutinger. Quoi qu’il en soit, ce fut dans les environs de Saint-Vallier que se réunirent, en 1188, les gentilshommes du Dauphiné partant pour la troisième croisade.

Ce bourg est situé sur la rive gauche du Rhône, au confluent des deux rivières la Galaure et la Valoire. A l’est de Saint-Vallier et à deux kilomètres environ, on trouve les ruines du château de Saint-Barthélemy-de-Vals ; tout auprès on voit un escarpement de roche taillée à pic et d’un travail fort curieux, qui a été entrepris pour donner passage à un chemin de peu d’importance.

Il y a encore dans les environs de Saint-Vallier un endroit qui mérite d’être visité; on le nomme le Pont-à-Dieu. C’est un rocher couvert de gros arbres, et qui, formant un pont, livre passage à une petite rivière appelée la Siogne.

C’est à Saint-Vallier qu’a été fait le premier essai des ponts en fil de fer, dits ponts Séguin.


Serves

Canton de Tain, arrondissement de Valence

Douzième station. 1958 habitants.

Serves n’est point une commune, malgré le chiffre assez élevé de la population mais une dépendance de la commune d’Erome. Au surplus, le chef-lieu communal, pas plus que le hameau de Serves, n’ont d’importance au point de vue historique nul fait marquant ne vient se rattacher à l’un ni à l’autre mais, en revanche, Serves a une importance industrielle on y trouve des forges, des hauts-fourneaux, des fabriques d’acier, des faïenceries, et surtout une fabrique de poterie très considérable il y a également de nombreuses filatures de soie.


Tain

Chef-lieu de canton et arrondissement de Valence.

Treizième station. –2,459 habitants.

Les tables théodosiennes parlent de cette petite ville qu’elles désignent sous le nom de Tegna; d’anciens titres ont changé cette appellation en celle de Teing.

L’église paroissiale de Tain était autrefois un prieuré, que possédaient les Bénédictins de Cluny. Ce fut dans cette église qu’en 1350, Charles, fils de Jean II, duc de Normandie, reçut la bénédiction nuptiale des mains de l’archevêque de Lyon. On sait que, des fils de France, ce prince fut le premier qui porta le titre de dauphin on n’ignore pas non plus qu’il régna, plus tard, sous le nom de Charles V.

Le bourg de Tain est situé au bas de la montagne appelée de L’Hermitage qui produit des vins si renommés. Les meilleurs crus de l’Hermitage sont Méal, Gréfieux, Beaume, Raucoule, Muret, Gueignères, les Bessas, les Burges et les Louds. Tous ces crus produisent des vins corsés, spiritueux, qui réunissent la sève et la finesse au parfum le plus exquis. On les met en bouteille la quatrième année; et en vieillissant, ils gagnent beaucoup.

Vers le milieu du XVIe siècle, on a découvert sur la montagne de l’Hermitage un autel consacré à Cybèle; il est désigné sous le nom de Taurobole.

Tain est situé sur la rive gauche du Rhône, en face de Tournon. Un pont suspendu établit communication entre les deux rives.


Isère

Canton de Tain, arrondissement de Valence

Quatorzième station, 2103 habitants

La station ne se trouve pas sur le territoire du village qui porte le nom d’Isère, mais sur celui de la commune de la Roche de Glun. Toutefois, nous devons dire quelques mots de la rivière l’Isère, qui donne son nom à ce village et au département ainsi désigné, et qui, en cet endroit, se perd dans le Rhône. L’Isère prend sa source dans le Piémont, au pied du mont Isereau elle passe à Tigue, à St-Maurice, à Moustier, où elle commence à devenir flottable, puis à Conflans et à Montmeillan où elle devient navigable. Bientôt après elle entre dans le département auquel elle donne son nom, côtoie le fort des Barreaux, passe à Domaine, à Grenoble à Saint-Quentin, à Romans, puis atteint le Rhône, dans lequel elle déverse ses eaux, après un parcours de 280 kilomètres environ. Ses principaux affluents sont l’Arc et le Drac. Son parcours navigable est à peu près de 159 kilomètres 500 mètres.

Quant à la commune de la Roche de Glun, elle est sur la rive gauche du Rhône; sa population est de 2103 habitants. Point d’historique ne s’applique à cette commune, distante de son chef-lieu d’arrondissement et de département, de 12 kilomètres.




Valence

Chef-lieu du département de la Drôme et évêché

Dixième ponton. Quinzième station. 13407 habitants

L’origine de Valence (Valentia) est incertaine, et aucun historien n’a pu découvrir, jusqu’à ce jour, à quelle époque remonte sa fondation. On sait seulement qu’antérieurement à la conquête des Gaules par les Romains, les Ségalauniens, peuple qui occupait tout le pays situé sur la rive gauche du Rhône, depuis le point de jonction de l’Isère avec ce fleuve, jusqu’à Cavaillon,

en avaient fait leur capitale. La première mention que l’on trouve de Valence est dans Pline. Elle est désignée par Ptolémée le géographe, comme une colonie romaine elle était alors traversée par deux voies qui aboutissaient, d’après les itinéraires, à Vienna, Avenio et Dia. Enfin, Ammien Marcellin et la notice de l’empire parlent également de Valentia.

Dès le commencement du Ve siècle, Valence, attaquée par les Vandales et par les Goths, dut son salut à Constance, général romain. Les Sarrasins s’en emparèrent, l’an 750, et Charles-Martel la réduisit en cendres. Reconstruite elle fut pillée par les Normands, l’an 860. Par suite de la dissolution du royaume de Bourgogne, Valence passa successivement aux princes de Valentinois, puis aux évoques elle fut concédée à ces derniers, en 1157, Mais un siècle ne s’était pas écoulé, que les habitants chassèrent l’évêque qui régnait alors, et la ville fut érigée en commune. Toutefois ce premier pas vers l’affranchissement et cette conquête de l’indépendance, n’eurent pas de grands résultats. Le vaillant Mont-Brun, l’un des chefs du parti protestants, ne put réussir, en 1573, à s’emparer de Valence, quoiqu’il entretînt de secrètes intelligences dans la ville, et quoiqu’il y fût venu lui-même à deux reprises différentes.Lorsque le directoire-exécutif eût été instruit de l’assassinat du général Duphot, à Rome (1798), il fit enlever le pape Pie VI, qui fut conduit à Valence. Ce vénérable pontife y mourut, le 29 août 1799. Son tombeau se voit dans la cathédrale,et le buste du saint père est une œuvre du célèbre Canova.

Les annales de cette ville sont fécondes en souvenirs intéressants. Le connétable Lesdiguières,surnommé le renard du Dauphiné, y termina, en 1626, et à l’âge de 84 ans, une glorieuse carrière. Vers la fin du siècle dernier, un jeune lieutenant d’artillerie, qui fut depuis l’empereur Napoléon Ier, était en garnison à Valence.Il était reçu chez madame du Colombier, femme d’un grand mérite, qui professait une haute estime pour le jeune officier.La perspicacité de cette-dame avait deviné l’homme de génie qui devait, plus tard, dicter des lois à l’Europe.

Les anciennes murailles de Valence existent encore, mais elles sont dans un état de délabrement complet. On trouve et l’on distingue au milieu de ces débris la citadelle construite sous le règne de François Ier et par les ordres de ce prince; sa forme était triangulaire. Un beau pont traversait le Rhône en face de Valence; il fut détruit pendant les guerres de religion ; celui qui le remplace, et qui est suspendu, est regardé comme le plus beau de ce genre qui existe en France; il date de 1828.

L’église cathédrale de Valence sous le vocable de saint Apollinaire,fut consacrée en 1095; plus tard, et en 1604,elle fut reconstruite sur un nouveau plan. En général, on n’y trouve rien de remarquable.Cependant il faut faire exception en faveur d’un petit monuments, qui est au nord de l’édifice, sur l’emplacement occupé jadis par un cimetière. La voûte de ce monument est remarquable par la richesse et l’ornementation de son architecture. C’est la première des beautés de ce genre qui existe en France; on l’appelle le pendentif de Valence.L’intérieur de ce monument est recouvert par une toiture à quatre faces, qui se termine en pointe.

Valence avait autre fois un évêché. Cette ville dépendait du parlement et de l’intendance de Grenoble,elle était chef-lieu d’une élection, d’un bailliage, d’une sénéchaussée, d’un présidial, d’une justice royale, et avait son gouvernement particulier. Il y avait aussi jadis, à Valence,une université fondée en 1452, par le dauphin Louis, qui fut depuis Louis XI. On y comptait, outre le chapitre, deux abbayes et six couvents.

Une route conduit de Valence à Grenoble en passant par Romans.

Plusieurs personnages célèbres ont reçu le jour à Valence dans ce nombre nous citerons D. Joubert, savant médecin le général Championnet, le comte Français de Nantes, Bérenger, célèbre jurisconsulte du XVIe siècle; M. de Montalivet ancien ministre et ancien intendant de la liste civile, et M.Baude, ancien préfet de police.

Aujourd’hui,Valence est évêché, chef-lieu du département de la Drôme; elle a un ponton sur le Rhône et une station sur le chemin de fer de Lyon à Marseille.

Nous donnons ci-après les différentes heures des départs pour Avignon et pour Marseille, ainsi que les prix

    • Premier départ à 6 heures du matin, train omnibus, 1ere, 2e et 3e classes.
    • Deuxième départ, 10 h. 45 m. du matin, train omnibus, 1ere, 2e et 3e classes.
    • Troisième départ, 1 h. 45 m. du soir, train express,1ere classe.
    • Quatrième départ, 3 h. 20 m. du soir, train direct, 1ere et 2e classes.
    • Cinquième départ, 4 h. 30 m. du soir, train omnibus, 1ere, 2e et 3e classes.






La distance de Valence à Avignon est de 125 kilomètres, il y a 18 stations. Ce tronçon a coûté 40 millions de francs.

 

Etoile

Canton et arrondissement de Valence

Seizième station. 3065 habitants.

Ce village est situé à 15 kilomètres de Valence; son origine et l’époque précise de sa fondation n’ont pu être précisées jusqu’ici par les historiographes aucuns titres, aucuns monuments ne peuvent les aider dans leurs recherches à ce sujet. Cependant ils s’accordent tous à classer Étoile parmi les meilleures places de guerre du Valentinois, soit pendant les temps féodaux, soit a l’époque des guerres de religion. Dans ces temps de luttes perpétuelles et de combats incessants, le village d’Étoile fut pris et repris en différentes fois. Son château a joui d’une certaine célébrité: Louis XI, roi de France, l’habita pendant son séjour en Dauphiné. Après la mort de ce prince, ce château reçut une assemblée de toute la noblesse des alentours. Les seigneurs voulant se concerter pour aviser aux moyens de ressaisir le pouvoir féodal qui leur avait été enlevé, se fortifièrent dans ce manoir; mais le gouverneur, instruit de leurs projets,vint assiéger le château qui ne tarda pas à se rendre, et sa capitulation entraîna la ruine du parti féodal. La fameuse Diane de Poitiers, que la faveur de François Ier et celle de Henri II avaient élevée en si haut rang, et qui avait joint le titre de Diane d’Étoile à celui de duchesse de Valentinois, fit restaurer et embellir ce château, dans lequel elle se plaisait beaucoup.Cette demeure seigneuriale, qui rappelle tant de souvenirs historiques, est maintenant occupée par une fabrique de soie et par des moulins.

De la commune d’Étoile dépend le hameau dit de la Paillasse, bâti sur le penchant d’un coteau et entouré de murailles dont la plus grande partie est démolie. La Paillasse est traversé par la route impériale n° 7. On y voit une colonne milliaire qui a été placée, l’an 147 de notre ère, sous le règne d’Antonin-le-Pieux.


Livron

Canton de Loriol, arrondissement de Valence.

Dix-septième station. 4022Habitants.

Livron est situé sur le penchant d’un coteau escarpé, d’où l’on découvre une belle plaine qui pourrait, tant elle est riante être appelée jardin ; cette plaine se prolonge jusqu’à l’endroit où la Drôme, qui donne son nom au département, déverse ses eaux dans le Rhône: on a jeté sur cette rivière auprès de Livron, un pont en pierre d’un beau travail et d’une construction très hardie. Une rencontre eut lieu sur ce pont, en 1815, entre les troupes, ou si l’on veut les volontaires royaux sous les ordres du duc d’Angoulême, et les soldats qui s’étaient rangés du parti de Napoléon.

L’origine de ce village est encore enveloppée du voile de l’obscurité. On ne connaît rien de positif sur son histoire jusqu’à l’époque où nous le voyons incendié, en 1345, lors de la guerre dite des épiscopaux entre l’évêque de Valence et le comte de Valentinois. Depuis il fut réédifié, et il paraît même fortifié de nouveau, car au temps des troubles religieux qui marquèrent le XVIe siècle, il était regardé comme l’une des places les plus importantes du Dauphiné.

Nous devons même relater ici que Livron a acquis, dans les luttes des catholiques et des protestants, une certaine célébrité. Cette ville fut assiégée, lors des guerres religieuses, par le maréchal de Bellegarde et par Henri III en personne; l’armée catholique fut repoussée. Livron était défendu par Dupuy-Montbrun.

Puisque nous sommes arrivés à l’embouchure de la Drôme, nous allons dire quelques mots de cette rivière, qui mériterait la qualification de torrent. La Drôme, en latin Druna, prend sa source dans une gorge des Alpes, près d’un village nommé Val-Drome; dans son parcours, qui est d’environ 110 kilomètres, elle passe à Luc-cn-Diois, à Die, à Pontaux (Pontaix), à Saillans, à Crest, et vient se jeter dans le Rhône. Nous croyons ne pouvoir mieux faire que de citer ici textuellement, au sujet de cette rivière, un extrait du Dictionnaire géographique de la France dont les appréciations nous paraissent très justes : « La Drôme roule ses eaux capricieuses dans une vallée dont les divers bassins offrent, tour-à-tour, le tableau mouvant des aspects les plus pittoresques et les plus nobles par le luxe de la végétation, l’élégance et l’harmonie des lignes de l’horizon et des sites les plus sévères, par la rigidité et le déchirement des rochers et des hautes montagnes qui enferment la vallée. Cette rivière forme, dans le bassin qui porte son nom, deux lacs séparés par une chaussée naturelle. La Drôme n’est flottable que depuis Luc-en-Diois jusqu’à son ,embouchure sur une étendue de 81876 mètres. Elle sert particulièrement au transport des bois provenant des forêts situées sur son parcours. Ses principaux affluents sont :le Bès, la Rohanne et la Sure. »

Pour la traversée de cette rivière, l’administration du chemin de fer a fait exécuter un viaduc qui a 120 mètres de longueur sur 80 centimètres d’épaisseur. Ce viaduc est pavé de marbre trouvé dans le pays. Non loin de là on voit le pont de Bloussard, exécuté d’après un système anglais.

 

Loriol

Chef-lieu de canton, arrondissement de Valence

Dix-huitième station. 3460 habitants.

Ce bourg, situé rive gauche du Rhône, sur un coteau à peu de distance de Livron dont il est séparé par le pont dont nous avons parlé, à l’article qui concerne Livron, établit les communications entre les deux bourgs.

Loriol (en-latin Laurcolum, Àureoli) faisait jadis partie du diocèse et de l’élection de Valence, et dépendait du parlement et de l’intendance de Grenoble.

Quelques historiographes pensent que ce bourg, autrefois petite ville, était l’ancienne Batiana, dont il est question dans les itinéraires romains. Toutefois, ce point est très contestable et très litigieux. D’autres attribuent la fondation de Loriol à l’empereur Aurélien, qui lui aurait donné son nom et l’aurait entourée de fortifications. Mais ce qui est certain, c’est que, pendant les guerres religieuses du XVIe siècle ce bourg a été pris et repris très souvent par les deux partis.


La Saulce ou Sauzet

Canton de Marsanne, arrondissement de Montélimar

Dix-neuvième station. 1503 habitants.

Le village de la Saulce, ou Sauzet est placé sur le point culminant d’une éminence, au dessus de laquelle on aperçoit les ruines d’un ancien château, que Louis XI a jadis habité, et d’où sont datés plusieurs édits rendus par ce monarque.

 

La Coucourde

Canton de Marsanne, arrondissement de Montélimar.

Vingtième station.

La Coucourde dépend de la commune de Lachamps,dont la population est de 468 habitants.

Après avoir passé cette station et sur le bord du Rhône, on voit, sur une longueur d’environ 4 kilomètres, un grand mur construit pour supporter le chemin de fer ce bel ouvrage de maçonnerie a 50 000 mètres de longueur. Non loin de là, on remarque le pont de l’Obignes qui a cinq arches de formes élégantes et solides.


Montélimart (Montélimar)

Chef-lieu de canton et d’arrondissement

Vingt-unième station. 7820 habitants.

Montélimart, autrefois ville du Bas-Valentinois, chef-lieu d’une élection, siège d’une sénéchaussée, est aujourd’hui sous-préfecture dans le département de la Drôme.

Cette ville, située à peu de distance du Rhône au confluent des deux rivières, le Roubion et le Jabron, est dans une bonne position favorisée par un terrain tertiaire moyen arrosé par les deux ruisseaux que nous venons de nommer; ce qui procure une belle et abondante végétation, dont la fraîcheur et la variété rappellent au voyageur quelques uns des sites qu’il a rencontrés et admirés dans le cours du voyage de Lyon à Paris. La pente du sol est douce elle se dirige vers l’ouest et se termine vers le Rhône.Le Roubion et le Jabron se divisent en plusieurs canaux, lesquels sont utilisés soit à l’irrigation, soit comme force motrice par diverses fabriques. Au point de jonction de ces deux ruisseaux,on a jeté un pont d’une construction fort belle. Le duc d’Angoulême livra un combat sur ce pont,en 1815.

Montélimart a le passage de la route impériale n° 7 ; cette route, dans le parcours de la ville,est pavée en basalte.La ville est bien percée, mais les constructions manquent de régularité. Autrefois, elle était entourée de murailles ; les portes existent encore et sont au nombre de quatre, dont chacune est dans la direction d’un des quatre points cardinaux. Aucun monument, aucun édifice ne mérite d’être remarqué.

Il faut remonter à une haute antiquité pour trouver l’époque de la fondation de Montélimart. Quelques auteurs pensent que ce fut jadis l’Acusio Colonia placée dans cette localité par les anciens géographes qui, cependant, ne précisent rien quant à la situation de l’Acusio Colonia. Plus tard cette ville prit le nom de Monteil, lequel en se confondant avec celui d’Adhémar (l’un des seigneurs de la ville, et auquel les habitants durent leur affranchissement, en 1198), a produit la dénomination de Montélimart.

Le vieux château que l’on nomme la citadelle, est dans un bon état de conservation. Cependant sa construction n’a pas coûté beaucoup de dépenses, et l’art n’y a pas laissé beaucoup de ses traces. Au nord de ce château se trouve une tour carrée, qui ,a encore 27 mètres de hauteur. L’ancien donjon, autrefois flanqué de tours, a été fortifié d’après le système moderne, et sur les desseins fournis par M. le chevalier Deville. De nos jours, ce bâtiment a été affecté à la maison de correction.

Les événements qui tiennent la plus grande place dans l’histoire de Montélimart sont ceux qui se passèrent dans le XVIe siècle. Cette ville fut l’une des premières à adopter la réforme et aussi l’une de celles qui eurent le plus à souffrir des querelles de religion qui marquèrent cette époque. Les protestants s’en rendirent maîtres en 1562 ils détruisirent les églises, et étendirent les fortifications. A quelque temps de là, Montélimart tombait au pouvoir de Gorde; puis, après la bataille de Montcontour, l’amiral de Coligny vint assiéger cette ville, mais il fut obligé de se retirer, à la suite d’une sortie que firent les femmes, commandées par une nouvelle Jeanne Hachette nommée Margot Delaye. On voit encore aujourd’hui sur le rempart qui fut le théâtre des exploits de cette héroïne, la statue que lui érigea la reconnaissance de ses concitoyens.

Après Coligny,vint Lesdiguières qui, plus heureux, réussit à s’emparer de Montélimart, en 1585.Deux ans plus tard, le comte de Suze reprenait la ville sur les huguenots, après une défense opiniâtre, suivie d’un horrible carnage. Enfin les protestants parvinrent à en chasser les ligueurs, mais on peut dire qu’ils ne restèrent maîtres que d’une ville entièrement dépeuplée et presque détruite.

Parmi le nombre assez grand de personnages célèbres dans les sciences et les lettres, qui ont reçu le jour Montélimart, nous citerons Aymar de Pontaymery, F. Barry, Boisset, Job Aimé, Foujax de Saint-Fond, Frécynet, Menuret de Chambaud, et A.E. de Genoude, qui était rédacteur de la Gazette de France.

Cette ville est avantageusement dotée sous le rapport industriel. On y fabrique des soies ouvrées, de la serge, de la ratine et de la bonneterie; il s’y fait aussi beaucoup d’ouvrages en vannerie, Il y a des filatures de coton, des tanneries, des maroquineries, des tuileries et des fours à chaux. Le nougat de Montélimart, très renommé, est un objet de spéculation fort étendu; il se fait aussi un commerce considérable sur les grains, les farines, les légumes, l’huile d’olive et l’huile de noix; sur les soies ouvrées, les bestiaux, etc., etc.

Il existe au Boudoneau, l’un des quartiers de Montélimart, une source d’eau minérale gazeuse, d’une assez grande abondance, et dont les propriétés curatives ont été reconnues par l’expérience depuis fort longtemps.


Chateau-Neuf du Rhône 

Canton et arrondissement de Montélimart

Vingt-deuxième station 1450 habitants.

Ce village, situé presque en face de Viviers, sur la rive gauche du Rhône, et à peu de distance de ce fleuve, n’est éloigné de Montélimart que de 8 kilomètres ; sa position, au bas d’un coteau, le rend agréable et pittoresque.

Il existait à Château-Neuf-du-Rhône des murailles défendues par deux châteaux-forts placés de chaque côté du défilé qui sert d’entrée au pays. Une tradition assigne à ce village une origine très reculée, et prétend qu’il couvre l’emplacement occupé par une ancienne ville détruite jadis par les Sarrasins, et l’on va jusqu’à dire que l’on distingue encore l’enceinte de cette cité.

Aux environs et dans la direction du Rhône, on trouve la fontaine de Montérol laquelle, assure-t-on a été construite par les Romains.

Château-Neuf est la patrie du marquis de Courbon, lieutenant-général des armées de Venise.

Il se tient dans ce village deux foires annuelles,l’une, le 6 juillet, instituée par décret du 22 avril 1854 et l’autre, le 18 août.


Donzère

Canton de Pierrelatte, arrondissement de Montélimart

Vingt-troisième station. 1774 habitants.

Le village de Donzère, traversé par la route impériale n° 7 est situé sur la rive gauche du Rhône et non loin de ce fleuve; il est domine par un monticule au sommet duquel on aperçoit les ruines majestueuses d’un ancien château bâti dans le XVe siècle, et qui appartenait aux évêques de Viviers. Tout près de là se trouvent un petit ermitage et un télégraphe dépendant de la ligne de Toulon. Du haut de cette montagne, la vue peut s’étendre sur un vaste horizon on découvre tous les villages qui, du côté sud, commencent le département de Vaucluse, et on peut suivre les diverses courbes que décrit le Rhône dans son rapide cours. Une grotte d’une étendue remarquable se trouve dans le voisinage du Rhône., e-t au milieu de roches à pic.

Les environs de Donzère sont garnis de vignobles, et les vins de ce territoire jouissent d’une juste réputation.

Ce bourg a vu naître Lebrun-Tossa (journaliste, auteur dramatique et écrivain).

Le commerce des vins est la spécialité du trafic qui se fait dans cette commune.


Pierre-Latte (Pierrelatte)

Chef-lieu de canton, arrondissement de Montélimart

Vingt-quatrième station. 3430 habitants.

Pierre-Latte (Petru lata) faisait jadis partie du diocèse de Saint-Paul-Trois-Châteaux, dépendait de l’élection de Montélimart, du parlement et de l’intendance de Grenoble. Ce village est bâti au pied d’un rocher, au sommet duquel on voit les ruines d’un vieux château-fort que le baron des Adrets assiégea, en 1562, et dont il s’empara, malgré la résistance vigoureuse qu’on lui opposait.Fidèle à ses habitudes de cruauté, le baron vainqueur fit précipiter, du haut des murs du château, les soldats qui en composaient la garnison et passer au fil de l’épée les habitants du bourg.

Un canal d’irrigation, de 40 kilomètres de longueur, lequel commence à Château-Neuf et finit à Caderousse, traverse le territoire communal de Pierre-Latte.


La route impériale n°7, de Paris à Antibes, passe aussi à Pierre-Latte.





Carte du voyage de Lyon à Avignon




 

 




Sources 
: « Voyage de Lyon à Avignon par le chemin de fer et le Rhône » de Théodore Ogier, 1854.